Depuis l'annonce de la dissolution de l'Assemblée nationale, médecins et psychothérapeutes constatent une augmentation des troubles de l'anxiété et des signes de dépression chez leurs patients. Mais est-ce vraiment lié aux élections législatives ?
Depuis quelques semaines, Xavier Humbert, médecin généraliste, constate qu'il est davantage sollicité pour des demandes d'arrêt maladie et de prescriptions médicamenteuses liées à des troubles de la santé mentale.
On a une résurgence des signes de dépression, d'anxiété et d'insomnie qui est souvent un des premiers symptômes de santé mentale.
Xavier Humbert, médecin généraliste et enseignant-chercheur Caen
Selon lui, 10 à 15% des patients suivis aujourd'hui par des médecins généralistes seraient affectés de troubles mentaux, et le nombre de suicides serait en augmentation en France. La santé mentale des plus fragiles serait aggravée par les crises successives traversées par les Français : la crise du COVID, la guerre en Ukraine, le conflit israélo-palestinien et le contexte "un peu anxiogène" des élections.
"Je vois beaucoup d'agitation mentale"
Marie Bing, psychothérapeute, elle, entend le stress de ses patients. Le sujet des élections revient souvent. Peur de faire le mauvais choix, peur d'être jugé par son entourage, peur de l'avenir. Elle écoute le récit de leurs cauchemars, nombreux en ce moment. Cette prise de décision sur un avenir flou et incertain semble les troubler à des niveaux plus profonds et inconscients.
Il y a beaucoup de conflits larvés en famille, dans le couple ou avec les proches qui éclatent au grand jour. Beaucoup de discussions extrêmement passionnelles, voire véhémentes, avec des noms d'oiseaux et des choses qui sont dites, que l'on regrette, donc ça participe à un inconfort très profond dans la relation aux autres.
Marie Byng, psychothérapeute
Retrouver de la sérénité
Sophie Hébert-Delaunay, elle, coache des dirigeantes d'entreprise. Ses clientes se plaignent de plus en plus d’insomnie, de troubles digestifs, d'irritabilité. Certaines sortent à peine de la difficulté économique post-covid. L’instabilité politique rajoute une couche supplémentaire.
"Elles ont besoin de clarté, comme tout le monde". Selon Sophie Hébert-Delaunay, le propre d’un chef d’entreprise, c’est la capacité d’avoir une vision et de pouvoir se projeter sur son activité. Lors des rendez-vous, elle tente de les rassurer.
J'incite ces dirigeantes d'entreprise à prendre du recul, à garder confiance, à trouver un discours positif, pour ne pas accentuer l’anxiété au sein de l’entreprise.
Sophie Hébert-Delaunay, praticienne de santé naturopathe
Mais ces conseils ne sont pas si faciles à appliquer.
"J’ai une cliente qui m’a concrètement dit que si le SMIC passe à 1600 euros, elle va devoir fermer sa boîte". L'anxiété est d'autant plus forte quand le conjoint est, lui aussi, chef d'entreprise, et dans la même insécurité.
L'incertitude du scrutin sera levée dimanche. Pas sûr que cela suffise à apaiser tous les électeurs.