Suzy Scepers est née à la maternité de Bénouville en 1929. Seule et rejetée par sa famille, sa mère a accouché dans ce château transformé en "Maison de l'enfance" par le département du Calvados en 1927. Pendant près de cinquante ans, cette institution a accueilli des milliers d’enfants et des générations de "filles mères" qui y accouchèrent en secret.
"Je suis née à la maternité de Bénouville en 1929 parce que ma mère était seule. Et à l'époque, la personne qui était seule était montrée du doigt, elle avait fauté" raconte Suzy Scepers dans le documentaire "Naître à Bénouville, histoire d’une maternité" de Céline Formentin et Vic Demayo.
Le château de Bénouville, situé près du célèbre pont connu du monde entier de "Pegasus Bridge" a été auparavant la "maternité de Bénouville". Le conseil général du Calvados a racheté le bâtiment en 1927 pour y créer la première maison départementale de l'enfance accueillant notamment une maternité et une pouponnière pour les enfants du premier âge et une garderie spécialisée.
De 1929 à 1973, plus de 11 000 enfants sont nés derrière les grilles du château de Bénouville. Ici, des générations de "filles mères" sont venues trouver refuge et accoucher en secret. À travers l'histoire de la maternité, le film de Céline Formentin et Vic Demayo est une véritable plongée au cœur de la condition féminine et dévoile un chapitre peu connu des violences faites aux femmes et leurs enfants.
Je voulais savoir quand même qui était mon père. Mais ils ne parlaient pas à l'époque... Ma mère est partie avec son secret, elle ne me l'a jamais dit.
Suzy ScepersExtrait de "Naître à Bénouville, histoire d’une maternité" de Céline Formentin et Vic Demayo
Une maternité, mais aussi un centre d'apprentissage
"Ma mère a travaillé ici pendant deux ans et elle m'a gardé avec elle", confie Suzy Scepers dans le documentaire. "Par la suite, elle s'est mariée avec le chauffeur qui conduisait l'ambulance de la maternité et donc je suis repartie avec elle. Je lui ai dit bien des fois Maman, c'est formidable ce que tu as fait, parce que tu m'as gardée."
Suzy Scepers est d'ailleurs elle-même devenue par la suite éducatrice spécialisée à la maternité de Bénouville.
Car cette maison départementale de l'enfance avait une utilité sociale essentielle : c'était aussi un centre de formation pour les femmes, pourvoyeur d'emplois autour du soin des mères et des enfants.
La mère de l'actrice Annie Girardot a été sage-femme au château de Bénouville, elle y a d'ailleurs vécu avec sa fille qui a considéré cette carrière avant de se lancer dans la comédie. En 1970, elle revenait sur les lieux de son enfance pour un reportage et elle confiait ses souvenirs de Bénouville.
Et maintenant ?
Actuellement fermé aux visiteurs mais pris d'assaut lors des ouvertures exceptionnelles comme les journées du patrimoine, le département du Calvados a décidé de faire du château une figure de proue de la vie culturelle calvadosienne avec une ouverture au public en 2027.
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Le château de Bénouville va devenir "une pouponnière culturelle où les services culturels départementaux (archéologie, arts vivants et visuels, patrimoine et direction) bénéficieront d’outils modernes de travail pour répondre toujours mieux aux attentes, aux besoins des territoires et à l’évolution des pratiques culturelles."
En attendant... Le documentaire "Naître à Bénouville, histoire d’une maternité" de Céline Formentin et Vic Demayo est à voir ce jeudi 10 octobre à 22h45 sur France 3 Normandie et quand vous voulez pendant un mois sur france.tv.