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"La différence c’est une richesse" : l'école publique face aux défis de la mixité sociale et du manque de moyens

Avec des effectifs réduits dans les classes, l'enseignant peut proposer un suivi plus en adéquation avec les besoins des enfants.

L’école publique est au centre de toutes les attentions, de toutes les pressions. Mais comment éviter une école à deux vitesses ? L'émission Enquêtes de Région présentée par Jérémy Chevreuil se penche sur cette question.

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La pression redouble sur l’école publique qui est au centre de toutes les attentions en matière d'éducation, mais également au cœur de nombreuses critiques. L'émission Enquêtes de Région "École, la pression redouble" présentée par Jérémy Chevreuil s'intéresse au défi de l’apprentissage des savoirs fondamentaux, et se demande comment on enseigne aujourd’hui dans un quartier populaire. L'accès à une éducation égale pour chaque enfant est primordiale. Mais comment éviter une école à deux vitesses alors que beaucoup de parents choisissent d’envoyer leurs enfants dans des structures payantes pour échapper à l’école publique et sa promesse de mixité sociale ?

École et mixité sociale  

La mixité sociale est indispensable à l’école, en théorie. Dans la pratique, les disparités sont grandes d’un établissement à l’autre, et l'écart se creuse entre école publique et école privée sous contrat. C’est au collège que se cristallisent ces enjeux, avec une tendance pour les familles favorisées à scolariser de plus en plus leurs enfants dans une école privée sous contrat. La mixité sociale bénéficie aux élèves de milieux sociaux défavorisés, or elle ne se fait pas au détriment de la réussite des élèves de milieux favorisés, bien au contraire. L'étude de trois chercheurs en économie, Pauline Charousset, Marion Monnet et Youssef Souidi de l’Institut des Politiques Publiques, intitulée " Ségrégation sociale en milieu scolaire : appréhender ses causes et déterminer ses effets" en démontre les bénéfices.

On remarque que ça bénéficie aux élèves favorisés comme défavorisés du point de vue de l’apprentissage des compétences socioémotionnelles, donc tout ce qui est altruisme, générosité, empathie, ainsi que sur les trajectoires professionnelles, on commence à avoir quelques chiffres qui montrent une meilleure insertion professionnelle.

Marion Monnet

Maître de conférence Université de Bourgogne et co-autrice de l’étude

Depuis 2022, l’Education Nationale publie les indices de position sociale de chaque établissement, publiques et privées. Sans surprise, c'est dans les quartiers défavorisés que la mixité sociale est la plus basse. Et Besançon dans le Doubs ne fait pas exception. Catherine Tarby, la principale du collège Clairs Soleils explique que malheureusement le collège souffre d’une mauvaise réputation et souligne : " Mixité sociale ne veut pas dire plus de bagarre, ne veut pas dire plus de difficultés, ne veut pas dire plus de harcèlement. C’est juste plus d’innovation et plus de besoins constants de s’adapter."

Un reportage de C. Schulbaum, D. Colle, J. Gutleben, E. Dubuis

Les classes dédoublées


C’était une promesse de la première campagne électorale d’Emmanuel Macron. Depuis 2017, les classes de grande section, de CP et de CE1 sont progressivement dédoublées dans les quartiers d’éducation prioritaire. Déborah Guillen est professeure des écoles en CP à l’école Daniel Jeanney de Grand-Charmont dans le Doubs, et a 14 élèves au lieu du plafond de 24 enfants établi par l'Éducation Nationale. Elle souligne cette qualité d'apprentissage primordiale pour les écoliers, qui favorise l’acquisition des savoirs fondamentaux et permet de lutter contre les inégalités sociales. Car avec moins d'élèves, on arrive à individualiser et comprendre plus aisément les difficultés de chacun pour s'adapter.

Le fait d’avoir été dans une classe avec un effectif à 12, ça lui a permis de se libérer, d’être un peu plus en confiance, et de pouvoir s’exprimer plus facilement. L’évolution est flagrante, c’est impressionnant.

