Elle est la petite fille du tableau de Norman Rockwell : l'émouvant témoignage de Ruby Bridges contre le racisme

"Amazing !" : devant la toile elle ne dissimule rien de son émoi. Cette oeuvre est devenue un emblème de la lutte pour les droits civiques aux Etats-Unis. "Elle me dépasse !". Ruby Bridges a fait le voyage depuis la Nouvelle-Oleans pour inaugurer l'exposition Rockwell au Mémorial de Caen.

"Quel âge aviez-vous ?" lui demande le maire de Caen devant une grande photo en noir et blanc figurant la scène qui a servi de modèle à Norman Rockwell : une écolière en robe blanche est encadrée par des policiers. "J'avais six ans". Ruby Bridges était une fillette innocente comme peuvent l'être les enfants de son âge. "Est-ce que vous compreniez tout cela ?" poursuit Joël Bruneau. "Pas du tout. Mes parents ne m'avaient rien expliqué".
 

En 1960, elle est la première élève noire à être admise dans une école de la Nouvelle-Orleans jusqu'ici réservée aux seuls Blancs. Ses parents se sont portés volontaires pour qu'elle participe à un programme d'intégration initié par le gouvernement. Mais le jour de la rentrée, des manifestants hurlent leur colère près de l'établissement. "Je ne savais rien du racisme" explique aujourd'hui Ruby Bridges pour qui c'est une "maladie d'adulte dont il faut préserver les enfants". Les policiers locaux ont refusé d'assurer sa protection. Washinhgton dépêche des agents fédéraux afin de protéger la jeune fille sur le chemin des écoliers. "Regarde devant toi" lui conseillent-ils afin qu'elle s'épargne le navrant spectacle offert par une foule haineuse et vociférante.
   

Des parents d'élèves de la William Frantz Elementary School s'opposent à ce qu'elle fréquente la même classe que leurs enfants. Une institutrice accepte de lui faire cours : Ruby sera sa seule élève pendant un an.
 

C'était étrange. Je n'avais personne avec qui jouer, avec qui parler. Personne avec qui partager un repas. J'avais l'impression d'être punie.

Je n'ai jamais pu déjeuner à la cafeteria. Ils menaçaient de m'empoisonner, de me pendre. Et les policiers prenaient ces menaces très au sérieux.


L'année suivante, plusieurs autres enfants noirs intègrent l'école. La passion retombe quelque peu. Le racisme n'a pas reculé, mais sans le savoir, Ruby a mis à mal la ségrégation. "J'ai fait partie de cette histoire. Je n'ai rien oublié du sacrifice de mes parents et de bien d'autres personnes qui ont lutté pour que nous obtenions des droits égaux. Ce fut un long combat".


En 2005, l'ouragan Katrina a gravement endommagé les locaux de l'école. Ruby Bridges est retournée dans cet immeuble vide. La chaîne de télévision CBS l'accompagnait :
 



Un chef d'oeuvre de Rockwell au service de la lutte contre le racisme



En 1964, Norman Rockwell s'inspire de cette histoire pour peindre une toile qui deviendra un emblème de la lutte pour la droits civiques. C'est une autre fillette qui sert de modèle au peintre. Mais qu'importe : "c'est une oeuvre d'une grande puissance. Elle semble vivante. Elle me dépasse". La dernière fois que Ruby Bridges avait vu le tableau original, c'était en 2011, à la Maison-Blanche, avec le président Obama. Mais depuis, le climat s'est assombri.
 

 



"C'est important qu'on puisse le voir, ici, comme ailleurs. Parce que j'ai l'impression que nous faisons actuellement marche arrière et que nous sommes de plus en plus divisés à travers le monde. Il est temps de faire la paix. C'est important de savoir ce qui pourrait arriver, ce qui s'est passé. On doit faire quelque chose maintenant pour que personne n'ait à revivre cela". La toile est exposée au Mémorial avec d'autres oeuvres de Norman Rockwell du 7 juin au 27 octobre. Le peintre l'avait sobrement intitulée : "ce problème qui nous concerne tous".

 

Ouverture anticipée de l'exposition Rockwell le 7 juin 2019
Le public aurait normalement du découvrir les oeuvres de Norman Rockwell à partir du 10 juin. "Toutes les conditions nécessaires à la préservation des oeuvres sont réunies" indique le Mémorial de Caen qui a doinc décidé d'ouvrir l'exposition "Rockwell, Roosevelt et les quatre Libertés" dès le vendredi 7 juin à partir de 9 h. 

Il est possible de réserver sur le site internet du musée.
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