Un groupe de passionnés d'histoire locale a monté en seulement deux mois un musée sur la ville d'Ault, dans la Somme. La majorité des pièces proviennent de la collection privée d'Alain Minard, un Aultois qui chine depuis 35 ans photos, affiches et objets garants de la mémoire de la ville.
Il est le gardien de la mémoire de la ville d'Ault, et il a décidé de la partager. Alain Minard, guide nature et amoureux inconditionnel du coin, aidé d'un groupes d'autres passionnés, a ouvert au tout début du mois d'août le petit musée d'Ault, en grande partie grâce à sa collection personnelle.
En 35 ans, il a amassé plus de 5 000 photos et cartes postales, mais aussi des objets de souvenirs ou liés à l'histoire de la ville côtière. "Au début, je collectionnais les bandes dessinées, j'en avais plus de 4 000. Un jour, on m'a proposé des cartes postales en échange d'une BD. J'ai dit oui, et quand j'ai regardé les cartes postales et lu ce qu'il y avait écrit derrière, j'ai eu un coup de coeur, se souvient-il. À partir de là, c'était parti. j'ai laissé tomber petit à petit les bandes dessinnées, et j'en ai même revendu pour financer ma nouvelle collection."
Le travail de bénévoles passionnés
Au fil du temps, sa collection grandit, mais sa connaissane de la région aussi. Depuis le début des années 2000, il souhaite partager cette mémoire dans un musée, mais sans appui des municipalités successives, le projet reste longtemps au point mort. Jusqu'à cette année, où la nouvelle équipe municipale accepte de lui prêter un local de 75 mètres carrés pour exposer ses trésors.
En 2 mois de temps et avec un budget très serré de 2 000 euros, les membres de l'association "Ault - Le petit musée" s'activent pour mettre en place l'exposition. "On a fait ça avec de la récupération, des achats à la recyclerie du Vimeu, on s'est évertué à fonctionner à budget réduit, avec le système D !", explique Sylvain Coutant, président de l'association.
Un voyage dans le temps en photos
Des efforts rapidement récompensés : dés la première semaine, les visiteurs ont été au rendez-vous. Touristes ou locaux, ils viennent découvrir le patrimoine très riche de la ville d'Ault. Si le document le plus ancien remonte à la Révolution française, une belle partie de la collection provient de la belle époque. De la fin du XIXème siècle au début du XXème, Ault est une station balnéaire en vogue.
"C'est une station de second ordre, ce n'est pas Dieppe ou le Touquet Paris-Plage, il y avait quand même du beau monde : sur la liste des propriétaires, on voit des noms à particule, on trouve des juges, des gens issus de classes sociales aisées", précise Alain Minard. Sur les cartes postales et les photos, on peut voir les familles à la plage, découvrir les tenues de bain, les casinos. Des vidéos tournées dans les années 1950 et commentées racontent aussi la vie d'Ault de l'époque.
Le musée retrace également l'histoire de l'industrie qui a fait vivre Ault et ses alentours pendant des décennies : la serrurerie. "En 1900, on comptait à peu près 5 000 serruriers dans le Vimeu, don 900 à Ault. Ça a vraiment explosé au XIXème siècle." Ces serrures, on peut les trouver encore aujourd'hui dans les immeubles parisiens de l'époque du baron Haussmann qui a transformé Paris au milieu du XIXème siècle.
"Il y a beaucoup de thèmes à Ault : les serruriers bien sûr, mais aussi les pêcheurs, les bains de mer, les casinos, les personnages célèbres qui sont liés à la ville. Victor Hugo est passé par ici et a laissé des écrits sur Ault, Paul Landowski qui a fait le monument aux morts de la commune, mais qui est plus connu pour avoir fait le Christ qui domine la baie de Rio de Janeiro..., explique Alain Minard. Il y a Firmin Girard, un peintre reconnu de la fin du XIXème siècle, exposé à New York et au Japon qui a été l'un des premiers à se faire constuire une villa à Onival. On a une photo de lui avec sa famlle sur la plage, et signée de sa main."
Une collection qui s'agrandit au fil des dons
Cette riche histoire, les habitants du coin y sont très attachés : certains ont déjà proposé des dons de documents, et d'argent, pour agrandir la collection du musée. Alain Minard rêve déjà d'un espace plus grand pour pouvoir tout exposer. Il suffit de quelques minutes à discuter avec lui pour se laisser embarquer dans sa passion pour la ville. Né dans un village du Vimeu, il porte Ault dans son coeur depuis toujours.
"C'était notre plage de baignade quand on était gamins, on venait en vélo, en dix minutes on y était. Et quand on était ados, on était contents quand arrivait l'été, parce qu'on retrouvait les petites Parisiennes"
Pour ceux dont l'histoire familiale est ancrée dans le Vimeu, c'est un émouvant voyage dans le temps qui s'opère. L'un reconnaît sa grand-mère sur une carte postale. L'autre admire la photo d'un pêcheur et y reconnait son arrière-grand-père. Alors forcément, le bouche à oreille a rapidement fait son travail et permet au musée d'accueillir des curieux. Bientôt, l'association compte organiser des ateliers avec les enfants.