Montage offshore autour du LOSC : Gérard Lopez ne dément finalement rien

Après nos révélations (avec Médiapart et Médiacités) sur le montage offshore de Gérard Lopez pour reprendre le LOSC, l'homme d'affaires a annoncé lundi la création d'"une société française qui va détenir le LOSC", détenue "par Victory Soccer", elle-même contrôlée via Hong-Kong et les Îles Vierges.

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"Pour éviter les problèmes, on a créé une société française qui va détenir le LOSC. Toutes les parts de cette société seront détenues par Victory Soccer, société basée à Londres qui m'appartient à 100%", a répondu lundi Gérard Lopez, nouveau propriétaire du club nordiste, à l'Agence France Presse qui l'interrogeait après nos révélations (avec Médiapart et Médiacités) sur son schéma de reprise impliquant plusieurs sociétés, dont deux offshore situées à Hong-Kong et aux Îles Vierges Britanniques. Cette déclaration n'est pas un démenti, bien au contraire, et nous allons vous expliquer pourquoi.


Vendredi dernier lors de la conférence de presse qu'il a donnée avec Michel Seydoux, son prédécesseur, Gérard Lopez nous avait répondu qu'il n'achetait pas seulement la SA Lille LOSC, mais aussi d'autres sociétés liées aux activités du club. "C'est en fait différentes sociétés, on ne va pas rentrer dans les détails car ça intéresse peut-être moins de monde", nous avait-il signifié. "C'est le LOSC qui est vendu avec ses filiales pour être très clair", avait indiqué ensuite Michel Seydoux. Jusqu'à présent, le LOSC, ses filiales (comme la SCI du Domaine de Luchin, propriétaire de installations d'entraînement et des terrains) et quelques outils de gestion (GIE Grand Stade, LOSC Lille association...) étaient regroupés sous l'égide du groupe SOCLE, du nom de la holding parisienne dont Michel Seydoux et le groupe Partouche sont les principaux actionnaires. "SOCLE reste la propriété de ses actionnaires et après ils se débrouilleront", a ajouté l'ex-président des Dogues. Le LOSC et ses différentes ramifications ayant été "sortis" de leur ancienne maison-mère pour être vendus à Gérard Lopez, une nouvelle structure va donc se mettre en place pour les chapeauter.

Victory Soccer reste la maison-mère 

Or cette structure, "française" comme l'indique Gérard Lopez dans sa réponse à l'AFP, sera détenue par Victory Soccer, "société basée à Londres qui m'appartient à 100%" qui selon, selon le registre de commerce britannique, disposait jusqu'à présent d'un capital social de 1000 £ (environ 1155 euros). "Victory Soccer sera la société mère", nous avait déjà répondu vendredi l'homme d'affaires hispano-luxembourgeoise au cours de sa conférence de presse à Luchin. 

Cette société londonienne appartient bien à 100% à Chimera Consulting , une offshore domiciliée à Hong-Kong en Asie, qui est elle-même détenue à 100% par Incredible Wealth, une autre offshore située dans les Caraïbes, aux Îles Vierges Britanniques.


Ces informations figurent dans les documents officiels consultables aux registres du commerce du Royaume-Uni (en accès libre) et de Hong-Kong (en accès payant). Voici par exemple les derniers statuts de Victory Soccer où est mentionné en page 2 le nom de Chimera Consulting comme actionnaire.

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Dans cet autre document concernant cette fois Chimera Consulting, on peut voir à la page 8 que la totalité de ses actions a été reprise par Incredible Wealth, la société des Îles Vierges Britanniques, le 17 février 2016. 

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Dans les documents du registre du commerce britannique, Gérard Lopez apparaît comme l'un des directeurs de Victory Soccer,  sous son véritable nom à l'état-civil, Gerardo Lopez Fojaca. Un autre directeur, Claude Zimmer, de nationalité luxembourgeoise est également directeur de Chimera Consulting. "La société de M. Zimmer est un prestataire de services reconnu dans la création de sociétés d’investissements", nous a fait savoir dimanche le repreneur du LOSC dans une réponse écrite, transmise par courriel par son avocat français, Me Nicolas Huc-Morel.

