Une ancienne salariée de l'Association Calvadosienne pour la Sauvegarde de l'Enfant à l'Adulte poursuit son ex-employeur devant les prud'hommes. Elle affirme avoir été licenciée après avoir dénoncé des faits de prosélytisme dans des foyers pour mineurs.
Fin novembre, les inspecteurs de la Direction de la protection judiciaire de la jeunesse ont procédé à plusieurs auditions au sein de l'Association Calvadosienne pour la Sauvegarde de l'Enfant à l'Adulte. Quelques semaines plus tôt, ils avaient appris qu'un jeune homme, fiché S après un voyage en Syrie avec son frère, avait travaillé un temps comme surveillant de nuit dans certains foyers pour mineurs gérés par l'association. Forte de cette révélation, une ancienne employé de l'ACSEA espère enfin avoir gain de cause aux Prud'hommes face à son ex-employeur.
Sabrina* a travaillé comme éducatrice spécialisée dans un foyer de l'ACSEA pendant 6 ans. En avril 2011, elle est témoin d'une scène perturbante: des jeunes visionnent une vidéo de propagande djihadiste avec un encadrant. "A un moment donné, le collègue passe devant la télé et il dit: voilà, moi ce que je compte faire c'est ça", raconte-t-elle, "Je lui dit alors: tu n'as pas à interpeller les jeunes d'ici en leur disant que tu veux être un djihadiste parce que ces jeunes là sont tellement fragiles qu'ils sont capables d'y aller".
Comptant sur le soutien de quelques collègues, l'éducatrice donne l'alerte et informe sa direction. Son chef de service lui répond alors qu'elle a "des hallucinations". Pour Sabrina, la situation se dégrade alors au sein de l'ACSEA: elle demande une enquête d'urgence et une expertise mais ne les obtiendra pas. Elle finira par recevoir un avertissement. "Je n'ai pas demandé à me battre sur mon lieu de travail avec des endoctrineurs".
Finalement licenciée, elle attendra 4 ans pour poursuivre son ex-employeur devant les prud'hommes pour harcèlement moral. Elle perd son procès en octobre 2015. Selon la direction de l'ACSEA, qui dément la version de son ex-salariée, les faits de prosélytisme dénoncés par la jeune femme ne sont pas avérés. "Ce n'est pas notre boulot d'aller faire de l'enquête ou de l'investigation par contre il faut qu'on donne les moyens aux gens compétents pour le faire et nous permettre de pouvoir travailler sereinement", déclare Jean-Luc Godet, directeur des foyers éducatifs de l'ACSEA.
Les deux parties se retrouveront ce jeudi devant les Prud'hommes en appel. Se considèrant comme lanceuse d'alerte, Sabrina veut juste être réhabilitée.
*Le prénom a été modifié