Les jeunes des Hauts-de-France fument et boivent moins qu'avant, et moins que le reste du pays

Si, dans les Hauts-de-France, plus d'un adulte sur quatre fume régulièrement, la proportion de jeunes fumeurs a été divisée par deux depuis 2014. La tendance est similaire concernant l'alcool. Mais "les chiffres restent importants" nuance un addictologue qui encourage des actions étatiques et une prévention plus précoce de la part des soignants.

Depuis une dizaine d'années, la cigarette a moins la côte chez les jeunes. Et la tendance se confirme, en particulier dans les Hauts-de-France, selon la dernière enquête ESCAPAD de l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), menée sur l'année 2022.

Dans la région, on note ainsi une baisse importante de la consommation quotidienne de tabac chez les jeunes de 17 ans, avec un niveau de consommation inférieur à la moyenne nationale. En 2022, ils étaient 13,2 % à fumer quotidiennement dans les Hauts-de-France, contre 15,6 % sur l’ensemble du territoire métropolitain. 

"L'adolescence est une période charnière"

"Il faut se féliciter de cette diminution, les actions finissent par avoir un effet. Mais les chiffres restent importants", constate Hakim Houchi, addictologue à Amiens et chercheur associé dans le groupe de recherche sur l'alcool et les pharmacodépendants de l'Inserm.

C'est à la politique étatique de trouver des solutions. Et aux soignants et aux intervenants sociaux de s'impliquer davantage dans les actions de prévention, sans attendre que les dommages soient présents pour le faire.

Hakim Houchi, addictologue à Amiens

Car fumer jeune, c'est "exposer le cerveau à des substances addictives" et donc "augmenter le risque d'être dépendant aux autres addictions", explique l'addictologue. "L'adolescence est une période charnière, car les neuro-adaptations se font encore, le cortex préfrontal est en développement, or c'est lui qui empêche les instincts primaires de prendre le dessus sur la raison sociale."

Plus d'un jeune sur deux a testé la cigarette électronique

Les proportions de fumeurs réguliers sont en forte baisse par rapport à 2014 dans la région (31,3% à l'époque) comme sur le reste du territoire métropolitain (32,4%). "Cette baisse dissimule néanmoins des situations contrastées : hausse des usages de la cigarette électronique; persistance des inégalités sociales et dégradation de l’état de santé des jeunes", note l'OFDT dans son rapport. 

Comment expliquer cette tendance à la baisse ? "Chez les jeunes, le prix joue beaucoup. C'est la première cause de diminution de la consommation de tabac, observe Hakim Houchi. Et ce n'est plus trop à la mode de fumer. Les autres substances comme la vape et la chicha entrent en jeu".

Concernant la cigarette électronique, 6,5% des jeunes de 17 ans des Hauts-de-France en font un usage quotidien, un chiffre qui se situe légèrement au-dessus de la moyenne métropolitaine (6,2%). En revanche, son expérimentation s’avère moins fréquente dans la région (52,6 % vs 56,9 %).

Si la cigarette électronique peut être un bon moyen de sevrage tabagique mais "elle ne doit pas être utilisée chez les jeunes non-fumeurs parce que ça peut être un appel au tabagisme et ils peuvent devenir victimes de cette industrie du tabac", alerte Olivier Leleu, pneumologue au centre hospitalier d'Abbeville, invité d'ICI 19/20 vendredi 31 mai, pour la journée mondiale sans tabac. 

Un adulte sur quatre fume

Cette récente étude sur les jeunes contraste avec celle de Santé publique France concernant les adultes. Dans les Hauts-de-France, 26,1% des 18-75 ans fument quotidiennement, et en particulier les hommes. Mais le territoire fait toutefois partie des six régions de l'Hexagone ayant connu une baisse significative du tabagisme entre 2010 et 2021.

Et cette baisse pourrait s'accentuer dans les prochaines années. La commission des affaires sociales du Sénat recommande d'augmenter le prix du tabac de 5% par an jusqu'à 2040 pour que la consommation recule. Il pourrait atteindre 25€ à cette date. Comme en Nouvelle-Zélande et en Australie où les fumeurs y sont deux fois moins nombreux qu'en France.  

Le fléau de l'alcool

La consommation d'alcool quant à elle, qu'elle soit au cours du mois ou régulière, est aussi moins élevée dans les Hauts-de-France que sur l'ensemble de la France métropolitaine. Les proportions sont d'ailleurs en baisse pour la région et le pays sur la période 2017-2022. 

On note que 80,6% des jeunes de 17 ans ont déjà expérimenté de l'alcool et que 54,9% en consomme au moins une fois par mois, tandis que 10,6% en consomment de façon importante au moins trois fois par mois. Or, "quand on commence à consommer de l'alcool avant 16 ans, on a quatre fois plus de risques de développer un trouble lié à l'usage de l'alcool à l'âge adulte", pointe Hakim Houchi.

"C'est un drame. Les jeunes ne sont pas censés avoir accès à l'alcool", souligne l'addictologue. "Les lobbies de l'alcool sont importants, la politique n'est pas aussi efficace qu'avec le tabac, et il manque le repérage précoce." Les jeunes sont exposés de manière trop précoce à l'alcool. Une exposition qui n'est pas que gustative.

L'exposition à l'alcool, c'est aussi voir les autres, comme ses parents, normaliser la consommation d'alcool. Ça va inciter les jeunes à boire plus tôt, car ils voient que c'est normal pour les adultes.

Hakim Houchi, addictologue à Amiens

Pour l'addictologue, il faudrait donc que les actions gouvernementales soient "un peu plus incitatives". Les campagnes gouvernementales "doivent être plus présentes et montrer le côté délétère de cette consommation d'alcool". 

Le tabac et l'alcool sont les deux premières causes de mortalité évitable en France, où ils tuent respectivement plus de 75 000 et plus de 49 000 personnes chaque année. 

Des jeunes moins consommateurs de drogues 

Concernant les autres drogues, on observe un usage moindre du cannabis, tant en termes d’expérimentation (23,2 % vs 29,9 %) que d’usage dans le mois (10,1 % vs 13,9 %). 

Contrairement au reste du territoire, les jeunes de 17 ans des Hauts-de-France, ont moins expérimenté le poppers, la cocaïne et le crack. Mais les garçons de la région ont davantage expérimenté les amphétamines que ceux du reste du territoire (1,6 % vs 1,0 %).

En cas de dépendance à une substance, il est vivement conseillé de consulter son médecin ou un addictologue. Il est aussi possible de se procurer des informations ou de l’aide auprès d’Alcool Info Service, au 0 980 980 930, de Tabac info service, au 39 89, et de Drogues info service, au 0 800 23 13 13.

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