Les défenseurs du collège Val de Vire n'ont peut-être pas dit leur dernier mot

Le tribunal administratif de Caen a donné raison mercredi 7 février au Département du Calvados qui entend fermer l'un des deux collèges publics de Vire à la rentrée prochaine. Après un et demi de combat, le coup est rude pour les élèves, parents et enseignants. Mais l'heure n'est peut-être pas encore à la capitulation.

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Le jour ne s'est pas encore totalement levé ce jeudi matin alors que l'heure des cours a sonné au collège du Val-de-Vire. Et la nuit n'a pas pansé toutes les plaies. "On est tous sous le choc", raconte Valérie Langevin, professeure d'anglais devant les grilles de l'établissement, "Les enfants aussi ont été choqués. Il y a eu beaucoup de pleurs. On a tendance à oublier que des décisions prises hors-sol, dans des bureaux, impactent des vrais êtres humains, de chair et de sang : des élèves, des parents." Et des enseignants qui doivent se retrouver au cours de la matinée pour évoquer l'avenir.

L'avenir, pour le collège du Val-de-Vire, s'écrit désormais à court terme. Quelques mois tout au plus. Ainsi en a décidé le Département du Calvados il y a bientôt un an et demi. Et ce mercredi 7 février, le tribunal administratif de Caen, après avoir suspendu cette décision en mars 2023 pour vice de procédure, lui a finalement donné raison. "Par ce jugement, on voit comment on considère l’éducation publique en zone rurale", déplore l'enseignante.

"On voulait deux collèges à taille humaine"

Pour Jean-Léonce Dupont, le président du Département du Calvados, la fusion des deux collèges publics virois (Val de Vire et Maupas) se justifie par l'évolution démographique. Lors de l'annonce de la fermeture en septembre 2022, il est alors soutenu par le maire de la ville, Marc-Andreu Sabater. Lequel va se retrouver au fil des mois en minorité sur son territoire, jusqu'au sein même du conseil municipal. Il finira par défiler dans la rue aux côtés des parents, élèves et enseignants opposés à ce projet.  

On voulait deux collèges à taille humaine, pas des collèges usines.

Valérie Langevin, professeure d'anglais au collège du Val de Vire (14)

Après un an et demi de combat, le coup est rude pour les défenseurs du collège du Val-de-Vire. "Moi, je suis dans ce collège depuis 27 ans. Donc c’est plus qu’un collège. Pour beaucoup d’entre nous, c’est une famille. Ici, c’est pas un collège, c’est une maison. Pour les professeurs, pour les élèves", raconte la professeure d'anglais. "Nos enfants, quand ils se sont levés ce matin, ils avaient encore ça sur le cœur, comme nous tous", confirme Gaëtan Prévert, parent d'élève. Pauline Désert, l'avocate du collectif Val de Vire, accuse elle aussi le coup. "On a été très déçus parce qu’on avait des choses à dire. On n’est pas arrivés avec quelques arguments jetés çà et là en pâture, on n’avait des choses à dire. On avait des arguments qui étaient sérieux."

"On croise les doigts pour qu’il n’y ait pas d’accident"

Parmi ces arguments, les conditions d'accueil des élèves du Val-de-Vire au collège Maupas qui ne seraient pas réunies. "Ce (jeudi) matin, j’écoutais la radio locale et j’apprenais que tout ce qui nous a été dit, ce qui devait être prévu pour les aménagements aux abords du collège Maupas étaient abandonnés ou au point mort", indique Gaëtan Prévert.

"La Ville, à l’unanimité, a manifesté auprès des hautes instances son inquiétude au sujet des abords de Maupas", rappelle Valérie Langeron, "Il doit y avoir des travaux. Mais rajouter 200 élèves à un chantier de sécurisation, on croise les doigts pour qu’il n’y ait pas d’accident. On pense, comme toujours, à nos élèves, aux êtres humains."

Aussi valable soit-il pour les parents et enseignants, l'argument n'a pas été retenu par le tribunal administratif. "Le Département n’a pas la compétence pour aménager les abords du collège. Sa compétence commence et se termine à l’entrée du collège. Tout ce qui concerne les aménagements des abords ne le concerne pas", explique et déplore l'avocate du collectif.

"On n’a pas dérangé la justice pour rien"

Mais à la déception, le tribunal a ajouté de la colère chez les défenseurs du collège du Val-de-Vire. Ces derniers devront verser 1500 euros de participation aux frais de justice du Département. "C’est une disposition du code de justice administrative qui autorise le juge, si on lui en fait la demande, à ce que soit mis à la charge de la partie qui a dérangé l’autre pour rien, c’est à dire celui qui perd, à payer une partie des frais d’avocat", explique Me Pauline Désert, "1500 euros c’est une somme que je trouve importante. Et un peu sévère. D’autant que c’est une association qui se finance avec les participations de chacun. Et dans ce recours, il y avait des choses, on n’a pas dérangé la justice pour rien."

Chez les défenseurs du collège du Val-de-Vire, la facture reste en travers de la gorge. "On a payé de notre poche pour défendre un service public et on demande à de simples citoyens de payer 1500 euros à un Département qui avait les moyens de se payer un avocat sur Paris", s'étrangle Valérie Langevin. "Là, on comprend le message qui nous est envoyé : maintenant il va falloir arrêter", estime Gaëtan Prévert. Un message suffisamment dissuasif ? "Nous, quand on nous dit d’arrêter, ça nous pousse plutôt à continuer. Ça ne nous divise pas, loin de là", prévient le parent d'élève, "On n'a pas dit notre dernier mot."

Si une bataille a été perdue ce mercredi, la guerre n'est pas peut-être pas encore terminée. " S’ils en ont envie, s’ils ont encore l’énergie - parce que c’est quelque chose qui leur a demandé beaucoup d’énergie - la voie de l'appel leur est ouverte", indique leur avocate Pauline Désert, "Je les assisterai, c’est un combat auquel je crois. Mais il faut trouver l’énergie. La décision leur appartient. Ils savent que je suis disponible. Passé la sidération, passée la colère, il va falloir que l’on ait cette discussion." Le collectif a désormais deux mois pour faire appel de cette décision devant la cour d'appel administrative de Nantes.

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