Comme les boulangers, les buralistes, ou les pharmaciens, les téléconseillers sont en première ligne face au Covid-19. Malgré la fermeture de la plupart des centres d'appels sur le territoire, des salariés d'une entreprise normande sont toujours à leur poste. Beaucoup se disent "sous pression".
Alors que la plupart des call centers de l'Hexagone ont stoppé leur activité pour se mettre en télétravail, voir à l'arrêt complet, le centre d'appel normand, lui, tourne toujours.
Des salariés "sous pression"
En tout, plus de la moitié des 700 salariés d'Armatis ne se rendent plus à leur travail, par crainte de contracter le coronavirus.Selon Clara, jeune téléconseillère chez Armatis, 4 salariés ont déjà été testés positifs. 2 autres, ont été présentés comme des "cas suspects".
Conséquence, tous ont été placés en confinement, ainsi que leurs collègues de bureau qui étaient séparés par une simple vitre. Une décision, loin de satisfaire pleinement les salariés. La jugeant trop légère.
Selon eux, il n'y a pas que les "collègues de bureau" qui étaient en contact direct avec les personnes infectées mais potentiellement beaucoup plus.
Malgré des risques sanitaires élevés, de nombreux salariés sont toujours sur le qui-vive. La boule au ventre. Avec la peur de tomber malade.
Je prends beaucoup sur moi. Je suis assez stressée. On se méfie de tout le monde. On ne touche pas les portes. J'ai peur d'attraper le coronavirus au bureau et de le transmettre à mon conjoint. Si je m'arrête, je perds de l'argent et financièrement, je ne peux pas me le permettre. La direction refuse de nous mettre en chômage technique. Du coup, pas le choix. Je dois travailler, au risque de tomber malade... Clara, téléconseillère chez Armatis
Alors, pourquoi Armatis refuse t-elle de verser le chômage partiel à ses employés ?
Selon Clara, Armatis et le groupe Engie s'appuient sur le fait que le centre d'appel caennais est "essentiel à la nation", car "lié au secteur de l'énergie". Un argument pas très convainquant pour la jeune femme, contrainte depuis une semaine de mettre sa vie en péril.Malgré plusieurs tentatives, la direction d'Armatis a refusé de nous répondre.
Au sud de Caen, à quelques kilomètres de la société Armatis, un autre call center : "Webhelp", est lui aussi, prestataire d'un fournisseur d'énergie, "EDF".
Pourtant, Webhelp a renvoyé tous ses salariés chez eux mardi 17 mars, après les restrictions annoncées par le gouvernement. Cette fois-ci, pas d'histoire d'"intérêt pour la nation lié aux énergies". Les salariés, se sont dit "soulagés" de rentrer à la maison.
La sécurité sanitaire en entreprise
En réponse, le ministre de l'économie de Bruno Le Maire s'est exprimé jeudi matin sur France Inter : "C’est normal qu’il y ait un temps de calage mais ce temps doit être le plus bref possible. Il faut garantir la sécurité sanitaire totale des salariés, c’est la priorité absolue. C’est pourquoi je préfère que chacun, dans son entreprise, dans son usine, dans son magasin, prenne le temps nécessaire pour dialoguer avec les salariés et voir comment on organise le travail au sein de l’entreprise. Qu’on redéfinisse les règles de circulation, les temps d’arrivée, le comportement des salariés, les protections qu’on met à leur disposition, tout ça doit être défini. Il faut ouvrir ce dialogue social entre les chefs d’entreprises et les salariés".Les entreprises font pression sur les salariés pour être à leur poste malgré les risques sanitaires liés au Covid-19.
Laurent Berger, président de la CFDT
Modalités du droit de retrait
Pour les postiers par exemple, le ministre de l'économie affirme qu'il n'y a "pas de raison d'exercer le droit de retrait dès lors que la poste garantit les bonnes pratiques sanitaires. Ils apportent aussi des plateaux repas à des personnes âgées isolées, dans des villages reculés, on a besoin d'eux. Des milliers de personnes vont aller chercher leur prestation sociale le 1er avril et je leur dis 'nous avons besoin de vous, vous êtes absolument vitaux'".Le droit de retrait de la loi est clair : il faut qu'il y ait un danger grave et imminent. Tant que les garanties de sécurité sanitaire sont appliquées dans l'entreprise il n'y a pas de raison [de l'appliquer].