Dans la famille des sports de combat, il y a l'incontournable judo. On compte 48 000 licenciés et 500 clubs dans les Hauts-de-France. Un sport très physique, au code moral inspirant. Nous l'avons testé et on vous dit tout ! #VousEtesFormidables
Le judo, avec ses médailles françaises aux JO, sa popularité, son cérémonial et sa philosophie, je me suis dit benoîtement, chouette on va jouer à Teddy Riner (en plus j'ai le même indice de masse corporelle). "A priori, on va rigoler, on va s'éclater". Et bien ça a été le cas. Enfin, je me suis surtout fait "éclater" physiquement. Pourtant il n'était surtout pas question d'y aller en dilettante, je voulais le faire sérieusement. Alors oui, j'ai sérieusement mordu la poussière, mais j’ai aimé cette initiation. Très physique. J'ai aimé aussi sa philosophie qui respecte l'adversaire et son côté "développement personnel". Et chaque semaine je testerai pour vous un nouveau sport pratiqué dans la région, à retrouver également dans "Vous êtes formidable", l'émission présentée par Virginie Demange du lundi au vendredi à 9h05 sur France 3 Hauts-de-France.
L'échauffement : "j'étais (presque) cramé"
Traumatisé. A tel point que je ne me souviens plus de tout. L'échauffement est indispensable et très dense, il consiste à faire des tours de tatami en courant avec les judokas. En petit footing pour commencer, puis en pas chassés et en arrière et/ou en tournant les bras. En groupe, d'abord, par deux ensuite. On se tient la manche du kimono et au signal on tire le partenaire à soi. Là on commence à monter dans les tours. Nathan, ceinture noire 2e dan, avec qui, je fais cet échauffement, bienveillant, me prévient de ne pas mettre mes doigts dans sa manche. Et oui, il faut les laisser à l'extérieur car en combat s'il fait un mouvement brusque du bras, je peux y laisser un doigt.
Brouette. Pompes en avançant avec les bras alors que le partenaire tient mes pieds à hauteur de ses hanches. Marc-Antoine Le Cap, qui anime le cours, 6e dan (ceinture blanche et rouge de circonstance), me demande si je ne suis pas "carbo" ? J'ose un "ça va" mais à vrai dire, je n'en peux déjà plus.
Travail des chutes
Avec Rémi, l'assistant de Marc-Antoine, je teste les chutes en arrière. But : protéger la tête, en rentrant bien le menton contre le torse et en regardant sa ceinture. Je souffle encore et transpire beaucoup en raison de l'échauffement. Mais cette "pause" - façon de parler - me fait du bien. Vous avez surement déjà entendu ce bruit caractéristique, mais il faut taper en même temps que l'on tombe sur le tatami avec les bras pour amortir la chute.
Immobilisations au sol : gesa gatame (assises) - chiho gatame (à quatre pattes)
L'idée est de mettre ippon son adversaire (gagner le combat) en le bloquant 10 secondes les deux épaules au sol. On avait dit qu'on "variait les plaisirs pour mes combats", c'est-à-dire que Marc-Antoine me sélectionnerait des adversaires de différents niveaux.
A ce petit jeu, Marc-Antoine me présente d'abord Zoé, débutante, puis Mattéo, ceinture noire 2e dan, qui approche la vingtaine d'années, "affûté", "il a gagné la semaine dernière un tournoi à Varsovie" bluffe Marc-Antoine. Et enfin Olivier, 49 ans, 3e dan, un grand assez costaud mais surtout sans aucun kilos en trop, contrairement à moi !
Je parviens, avec mon gabarit et ma force (pas ma souplesse) à dominer les deux premiers dont les poids additionnés ne devaient pas atteindre le mien ; Olivier c'est une toute autre histoire ! "Essaie de choper ma jambe" me glisse-t-il alors qu'il m'immobilise. Pas si simple ! Cela me booste à nouveau, mais, en essayant de me dégager, je rouvre une petite égratignure que j'avais sur le front. Bilan : la manche du kimono d'Olivier est tout ensanglantée... Fallait pas m'énerver ! Non, sincèrement, désolé Olivier.