Fatima Ben Deddoh

Maman d’élève

Cette aide personnalisée est appréciée par les parents. Avec des effectifs réduits, l'enseignant peut proposer des activités pédagogiques complémentaires pour travailler sur les lacunes et les points faibles des enfants. Assia Verger est parent d’élève dans les écoles Pierre Curie et Daniel Jeanney de Grand-Charmont et souligne l'importance de ce dispositif dont son fils a bénéficié : " Il avait des difficultés, et le professeur a su les détecter rapidement. Les enfants ne sont pas tous égaux par rapport à l’apprentissage." À Grand-Charmont le bilan tiré par les enfants et les enseignants est positif, on y établit une égalité des chances de réussir, et de s’intéresser à l’école. Depuis la mise en place des classes dédoublées en 2017, le budget des réseaux d’éducation prioritaire (REP) a augmenté de 50 %. En 2023, 13 millions d’euros sont consacrés à la poursuite du dédoublement des classes. David Loyseau est professeur des écoles et coordinateur REP Grand-Charmont et Sochaux et souligne que " ces moyens là, c'est pas du gâchis, c’est pas de l’argent que les gens jettent par les fenêtres. Il y a ce besoin la parce que les défis sont immenses."

Jusqu'ici et malgré les moyens déployés, la France n’arrive pas à diminuer l’impact des origines sociales sur la réussite scolaire. C’est ce que souligne le rapport PISA de 2018, une enquête internationale réalisée sur les élèves de 15 ans.  

Les écoles privées hors contrat 

À l’Autre École, à Varennes-le-Grand en Saône-et-Loire, une école alternative, la journée n’a pas encore démarré à 9h30. Les élèves évoluent à un rythme différent, majoritairement en autonomie et sont regroupés dans une classe unique qui va de 6 à 18 ans. Le CP, le CE1 ou la classe de 4ᵉ n'existent pas : car il n’y a pas de niveau particulier. Dans cette école, les activités s’inspirent de la pédagogie Freinet et Neill. L’élève est responsable de sa journée, en étant libre de participer ou non aux ateliers et de faire autant de pauses qu’il le souhaite. 

À l’école des saisons à Brognon en Côte-d’Or, ce n’est pas la même méthode qui est appliquée. Ici, on se base sur la pédagogie Steiner Waldorf, qui puise ses racines dans une éducation axée sur les sens. On encourage les enfants à ressentir dans la tête, le cœur et les mains. L'année s'écoule à moitié en classe, à moitié à l’extérieur. Emilie Couturier, fondatrice et directrice de l’école des saisons souligne tout de même l'importance d'une structure :" Le fait d’avoir un programme c’est pas un gros mot, je trouve ça normal, ça permet quand même d’avoir des repères et ça aide à se structurer. Par contre, ce que je souhaitais c’est que ces programmes soient fait de façon différente."

De plus en plus de parents envoient leurs enfants dans des établissements privés. Philippe Canalda, le président de la FCPE du Doubs et de Franche-Comté estime que c’est là le plus gros échec de l'école publique. Alors comment lui redonner une nouvelle vitalité ? Pour lui, c'est en changeant le poids des contraintes. S'adapter à son temps, en faisant en sorte qu’il y ait plus de mixité dans l’école, mais surtout en permettant aux personnels de l’Éducation Nationale d'avoir les effectifs suffisants, en étant mieux formés pour prodiguer l'accompagnement le plus idéal par rapport au projet de société espéré.

Un reportage de F. Acosta, D. Segal, G. Robin, T. Collet, D. Fleury, N. Tupinier, P. Bouillot

École, la pression redouble, une émission à voir le mercredi 6 décembre 2023 sur France 3 Bourgogne-Franche-Comté, et dès à présent disponible sur la page Enquêtes de Région sur France.tv.

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