"C’est la fin des droits fondamentaux de notre pays", Yann Manzi, cofondateur d’Utopia 56, réagit à l’adoption de la loi immigration

Pour le délégué général de l’association d’aide aux migrants, l’adoption de la loi immigration portée par Gérald Darmanin, est “une honte”. Sur le terrain, Yann Manzi “craint le pire”. Il assure qu’Utopia 56, présente dans le Nord Pas-de-Calais (Calais, Grande Synthe, Lille), restera mobilisée.

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Pour le cofondateur d'Utopia 56, l'adoption de ce projet de loi constitue "un drame". L'homme à la tête de l'association d'aide aux migrants s'inquiète, considérant que "la droite dure" gouverne davantage que la majorité présidentielle. Il redoute les conséquences de cette loi sur le terrain, notamment à Calais et à Grande-Synthe. 

Vous êtes le cofondateur de l’association Utopia 56. Comment réagissez-vous à l’adoption de la loi immigration ? 

C’est une honte. C’est incroyable qu’on en soit arrivés là. Malgré notre sourire de la semaine dernière et le barrage fait à Gérald Darmanin dans un premier temps, on était tous sûrs et certains de déchanter rapidement. Ce qui ressort de cette loi est absolument abject et va jeter des milliers de personnes sur les trottoirs de nos villes [avec ce projet de loi, les étrangers visés par une OQTF seront exclus du droit à l’hébergement d’urgence, sauf en attente de leur expulsion, ndlr]. Le gouvernement Macron ne gouverne plus, on voit que la droite dure, avec Les Républicains et l’extrême droite, donne le ton.

On est revenus à une loi Pasqua et on va encore plus loin, avec la remise en cause du droit du sol et la préférence nationale pour les allocations. Il ne s’agit pas d’une crise migratoire mais d’une crise de l’accueil migratoire. Aujourd’hui, cette politique est menée par du racisme. On l'a prouvé avec l'Ukraine, on peut accueillir des exilés… s’ils viennent d’Europe ! Quand c’est des noirs, des Arabes, on fait la fine bouche. C’est la fin des droits fondamentaux de notre pays. Encore une fois, on met l’exilé au centre de tous les problèmes de la France. Comme s’il était la source de tous nos maux. C’est une diversion pour ne pas s’occuper des vrais problèmes des Français.

Quelles conséquences cette loi va-t-elle avoir concrètement ? 

Concrètement, on craint le pire. Sur le terrain, on était déjà nous sur une extrême précarité. Toutes les associations tirent la sonnette d’alarme. Les dons n’arrivent plus car nos concitoyens sont touchés par la crise.

La fin de l’inconditionnalité de l’hébergement signe le début d’un drame humain qui va se jouer dans les semaines et mois à venir. Des sans-papiers et des déboutés du droit d’asile ne seront plus accueillis, n’auront plus rien et vont se retrouver à la rue. C’est en décalage par rapport à la réalité de ce qu’il faut faire. Il y a déjà des milliers d’enfants à la rue. 

C’est un drame pour nous et nos équipes. On va tout faire pour répondre à la vague de mise à la rue qui va arriver dans les mois qui viennent. La tâche était déjà immense, l’abandon de l'État était déjà immense et aujourd’hui ça va être encore pire. On sera seuls, les élus et les citoyens, à faire face à la réalité de ce qui a été voté aujourd’hui. Ça laisse présager quelque chose de très violent. 

Qu’en est-il de la situation particulière dans le Pas-de-Calais, à Calais et à Grande-Synthe ? 

Je ne sais pas ce qu’il va se passer. Les personnes sur le littoral pourront désormais être considérées comme des délinquants, puisque venir clandestinement en France pour aller en Angleterre sera illégal [avec ce projet de loi, le délit de séjour irrégulier est rétabli, ndlr]. En cas de récidive, il y aura une possibilité d’arrestation voire de détention. 

C’est peut-être pour le gouvernement une solution pour bloquer les passages vers l'Angleterre, pour diminuer les départs en bateau. On est déjà passé de 45 000 passages en 2022 à 32 000 en 2023. Ce qui est sûr c’est que ces gens sont là et qu’ils vont continuer à essayer de passer en Angleterre. Ça va être très violent. Davantage de routes migratoires vont s’ouvrir, les personnes vont partir de plus loin pour essayer d’atteindre les côtes anglaises. Il y aura donc davantage de risques et davantage de morts. La réalité va être très violente pour les personnes “entrées clandestinement en France”.

Quel est votre message aujourd’hui ? 

Nous, on va rester sur le terrain et faire de notre mieux pour faire face. La seule chose qui peut faire bouger les lignes, c’est que les citoyens se mobilisent. Il faut se bouger, se lever et se dresser contre le Rassemblement National qui va finir par prendre le pouvoir. Citoyens, bougez-vous.

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