Thierry Lepaon succédera à Bernard Thibault à un moment délicat pour la CGT qui, sur fond de crise sociale,entretient des relations tendues avec le gouvernement de gauche et avec la CFDT.
Un millier de délégués se réuniront jusqu'à vendredi 22 mars au Parc des expositions de Toulouse pour donner les rênes de la centrale au bas-normand Thierry Lepaon et décider de la stratégie du premier syndicat français pour les trois prochaines années.
Le choix du nouveau leader s'est fait dans la douleur : Bernard Thibault a essuyé en mai dernier la fronde de son "Parlement" - patrons des fédérations et unions départementales - qui ont rejeté sa candidate.
Le conflit s'est finalement dénoué en novembre avec l'adoubement de l'ancien salarié de Moulinex, 53 ans, par la "Parlement". Une désignation qui sera confirmée lors du Congrès.
"La crise interne est désormais réglée, grâce aux efforts de Thierry Lepaon pour panser les plaies. Il a ainsi insisté pour avoir dans son bureau confédéral Eric Aubin", candidat récusé par Bernard Thibault.
Ce dernier met cette semaine un terme à 14 ans passés à la tête de la CGT. Et déjà, le changement s'amorce à la CGT.
Le nouveau secrétaire général a, par exemple, décidé d'élargir sa direction à dix membres au lieu de huit. Une Commission exécutive (direction élargie) sera proposée jeudi au vote du Congrès, partiellement renouvelée et qui comptera les anciens rivaux.
Désormais, le défi pour la CGT est de fixer sa ligne face au gouvernement socialiste alors qu'elle a appelé à voter pour François Hollande. "On va fermement combattre une rigueur suicidaire et l'accord destructeur sur l'emploi", a prévenu Thierry Lepaon.
Le syndicat est déjà passé à l'acte en organisant le 5 mars des manifestations avec FO pour combattre l'accord emploi, signé par la CFDT avec qui le torchon et les drapeaux brûlent.
Pour autant, la nouvelle direction du syndicat n'entend pas engager un bras de fer avec le gouvernement Ayrault auquel Thierry Lepaon reconnaît des "mesures positives" comme les contrats de génération.
Le Congrès devra aussi débattre de problèmes internes récurrents : réforme inaboutie des structures et quasi-stagnation des troupes, malgré une récente embellie à 690 000 adhérents, comme l'explique le reportage de Emilie Flahaut ci-dessous :
Avec un militant sur deux âgé de plus de 50 ans, la CGT peine à assurer la relève, faute d'avoir su adapter son organisation au nouveau visage du salariat : éclaté et plus précaire. Réadapter le syndicat, le moderniser, tel sera le défi à relever pour Thierry Lepaon.
Mais celui qui va succéder à Bernard Thibault a un handicap. Candidat par défaut, il n'est pas très connu des "camarades". En Basse-Normandie, en revanche, son nom est associé au combat des Moulinex et son ascension à la tête de la CGT a suscité des critiques grinçantes de la part de ses anciens compagnons de lutte. Critiques auxquelles il a répondu il y a quelques jours au micro d'Emilie Flahaut et de Charles Bézard lors de ce qui était sans doute l'un des derniers passages par son bureau de l'union départementale CGT du Calvados à Caen :