Concernant Incredible Wealth, la société des Îles Vierges Britanniques qui détient 100% de Chimera à Hong-Kong, Gérard Lopez avait indiqué en être le propriétaire, là encore dans des réponses écrites transmises dimanche par son avocat :
  • Aux questions "Confirmez-vous être le seul propriétaire de Chimera Consulting Limited et d’Incredible Wealth. Pourquoi un tel montage alors que vous êtes censé être la seule personne impliquée ?", la réponse a été "Gérard Lopez est le seul bénéficiaire économique de ces structures".
  • A la question "Est-ce bien votre argent personnel qui est dans Incredible Wealth aux Îles Vierges Britanniques, actionnaire unique de Chimera Consulting ?", la réponse a été : "Il n’y a pas à ce stade d’autre investisseur que M. Gérard Lopez, même s’il existe une possibilité de faire rentrer à terme un investisseur stratégique à moyen terme. Il n’y aura pas non plus de nouvelle dette au sein du LOSC puisque ceci est limité par la DNCG. Bien au contraire, la dette du LOSC va être réduite de manière conséquente"
  •  A la question "La société Victory Soccer n’est reliée à aucune de vos holdings personnelles à Hong-Kong (W Group Commodities et W Finance Group). N’était-il pas plus simple, voire naturel, que Chimera Consulting (actionnaire unique de Victory Soccer) soit contrôlée par l’une de ces deux sociétés déjà implantées à Hong-Kong dont vous êtes l’unique actionnaire, plutôt que par Incredible Wealth, une société basée au Iles Vierges Britanniques ?", la réponse a été : "Ces structurations sont tout à fait légales, et n’ont qu’un seul bénéficiaire économique en la personne de Gérard Lopez. Elles ont été approuvées par toutes les instances compétentes dont la DNCG."
Sur ce dernier point, un porte-parole de la Fédération Française de Football nous a répondu ce mardi que "la DNCG  (Direction Nationale de Contrôle de Gestion) contrôle les finances des clubs, pas l’origine des fonds. Ce dernier point relève de Tracfin [le service de renseignement de Bercy qui lutte contre le blanchiment, ndlr]. La DNCG demande des informations sur l’actionnaire de référence , la surface et les garanties financières". Et les nouveaux dirigeants du LOSC ont rendez-vous ce mercredi à Paris, avec le "gendarme financier" du football français. "Pour racheter un club, c'est très compliqué donc si les structures compétentes n'y voient pas d'inconvénients, il n'y a pas de raison de faire autrement. Il n'y a pas de jeu de cache-cache, on ne parle pas de transaction opaque. Je ne suis pas imposé en France donc je n'ai rien à y gagner", a répété ce mardi Gérard Lopez à l'AFP.

Chaîne de propriété

Concernant la société aux Îles Vierges Britanniques dont Gérard Lopez assure être le propriétaire, nous n'avons pu faire aucune vérification. Les pratiques financières dans ce paradis fiscal restent très opaques : on peut ainsi y créer une société sans aucune exigence sur le capital à verser, avec seulement un directeur (peu importe sa nationalité) et un actionnaire dont le nom sera tenu secret. Il n'y a surtout aucun registre public des bénéficiaires des sociétés, ni d'obligation de déposer les comptes. 


Ce montage, cette chaîne de propriétés entre trois sociétés - dont deux offshore  liées entre elles - ont de l'importance pour le financement du LOSC dans les années à venir. Depuis plusieurs années, le club nordiste enregistre chaque année un déficit d'exploitation : son chiffre d'affaires ne permet pas de couvrir ses dépenses. Pour combler les déficits, il faut soit vendre des joueurs, soit emprunter (ce que Gérard Lopez a exclu vendredi en conférence de presse), soit que l'actionnaire mette la main à la poche.


Dans le nouveau schéma proposé par Gérard Lopez, ce sera en premier lieu Victory Soccer qui devra financer le club. Mais cette société - dont le capital social s'élève à 1000 £ (environ 1155 euros) - était décrite, jusqu'au 31 décembre 2015, comme "dormante", sans "aucune activité commerciale", dans les documents consultables au registre du commerce et des sociétés britanniques. Elle était même sur le point d'être radiée en juin dernier. Les revenus de ses activités ne permettront pas, à l'évidence, de financer le LOSC, au moins dans un premier temps. L'argent devra donc venir de l'actionnaire de Victory Soccer, la société hong-kongaise Chimera Consulting. Et si ce n'est pas elle qui le fait, ce sera alors à son actionnaire, Incredible Wealth, la offshore des Îles Vierges Britanniques, d'injecter de l'argent... dans une opacité totale.

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