Bayeux : trois générations de photographes face à la guerre

Laurence Geai, Alvaro Canovas, Patrick Chauvel, trois paroles de photographes partagées au Prix Bayeux des correspondants de guerre. La représentation visuelle des conflits a-t-elle changé aujourd'hui, quand nous sommes tous journalistes avec un appareil photo dans notre téléphone ? Oui, mais non.

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Ils sont là devant nous et leurs images défilent ,ce mercredi soir, à la Halle aux grains de Bayeux. C'est un peu comme une soirée diapositives entre amis. Les jeunes ouvrent le bal, Laurence Geai, 3 ans de conflit seulement au compteur, Alvaro Canovas, "génération 11 septembre", photographe pour Paris Match. Ils parlent beaucoup, pour calmer leur stress de s'exprimer devant la foule, les phrases se terminent souvent par "voilà". Comme pour faire taire l'angoisse de raconter la guerre ? Non, "on ne la voit pas finalement la guerre" explique Laurence, "la guerre est peu là en fait. Elle est souvent là-bas au loin"  raconte l'autre. 

Laurence Geai à Alep en juillet 2014 a connu l'épreuve du feu. Elle en parle sans émotion aucune, "les hommes de Bachar tapent, les secours arrivent, et là ils tapent à nouveau pour faire le maximum de victimes, une seule chose à faire, attendre dans les coins des immeubles, là où on a le plus de chance de s'en sortir".
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Arrive ensuite, Patrick Chauvel, 50 ans de métier du Vietnam jusqu'à Benghazi, et là grand silence. "C'est le Laos... là une embuscade....on a perdu.. l'Angola... Somalie.. Voila un des blacks Hawks.. (re-grand-silence).. le samedi soir à Kandahar.. (encore du silence),  c'était salsa night". Le vieux baroudeur ne commente pas ses photos, si elles sont réussies, elles résument à elles seules le conflit, pas besoin de sous-titres.

Impressionant reportage d'Alvaro Canovas et Emilie Blachere dans L'Instant - Paris Match et demain dans le Paris Match papier.

Posted by A l'Oeil, Journalisme & Photographie on mercredi 11 février 2015


On arrête l'exercice de la projection, le sage se libère. "Les guerres ne changent pas. C'est le métal contre la chair. Faire une bonne photo, c'est respecter la personne à une bonne distance. Les jeunes là, oui ils ont la bonne distance. Notre métier, c'est d'interpeller".
 

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Ces dernières années, la photographie numérisée est devenue un jeu d'enfant. "On est face à des citoyens qui font le même travail que nous, moi aujourd'hui je me fais photographier par les combattants. La quantité d'images fausse aujourd'hui le rapport avec les gens" explique Chauvel. "En Libye, dès qu'on sortait l'appareil, les gens posaient en faisant des V de la victoire. Les gens aujourd'hui voient leurs images, ils sont leur propre metteur en scène".
"Ce métier on le fait, parce qu'on a envie de raconter l'histoire de ceux qui souffrent"
conclut avec une noblesse assumée celui qui s'inscrit dans une longue lignée toujours en construction.

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Rien de neuf sous le soleil, quelque soit sa génération le photographe cherche une histoire. "Je ne suis pas à la recherche d'une plaque, mon kif c'est de dire là oui ça fera une publication" explique Alvaro Canovas. Laurence Geai vit la guerre proche des histoires de ceux qu'elle croise sur le théâtre des malheurs du monde. Faire une photo n'a jamais été aussi facile, les photographes sont partout, "plus rarement en première ligne" ironise Chauvel, tous chassent La photo. Celle qui résume la situation.
La guerre, c'est l'histoire pas besoin d'explication de texte.

Same shit, different day" 

est écrit sur les sacs de Patrick de Patrick Chauvel, "toujours les mêmes emmerdes pour un jour différent".

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