À sept semaines des élections municipales, de plus en plus de candidats se présentent "sans étiquette", en défendant une approche "locale et apolitique". Mais souvent, cette stratégie n'est qu'une manoeuvre politique.
À l'approche de chaque élection municipale, le débat revient sur la table. Vote t-on pour un candidat, ou pour un parti ? Dans beaucoup de communes françaises, principalement des petites, certains candidats préfèrent s'affranchir du soutien d'un parti politique et se présenter en indépendant. Ou du moins, "sans étiquette". Cette nouvelle désignation (SE) est possible dans les communes de moins de 3000 habitants.
Honnêteté ou stratégie ?
Bernard Debaecker, maire d'Hazebrouck élu pour la première fois en 2014 sans étiquette, affirme que les citoyens en "ont marre des partis politiques". Pour lui, "c'est ça qui [lui] a permis de gagner". S'il y retourne en 2020, ce sera également sans étiquette. Si la bonne foi du maîre d'Hazebrouck n'est pas à mettre en cause, certains édiles choisissent de se passer d'étiquette et du soutien d'un parti, par stratégie.
Comme le détaillait le quotidien la Croix en octobre dernier, "Depuis Paris, Anne Hidalgo se garde bien d’évoquer le Parti socialiste (PS), tout comme la maire de Nantes, Johanna Rolland. Le maire de Toulouse Jean-Luc Moudenc rejette pour l’heure toute investiture venue des Républicains (LR) ou de La République en Marche (LREM). Quant au vice-président du Rassemblement national (RN), Louis Aliot, il prétend mener une liste apolitique à Perpignan, sous l’égide du « rassemblement local". L'objectif de cette posture stratégique ? Résister à la vague de dégagisme que subissent actuellement l'ensemble des partis politiques traditionnels.
Pourtant, cette illusion ne peut pas tenir bien longtemps. Lorsque les candidats déposent leur liste en préfecture, -procédure indispensable pour valider sa candidature à tout scrutin électoral- ils sont obligés de revendiquer une couleur politique, une appartenance partisane. Si'ils ne le font pas, le préfet est tenu d'attribuer une "nuance politique" à chaque formation. Cette règle est valable pou les communes de moins de 3000 habitants.
Camouflet pour la majorité
En peine d'ancrage local, le parti présidentiel de la République en Marche (LREM) a justement essayé, par la voix d'une circulaire émanant du ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, de ne pas attribuer de couleur politique aux communes de mois de 9000 habitants. Problème, celles-ci représentent...97% des communes françaises. Du côté de la majorité, l'argument est tout trouvé : il s'agit de redonner des enjeux locaux et de détacher la politique locale, souvent exercée par des citoyens (et non des professionnels de la politique) du "jeu des partis".
Le Conseil d’Etat suspend l’essentiel de la circulaire Castaner : un camouflet pour l’Intérieur https://t.co/xzMQw5YDzL #municipales
— Public Sénat (@publicsenat) January 31, 2020
Pour l'oppostion, cette circulaire n'a qu'un seul but : masquer, à l'échelle nationale, l'absence d'élus LREM dans les petites communes, et donc nuancer les résultats de la majorité lors du prochain scrutin. Cette proposition avait provoqué l'indignation de l'Association des Maires de france (AMF), et a finalement été invalidée par le Conseil d'État.