Une soixantaine de professionnels du secteur agricole ont mis à l’honneur le terroir normand labelisé lors du Festival des produits d'origine protégée (AOP) et d'origine contrôlée (AOC) à Cambremer dans le Calvados. Face au réchauffement climatique, ils tentent de préserver ce patrimoine culinaire.
La sécheresse impacte depuis plusieurs années l'agriculture normande : diminution d'herbes fraîches à disposition des bêtes, animaux qui souffrent de la chaleur, réserves d'eau moins importantes...
Ces menaces peuvent avoir un effet néfaste sur la qualité des matières comme le lait, potentiellement moins riche en protéines et en matières grasses. D'où l'inquiétude des producteurs labelisés AOP-AOP, soucieux de conserver leur appellation, synonyme de produits du terroir de qualité et d'un savoir-faire reconnu.
"Lorsque l'on produit des fromages, on a des difficultés en termes cidricole pour mener les fermentations. Ça fermente trop vite avec la chaleur. On a aussi des questionnements sur le bien-être animal. Ce sont des difficultés nouvelles, auxquelles il faut réfléchir" souligne Dominique Hutin, journaliste culinaire à France Inter et animateur d'une table ronde dédiée aux appellations d'origine protégées à Cambremer dans le Calvados.
Un impact financier
A l'approche de l'été 2023 qui s'annonce encore plus critique que le précédent, la profession agricole s'organise.
David Aubrée, fromager à Lessay dans la Manche et fabricant de camemberts AOP, s'est déjà adapté. Economies d’eau, ventilation des étables, plantation d’arbres, stocks de fourrage plus conséquents : l'exploitant a mis les moyens pour tenter de préserver son label. Même si cela entraîne plus de dépenses.
“Il y a un impact financier puisqu’il faut refroidir le lait plus longtemps, plus souvent, à cause de la chaleur. Mais au moins, on n'a pas d’impact technique. Car tout est maitrisé de A à Z, de la ferme jusqu’à la fromagerie” indique David Aubrée, qui transforme le lait d'une trentaine de producteurs locaux.
Le reportage d'Alexis Delacour et Stéphanie Lemaire
Des dérogations pour conserver le label
Certains producteurs n’arrivent cependant pas à respecter l’ensemble des critères imposés par le label. Dans certains cas, ils peuvent obtenir des dérogations tout en conservant leur appellation.
Les AOP ne sont pas menacées de disparition. Elles continueront à évoluer. Le monde bouge. Une AOP c’est un lien au terroir, la transmission d’un savoir-faire traditionnel, une émotion sensorielle mais aussi surtout une fidélité au produit et le comité national est là pour conserver cette fidélité au produit
Bruno Lefebvre, membre du comité national des appellations d’origine laitières et agroalimentaires de l’INAO
Les syndicats de producteurs ont prévu de continuer à discuter de l’avenir des appellations AOP et AOC de juillet à octobre prochain.