Cidre, alambic, Calvados, distillation, bouillotte et bouilleurs de cru : le point pour les nuls

Qui dit automne en Normandie dit pommes, presse, jus et autres traditions ancestrales cidricoles. En la matière, il est toujours bon de réviser ses fondamentaux pour étayer les discussions régionales de saison... Voici donc un rappel de quelques notions de base 


En Normandie, l'automne fleure bon l'herbe mouillée, les feuilles tombées et l'humus qui se prépare pour la pousse des champignons... Et pour certains, dans les cours et vergers c'est l'odeur des pommes et du jus de pomme qui se met à chatouiller les narines... 
Mais, au fait, savez-vous vraiment ce que l'on fait avec les pommes en Normandie ? Du jus de pomme et du cidre bien évidemment mais aussi de l'eau de vie, du pommeau, de la goutte, du Calvados. Par quel procédé : distillation, extraction, fermentation ?

Voici notre lexique pour tout savoir sur la fabrication du cidre et du Calvados...
 
 

De la pomme au cuvage

Il faut d'abord ramasser les pommes et les assembler savamment car de cet assemblage dépendra la dominante de votre cidre (doux, doux amer, amer, acide).
Vient ensuite le tri et le lavage : il faut enlever les pommes abîmées ou pourries qui pourraient amener de la moisissure et des bactéries dans le cidre. Le lavage (à l'eau claire) permet de nettoyer les pommes et d'enlever les derniers restes de feuilles, herbe ou terre
Une fois les pommes mélangées et nettoyées, il faut les couper et laisser reposer un moment (quelques heures) : c'est le cuvage. Pressoir à pommes Tanviez 02


La presse

On répartit ensuite le broyat (le moût) uniformément à plat sur une toile que l'on referme et sur laquelle on pose une claie.
On va empiler environ dix claies les unes sur les autres et ensuite les presser très fortement pour en extraire le jus. Suivant que l'on utilise un pressoir traditionnel (à vis) ou un pressoir hydraulique, le rendement en jus sera différent : 500 litres par tonne de fruit pour le pressoir à vis, 800 litres pour les presse hydrauliques. Le résidu de la presse est utilisé principalement pour la fabrication de produits cosmétiques.

  

Le soutirage du cidre

Entre le 5eme et 15eme jour de fermentation un "chapeau brun" va se former, monter en surface de la cuve et y rester un jour environ avant de redescendre. Ce chapeau brun contient toutes les impuretés du jus. Il faut absolument soutirer le cidre, à ce moment là au risque que toute la cuvée soit perdue. On extrait le cidre se trouvant sous le chapeau brun et au dessus de la lie (dépot en fond de cuve) pour le transborder dans une autre cuve ou tonneau.


La fermentation

Le jus soutiré va maintenant pouvoir fermenter tranquillement pendant trois à six mois. La fermentation est une réaction chimique qui, en l'absence d'oxygène et en présence d'organismes vivants (dont les levures contenues dans la peau des pommes), transforme le sucre en alcool et gaz carbonique. Il faut veiller à laisser sortir le gaz carbonique des cuves et des fûts sans laisser l'air entrer à sa place pour éviter toute oxydation du jus. La durée de fermentation dépend principalement du climat plus l'hiver sera doux, plus la fermentation sera rapide.


Envie d'aller plus loin ?
Suivez Vincent Chatelain sur la route du cidre en Normandie pour Histoire de se Balader (automne 2017)

 


La mise en bouteille du cidre

Tout au long de la fermentation, la teneur en sucre va diminuer. Le producteur va mettre le cidre en bouteille quand la quantité de sucre restant dans le jus lui convient. Cette quantité est mesurée grâce à un densimètre, plus précisément, un cidromètre en l'occurrence.
Suivant la valeur indiquée, le cidre sera plus ou moins sec :
 entre 1 000 et 1 005 : cidre sec
 entre 1 010 et 1 015 : cidre demi-sec
 entre 1 018 et 1 020 : cidre doux, sucré
 au delà de 1 025 : cidre très sucré


 

La distillation de l'eau de vie

Le cidre, c'est bien, mais un alcool un peu plus fort, ce n'est pas mal non plus, pourvu qu'on le consomme avec modération !

