Suite de notre série sur les maires et le coronavirus. Aujourd'hui, rencontre avec la maire de Le Quesnoy (Nord).
"Ça fait réfléchir sur la nature humaine... " Marie-Sophie Lesne (DVD) connait par coeur sa commune du Quesnoy. Elle a passé près de la moitié de sa vie à y faire de la politique. Une quinzaine d'années dans l'opposition. Puis maire en 2014. Réélue le mois dernier. Mais après un mois de confinement, elle est éblouie par l'incroyable vitalité du tissu associatif de sa commune et du travail des bénévoles. "Ils n'ont pas peur. Ils ont la volonté de servir. Oui vraiment, ça m'interroge... "
Dès la mi-mars, une chaine de solidarité s'est mise en place au Quesnoy, ville fortifiée de 5000 habitants située aux portes du Parc Naturel Régional de l'Avesnois. "Le fichier des personnes âgées qui avait été établi en 2003 pour le Plan Canicule n'avait pas été actualisé, explique Marie-Sophie Lesne. On a donc commencé par recenser les personnes de plus de 60 ans. Nous les avons informés par courrier qu'elles pouvaient solliciter la mairie en cas de difficulté, une urgence, une course à faire. Et c'est là que les bénévoles se sont mis en mouvement."
Les adjoints, les élus locaux , les bénévoles, ce sont eux aussi qui continuent en ce moment de faire tourner la France. Avec modestie et humilité. Ils sont formidables.
Pour les courses, un habitant isolée ou seul peut joindre au téléphone un élu municipal, présent en mairie. Celui-ci prend la commande et la transmet au "Drive" des deux grandes surfaces situées sur le territoire de la commune. Et ce sont donc des bénévoles - que la mairie a doté de masques et de gants - qui livrent. "On a également signé un partenariat avec l'une des deux enseignes, ajoute la maire du Quesnoy. Elle donne chaque jour ses invendus au CCAS (le Centre Communal d'Action Sociale). Les produits laitiers, les légumes, les fruits sont stockés dans les grands frigos du restaurant scolaire. Et là encore, ce sont les bénévoles qui fabriquent les colis alimentaires, en fonction des arrivages et de la taille des familles à aider. Ils appellent les bénéficiaires à 10 heures 30 pour qu'ils viennent chercher leurs paniers. Depuis quinze jours, une centaine de familles en profite."
Et ce n'est pas fini. Les bénévoles, encore eux, assurent depuis peu un service de livraisons pour les commandes prises chez les commerçants du centre-ville. Un service gratuit destiné cette fois à aider ces commerces à refaire du chiffre d'affaires. Marie-Sophie Lesne est admirative : "Les adjoints, les élus locaux , les bénévoles, ce sont eux aussi qui continuent en ce moment de faire tourner la France. Avec modestie et humilité. Ils sont formidables. Ils nous montrent chaque jour que ce pays a de la ressource."
La maire du Quesnoy admet que ses journées sont bien remplies, d'autant qu'elle est également vice-présidente du Conseil Régional des Hauts-de-France, en charge de l'Agriculture. "C'est un tunnel de réunions audio et vidéo, raconte l'élue. Je viens d'en avoir une avec la filière lait. C'est inquiétant, notamment pour les AOP (les Appellations d'Origine Protégée) comme le maroilles. La surproduction est énorme car le consommateur privilégie les produits de première nécessité." Idem pour la pomme de terre. A cause notamment de la fermeture des cantines, les stocks augmentent. "Ce qui ne sera pas vendu en juin ou juillet, craint la vice-présidente, ce sera poubelle !"
La Région tente de colmater les brèches qui s'ouvrent ici et là : acheter de l'agneau de Pâques pour soulager les éleveurs de la filière ovine, soutenir l'industrie agro-alimentaire qui manque cruellement de masques pour ses employés, écrire à Bruxelles pour demander une limitation de la production laitière européenne. "J'écris beaucoup... , soupire Marie-Sophie Lesne, mais j'ai parfois le sentiment d'être "l'arme au pied", sans réelle possibilité d'agir, de ne pas tout maitriser, d'être dans l'incertitude."
La maire du Quesnoy veut malgré tout rester positive. "Il y aura un avant et un après. Nous les maires, nous étions dans le raccommodage social. Mais en cette période de confinement, nous montrons que nous sommes une autorité respectée, que notre rôle est important. Qu'on est sur le pont. Qu'on est crédible. Et à ceux qui veulent continuer de regrouper, fusionner, agrandir les communes, la crise du Covid montre qu'ils ont tout faux ! Les quinze premiers jours du confinement, notre communauté de communes (Pays de Mormal) avait tout fermé. Plus personne au bout du fil ! C'est éloquent... "
Marie-Sophie Lesne en est certaine : "On reparlera des communes... "