RC Lens : "Mammadov doit comprendre qu'on est au bord du précipice" déclare Gervais Martel

Dans une interview au journal L'Equipe, le président du RC Lens, Gervais Martel, exhorte une nouvelle fois le propriétaire azerbaïdjanais du club, Hafiz Mammadov, à céder ses parts au nom de l'"intérêt général". 

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"Je retourne à Bakou ces prochains jours", explique Gervais Martel dans son interview au quotidien sportif. "Il faut que je trouve une solution avec l'actionnaire - mais j'y crois de moins en moins - ou ailleurs...". Nous sommes début mars et le président du RC Lens ne semble toujours pas avoir trouvé de solution pour pallier les difficultés financières rencontrées par son actionnaire et associé azerbaïdjanais, Hafiz Mammadov, propriétaire à 99,99% de RCL Holding, la société parisienne qui détient les Sang et Or.

"Si le club est cédé, ce sera pour 1 euro symbolique"

Pour Gervais Martel, l'ouverture du capital de la holding à de nouveaux investisseurs n'est pas envisageable. "La porte ne peut pas s'entrouvrir à partir du moment où un actionnaire a 100%", explique-t-il. Il est donc impératif, à ses yeux, qu'Hafiz Mammadov cède aujourd'hui l'ensemble de ses parts. "S'il n'a pas les solutions, il ne va pas nous emmener tous au cimetière", estime le président lensois. "Il a été le sauveur du club mais on ne peut pas vivre sur le passé. Je ne vois pas son intérêt à s'accrocher. (...) Il a tout perdu de toute façon. Si le club est cédé, ce sera pour 1 euro symbolique. Il doit comprendre qu'on est au bord du précipice et qu'on doit s'en sortir. Avec l'image qu'il a depuis six mois, c'est un moyen pour lui de dire : désolé je n'ai pas pu, maintenant je sors. C'est l'intérêt général."  

Ces propos peuvent paraître un brin cavaliers à l'égard d'un homme qui a investi autour de 20 millions d'euros à Lens et qui a permis à Gervais Martel de reprendre la présidence du Racing. Pour autant, avec la perspective d'une probable relégation en Ligue 2 en fin de saison, les parts de Mammadov (12 millions d'euros du capital de RCL Holding) ne semblent plus valoir grand chose effectivement. Car si un repreneur se présente aujourd'hui, il devra forcément mettre la main au porte monnaie. Non seulement pour équilibrer les comptes d'ici la fin de la saison mais aussi pour financer la suivante. "Même en L2, les besoins seraient de 10 à 15 millions d'euros", prévient déjà Gervais Martel dans son interview à L'Equipe. Au regard des deux précédents exercices comptables du RCL, les besoins pourraient même se situer entre 15 et 20 millions d'euros. En 2012-2013, les Sang et Or avaient enregistré en effet une perte d'exploitation de 16 millions d'euros, épongée par le Crédit Agricole Nord de France. La saison dernière (2013-2014), elle s'est creusée à -20.7 millions. Un déficit compensé à l'époque par l'argent de l'Azerbaïdjanais.

A Bakou, rien ne va plus pour Mammadov

Hafiz Mammadov va-t-il finir par céder ? Rien n'est moins sûr. Depuis qu'il a échoué à rembourser, en décembre 2013, l'échéance d'un emprunt obligataire contracté auprès de la branche luxembourgeoise de la BNP et de la Pasha Bank (un établissement détenu par la belle-famille du président azerbaïdjanais Ilham Aliyev), l'homme d'affaires a perdu de nombreux actifs dans l'immobilier, la banque, l'exploitation d'hydrocarbures et les transports. Donc une bonne partie de sa fortune. Il semble aussi avoir été lâché par ses anciens soutiens politiques, ceux qui lui ont offert par le passé de juteux marchés publics. On pense notamment à Ziya Mammadov (sans lien de parenté avec Hafiz), le puissant ministre des transports, et son fils, Anar, jadis très proche en affaires du propriétaire du RC Lens (c'est lui qui aurait versé en décembre les 2.5 millions d'euros attendus par la DNCG).   
En Azerbaïdjan, Hafiz Mammadov est encore propriétaire du club de football du FC Bakou, mais sa situation sportive et financière est catastrophique. Oubliés les deux titres de champion et les trois coupes nationales décrochés ces dix dernières années sous sa présidence, l'équipe première est désormais avant-dernière du championnat. Plus inquiétant encore, les salaires ne sont plus versés et le club ne paie plus ses impôts, ce qui lui vaut de figurer dans la "liste noire" des mauvais payeurs diffusée la semaine dernière par le fisc azerbaïdjanais. Comme à Lens, Mammadov promet depuis des mois qu'il va tout arranger. Mais rien ne se passe, rien ne bouge. Il ya deux semaines, le Lokomotiv-Bilajary, "club bis" du FC Bakou, qui évoluait en 2e division azerbaïdjanaise, a même dû être dissout, les salaires n'étant plus payés.