La distillation consiste à extraire l'alcool de la "soupe" issue de la fermentation. Comment faire ? On a recours à un alambic que l'on surnomme parfois familièrement une bouillotte.
On enferme le résultat de la fermentation dans la partie principale de l'alambic (appelée marmite ou pipe ou chaudière), coiffée d'un chapiteau (couvercle conique) raccordé par un col de cygne (tube conique lui aussi) à un serpentin plongé dans de l'eau froide. Puis on fait chauffer la marmite.

L'éthanol, alcool buvable atteint sa température d'ébullition à 78 degrés. La vapeur s'échappe alors par le serpentin où elle se condense : c'est cette forme liquide que l'on récupère goutte à goutte et que l'on nomme eau de vie ou goutte. On ne récupère pas l'alcool qui sort au début (la tête) ni à la fin (la queue) de l'opération car la tête contient du méthanol qui rend aveugle et la queue des substances visqueuses indésirables.

 
 

La distillation peut être simple ou double suivant que l'on procède en une fois ou en deux passages (on passe une première fois et on repasse dans l'alambic la première eau de vie).
 
Un bouilleur de cru est un propriétaire d'arbres fruitiers qui a le droit de distiller chez lui les produits de sa récolte. Il s'agit d'un statut, pas d'un métier. Un bouilleur ambulant peut produire ses propres eaux de vie, il a droit à une exonération de taxes sur les mille premiers degrés d'alcool pur qu'il produit (soit 20 litres d'alcool à 50°). C'est un privilège qui date de Napoléon et qui n'est plus transmissible.

Par ailleurs, tout propriétaire d'un verger peut distiller les produits de sa parcelle mais ne peut pas le faire chez lui. La distillation s'effectue dans un atelier public ou privé après déclaration aux services des Douanes. La possession d'un alambic est réservée aux professionnels ou aux syndicats communaux qui gèrent le fonctionnement d'un alambic associatif.
Le propriétaire d'une parcelle peut donner procuration à quelqu'un pour distiller en son nom.
 

Vincent Dick, distillateur ambulant

Vincent Dick parcourt les routes de Normandie avec ses alambics. Il était l'invité de 9h50 en Normandie le 2 octobre dernier, un témoignage à revoir ci-dessous



Le Calvados, c'est quoi ?

Le Calvados est tout simplement l'appellation d'une eau de vie obtenue à partir d'une distillation simple ou double d'un cidre de Normandie, c'est à dire un cidre produit dans la majeure partie de la Basse-Normandie et Pays de Bray.

Le Calvados du Pays d'Auge est issu d'une double distillation d'un cidre du Pays d'Auge

Le Calvados du Domfrontais, appellation obtenue en 1997, est issu de la simple ou double distillation d'un jus à base de cidre et d'au moins 30% de poiré issu du Domfrontais (région de Domfront). La distillation doit être faite avec un alambic à colonne et le calvados doit rester en fût de chêne pendant 3 ans minimum 

Le calva du Domfrontais constitue 1% de la production de calvados, le calva du Pays d'Auge 25% de la production.
 


Et le pommeau, qu'est-ce que c'est ?

Le pommeau de Normandie est un mélange de jus de pomme et de Calvados. On prend le jus qui sort de la presse et on le mélange avec du Calvados de telle façon que le mélange fasse 17% d'alcool. On stocke ce mélange dans un fut de chêne et on laisse vieillir deux ans au bout desquels on le met en bouteille. Le pommeau doit comprendre au moins 70% de pommes amères ou douces amères.


Voilà pour cette petite leçon de choses à propos de cidre, calvados, alambics et autres bouillottes... 
Bien évidemment, il ne s'agit ici que de simples rudiments, à vous maintenant d'explorer plus à fond ce patrimoine normand !

 
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