Selon l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva), la vice-procureure de Paris a requis le non lieu à l'égard des personnes mises en examen dans le dossier amiante de Valéo-Ferrodo à Condé-en-Normandie. C'est désormais au juge d'instruction de décider ou non des poursuites.
Reportage de Sabine Daniel et Charles BézardLes victimes de l'amiante vont devoir, au mieux, prendre leur mal en patience. La perspective d'un procès s'éloigne un peu plus avec les réquisitions du Parquet reçues par l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva), dans le dossier Valéo-Ferrodo à Condé-en-Normandie. La vice procureure de Paris, Aude Le Guilcher, "demande au juge d'instruction de rendre une ordonnance de non-lieu", explique Maître Michel Ledoux, l'avocat de l'association. Autrement dit l'abandon des poursuites à l'égard des personnes mises en examen dans ce dossier.
Si cette nouvelle est un coup dur de plus pour les victimes, elle n'en constitue pas pour autant une surprise. "On sait depuis quelques temps que les juges d'instruction et le Parquet considèrent que, dans la mesure où, disent-ils, on ne peut pas dater la contamination des salariés par l'amiante, on ne pourrait pas, de ce fait, mettre en cause la responsabilité de telle ou telle personne", rappelle Maître Michel Ledoux.
"C'est un raisonnement loufoque", conteste l'avocat de l'Andeva, "En matière d'amiante comme de produits chimiques, on ne peut pas parler de date de contamination mais de période d'exposition. Si comme si on demandait à quelqu'un, qui a le cancer du poumon, à quelle date il a fumé la cigarette qui lui a donné son cancer. C'est évidemment impossible (...) Dans le dossier de Condé-en-Normandie, on est en mesure de démontrer une période d'exposition puisqu'on a les certificats de travail, on sait qu'à ces périodes là l'exposition à l'amiante était massive, on sait qui dirigeait l'usine dans ces périodes là, donc cet argument n'a ni queue ni tête."
"l'affaire n'est pas finie"
Pour l'Andeva et son avocat, ces réquisitions ne signifient pas la fin de leur combat. "Ce n'est qu'un avis, les juges ne sont pas obligés de rendre une ordonnance de non-lieu et si l'ordonnance est rendue, l'affaire n'est pas finie puisqu'on pourra saisir la chambre de l'instruction voir la cour de cassation." Pour l'instant, l'association et son conseil vont adresser au juge d'instruction en charge du dossier d'ici 15 jours leur réponse, un contre-argumentaire, aux réquisitions du Parquet."Il ne s'agit pas de couper des têtes", affirme Maître Michel Ledoux, "il est très important qu'il y ait un procès public, qu'on essaye de comprendre comment dans un pays comme le notre on a pu en arriver là, comment on a pu utiliser ce matériau sans discernement, sans protection alors même que les dangers de l'amiante sont connus depuis l'Antiquité."