Quelles marges de manoeuvre pour Gervais Martel ?

Que faire donc aujourd'hui face à un ex-oligarque déchu qui semble ne plus avoir grand chose à perdre ni même à gagner ? Depuis des mois, Gervais Martel, encouragé par le gouvernement français, s'en remet à l'Etat azerbaïdjanais, multipliant les aller/retour à Bakou. Fin décembre, le président lensois pensait même avoir trouvé le moyen d'éjecter son ex-ami Hafiz du RC Lens : un accord avait, selon lui, été passé avec Anar Mammadov, le fils du ministre des transports. En échange des 2,5 millions d'euros versés en décembre, Hafiz Mammadov s'était soit-disant engagé à lui céder ses parts dans le club s'il ne parvenait pas à rembourser. Mais le propriétaire des Sang et Or avait aussitôt démenti avoir validé un tel arrangement, dans un communiqué adressé à Haqqin.az, un site d'opposition. Hafiz Mammadov a-t-il décidé ne rien céder par "honneur" ou par vengeance ? Espère-t-il encore vendre ses parts à un tarif bien plus élevé que l'euro symbolique ? Cherche-t-il à obtenir des contreparties auprès des autorités azerbaïdjanaises que cette affaire embarrasse forcément ? Difficile d'y voir clair.

Autre question : quand bien même Hafiz Mammadov accepterait de céder ses parts, y aurait-il un repreneur ? "J'ai des contacts", a répondu Gervais Martel à L'Equipe. Il ne s'agirait pas, selon lui, de l'homme d'affaires belge Roland Duchâtelet, déjà propriétaire, avec sa famille, de nombreux clubs en Europe (Standard de Liège et Saint-Trond VV en Belgique, Charlton Athletic en Angleterre, Carl Zeiss Iena en Allemagne, Alcorcon en Espagne et l'Ujpest FC en Hongrie). "Il y a eu un contact (cet hiver), mais c'était pour un joueur, ça ne s'était pas fait", a expliqué le président lensois au quotidien sportif. "De toute façon, ce n'est pas dans ce domaine-là qu'on va s'orienter. Mais c'est vrai, on est sondés par des gens intéressés."

Samedi dernier lors du match contre Rennes, de nombreux supporters lensois se sont interrogés sur la présence de Gérard Houllier​, aux côtés de Gervais Martel, dans la tribune présidentielle du Stade de la Licorne. Le natif de Thérouanne, ancien sélectionneur des Bleus et ex-entraîneur de Liverpool, de Lyon, du PSG et... du RC Lens (de 1982 à 1985), est aujourd'hui employé par Red Bull, la célèbre boisson énergétique. Nommé "directeur sportif mondial" de la branche football en juillet 2012, il est chargé du recrutement et de la liaison entre les cinq clubs que possède la marque à travers le monde : Red Bull Salzbourg (1ère division autrichienne), RB Leipzig (2e division allemande), Red Bull New York (Major League Soccer américaine), Red Bull Brasil (championnat de Sao Paulo au Brésil) et Red Bull Ghana (qui abrite aussi un important centre de formation)Mais selon L'Equipe​, Gérard Houllier serait surtout intéressé par le défenseur lensois Jean-Philippe Gbamin, que le RB Leipzig aurait déjà tenté de débaucher au dernier mercato d'hiver. Il y a deux ans, dans une interview au Parisien, il avait indiqué que Red Bull n'était pas tenté par le rachat d'un club français. "Je ne pense pas, cela ne correspond pas à la philosophie du projet pour l'instant", avait-il indiqué. Il est vrai que si la marque autrichienne est capable de mettre beaucoup d'argent sur la table, elle va aussi jusqu'à débaptiser les clubs qu'elle rachète, pour n'afficher que ses propres couleurs, nom et logo sur les maillots. Lorsqu'elle a repris l'Austria Salzbourg en 2005 pour en faire le Red Bull Salzbourg, toute une frange des supporters avait préféré faire sécession et "ressusciter" le club au niveau amateur, sous son nom et avec son maillot violet d'origine (l'Austria Salzbourg, propriété de ses fans, évolue aujourd'hui en 3e division autrichienne). On doute qu'une telle perspective enchanterait le public lensois, si attaché à ses couleurs sang et or et à son histoire. Tout comme son président.  

Mais le RC Lens a aussi un besoin urgent d'argent. Et Gervais Martel ne veut pas se résoudre à un dépôt de bilan qui permettrait - pour le coup - de se débarrasser définitivement d'Hafiz Mammadov. "Je sais que certains plaident pour un dépôt de bilan afin de repartir de zéro. Ce serait de la folie", s'exclame-t-il dans L'Equipe. "Regardez où en est Strasbourg aujourd'hui (le club alsacien est tombé en CFA2 après la liquidation de sa SASP en 2011 et évolue aujourd'hui en National, la 3e division NDR). On a fait un gros travail sur la formation depuis 20 ans. Si on repartait en DH, tout cela exploserait."

 

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