Une épicerie de Péronne ferme ses portes 24 ans après son ouverture : "c'était comme un rite de venir ici"

Avec la baisse de sa fréquentation, l'épicerie Primeuro n'est plus rentable aux yeux de ses exploitants. L'un d'eux raconte les coulisses de cette fermeture et l'impact sur leurs clients.

"La décision a été prise en juin, lors du renouvellement du bail". D'un ton fataliste, Christophe Feruglio se rend à l'évidence. Il voit presque un quart de siècle de l'épicerie Primeuro s'arrêter net. "On ouvrira dimanche 22 janvier pour liquider les derniers stocks et si je vois qu'il n'y a pas foule dans l'après-midi, je baisserai le rideau une dernière fois".

Dans la rue du Vert Muguet à Péronne, il partage l'étal de son échoppe depuis octobre 1998 avec sa soeur Brigitte Caron. "Ce n'était plus assez rentable pour continuer, avoue-t-il. J'ai vu la dégradation s'opérer depuis une dizaine d'années : les clients qui se font de plus en plus rare, une perte progressive du chiffre d'affaires, et petit à petit on en est arrivé là", s'émeut Christophe Feruglio.

Fruits et légumes, produits frais, bio et d'épicerie ont été longtemps les forces de cette petite entreprise familiale. Mais parcourir 250 à 300 kilomètres par semaine pour récupérer les denrées rares auprès de la vingtaine de fournisseurs était devenu trop difficile pour ces adeptes du circuit court. 

"Il y a des clients qu'on voit toutes les semaines depuis 24 années, avec lesquels on a tissé des liens très forts"

Christophe Feruglio

Primeuro, regard privilégié sur l'évolution de Péronne

L'épicerie Primeuro, une échoppe de quelques dizaines de mètres carrés, a vu Péronne, ville d'environ 8 000 habitants, subir, comme beaucoup d'autres communes de cette taille, une perte substantielle d'activité de son centre-ville. Alors, à l'annonce de la sentence aux habitués, des larmes se sont mises à couler. "Il y a des clients qu'on voit toutes les semaines depuis vingt-quatre années, avec lesquels on a tissé des liens très forts, juge Christophe Feruglio. C'était comme un rite de venir ici pour eux".

La coutume n'était pas uniquement pour les clients. De l'autre côté du comptoir, Brigitte Caron et Christophe Feruglio ne réceptionneront plus les premières livraisons à 7 heures, comme ce fut le cas pendant 24 ans. "A notre arrivée chaque matin, il y avait une chance sur deux que le camion de livraison soit déjà là, sinon on l'attendait". Puis, la réception de la marchandise, le contrôle du bon prix de chaque produit, balayer le magasin une dernière fois, refaire l'étal, ajuster les derniers préparatifs et enfin une ouverture à 8 heures. 

La reconnaissance de leurs clients

Les années passèrent et l'ouverture à cette heure n'avait plus autant de sens qu'au début : "Hormis ceux qui viennent chercher leur pain aux aurores et qui en profitent pour se balader dans le centre-ville", ils sont peu à passer dans la ruelle du Vert Muguet. Mais le frère et la sœur ont pu compter pendant longtemps sur le rebond de 17 heures, période où "les gens sortent du travail, refont des achats avant de rentrer chez eux." 

Si les seniors représentent une part majoritaire de leur clientèle, des plus jeunes franchissent parfois les portes de leur échoppe : "Il y a ceux qui travaillent dans d'autres commerces, quelques personnes de moins de 50 ans, des employés de banque et des métiers du relationnel". 

Épineuse page à tourner pour Christophe et Brigitte, respectivement cuisinier de formation et ancienne employée en boucherie : "Je vais me plonger dans les petites annonces en février, là mon esprit est encore occupé par le magasin", avoue Christophe Feruglio. Les cadeaux et messages de remerciements, offerts par leurs plus fidèles clients à l'annonce de la fermeture, les ont profondément touché. "On pourra toujours les recroiser dans les rues de Péronne, mais ça ne sera jamais plus pareil," conclut Christophe, empreint d'émotions. 

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