Techniques de fauchages : o uchi gari - ko uchi gari
Ce sont des croche-pieds. Le premier signifie grand fauchage intérieur, le second, petit fauchage intérieur. Les deux peuvent se combiner si l'on rate le premier. Et là, Marc-Antoine m'invite à combattre contre lui ! Impressionné. Je me méfie. Contracté, crispé même, il me conseille de rester souple, détendu. Oui, mais quand va venir l'attaque ? A priori, je suis davantage sur la défensive... Finalement, je comprends assez vite le bon état d'esprit de Marc-Antoine et je joue avec lui, qui accepte et ne contre pas mes attaques. Je finis même par le projeter au sol en le passant par dessus le dos. Si j'avais été en compétition, lui aurais-je mis un waza ari (demi ippon) ? Voilà que je commence à prendre mes rêves pour la réalité !
Le judo ou "La voie de la souplesse"
Cette discipline voit le jour en 1882 au Japon. Jigoro Kano, un éducateur, maître en arts martiaux japonais, retire toute utilisation d’arme ou toute technique dangereuse pour inventer un art du combat à mains nues. Le judo, littéralement "la voie de la souplesse". Pourquoi ? Pour éduquer les jeunes. Car il y a un code moral du judo, une philosophie de vie qui sera enseignée à l'école publique japonaise à partir de 1910.
Le but final, c’est de développer sa personnalité, via le combat qui n’est qu’un prétexte. En assistant au cours de Marc-Antoine Le Cap à Lambersart, près de Lille, l'un des trois gros clubs des Hauts-de-France avec 500 licenciés, je me suis d'abord demandé pourquoi éduquer via le combat ? Certes, à certains moments, il faut se battre dans la vie, mais mon impression est que le combat provoque des émotions comme l'envie de gagner, voire la colère alors que le but serait plutôt de les dominer, de les canaliser, de ne pas se laisser emporter par elles, et de respecter toujours l’adversaire. Celui qu'on salue avant et après le combat, pour bien montrer que ce qui se passe sur le tatami reste sur le tatami, et qu'on reste ami après !
Une illustration, je suis désormais convaincu de ce que l'on dit du judo : ce sport développe vraiment un état d’esprit non-violent, une "entraide et prospérité mutuelles". C'est d'ailleurs l’une des deux maximes du judo, avec "la bonne utilisation de l'énergie" !
Code moral
Huit définitions permettent même de constituer un code moral du judo, qui doit être respecté sur et en dehors du tatami :
- La politesse, c'est le respect d’autrui.
- Le courage, c'est faire ce qui est juste.
- La sincérité, c'est s'exprimer sans déguiser sa pensée.
- L'honneur, c'est être fidèle à la parole donnée.
- La modestie, c'est parler de soi-même sans orgueil.
- Le respect, car sans respect aucune confiance ne peut naître.
- Le contrôle de soi, c'est savoir se taire lorsque monte sa colère.
- L'amitié, c'est le plus pur et le plus fort des sentiments humains.
Mon avis
A 45 ans, pour mon premier contact avec le judo, j'ai beaucoup aimé l'état d'esprit qui règne dans ce cours. Les conseils de Nathan et d'Olivier, l'accueil de Marc-Antoine, la sympathie et la bienveillance de Rémi qui m'a formé pour cette première séance. En toute objectivité, il y a une rigueur, une discipline naturelle : quand le professeur parle, on l'écoute ! Et cela n'empêche pas du tout (au contraire ?), la solidarité entre judokas. On apprend, on joue, on combat ensemble.
Je le conseille vivement aux jeunes un peu difficiles à canaliser, mais pas seulement. Ce sport est accessible dès l'âge de 4 ans, avec essentiellement au début des jeux de motricité. Il y a tellement d'avantages à découvrir les multiples atouts du judo. Sachez qu'il existe environ 500 clubs dans les Hauts-de-France. Dans le Nord, autour de 200, une centaine dans le Pas-de-Calais, tout comme dans l'Oise et une cinquantaine dans la Somme et l'Aisne.
Avec 48 000 licenciés, la fédération française de judo est l'une des premières en nombre de licenciés après le football, le tennis et (peut-être) le rugby.