L'annonce de leur quasi-suppression avait cristallisé l'opposition à la réforme du collège. Surprise, les classes bilangues sont maintenues à 100 % à Paris mais en Basse-Normandie, elles ne seront que 3 à la rentrée 2016 ! Unique en France !
L'annonce avait fait descendre les profs d'allemand dans la rue, outre-rhin, la décision avait même viré à la crise diplomatique avec Berlin. Devant une telle mobilisation, force est de constater qu'il y a eu rétropédalage, minireculade...sauf dans l'académie de Caen qui affiche une baisse de 95 % des classes bilangues alors que dans l'Hexagone, elles sont majoritairement maintenues.
Académie de Caen: l'académie du zèle?
Les classes bilangues, dans lesquelles un élève de sixième apprend deux langues vivantes dès son arrivée au collège, seront donc trois à la rentrée prochaine dans l'académie de Caen. De quoi plaire à la ministre de l'Education Nationale Najat Vallaud-Belkacem qui avait d'abord tenté la suppression de ces classes jugées trop "élististes". L'idée de sa réforme est de permettre à la place pour tous l’apprentissage de la seconde langue vivante un an plus tôt, dès la cinquième, à partir de la rentrée 2016, et non plus à partir de la quatrième comme c’est le cas aujourd’hui.
Dans l'académie de Caen, elles ne seront donc plus que 3 à la rentrée prochaine...Interrogé par nos soins, par la voix de son directeur de cabinet, le rectorat de Caen répond " Il faut surtout demander aux autres rectorats pourquoi ils n'ont pas appliqué la réforme"...Cette réponse, les professeurs d'allemands de l'académie l'ont au travers de la gorge tout comme les parents d'élèves: " L'atmosphère est délétère, les collègues sont furieux et certains pensent mener des actions en justice en tant que parents d'élèves pour non-respect de l'égalité face à la loi. Rappelons que 0% des classes bilangues ont été supprimées à Paris alors que 95% le sont dans l'Académie de Caen. L'injustice saute aux yeux tant sur le plan moral que juridique" explique un enseignant d'allemand au lycée Charles-de-Gaulle de Caen.
Goethe dès le CP dans l'académie?
Le rectorat n'explique pas vraiment le pourquoi de sa singularité. Et si les recteurs qui ont eu à appliquer cette réforme y avaient mis toute leur motivation? " Il ne s'agit pas de parler de telle ou telle personne" , objecte-t-on au rectorat. Difficile donc de déterminer le degré d'investissement de l'actuel recteur ou encore de son prédécesseur, Christophe Prochasson, devenu "le" Conseiller éducation auprès de François Hollande depuis...septembre 2015.
Le rectorat continue son explication en évoquant la situation " atypique de la région" quant à l'enseignement des langues vivantes en primaire. Ce sont les rectorats qui décident quelle langue vivante est apprise dans chacune des écoles primaires de son académie. Jusqu’ici, en France, 92% des primaires ont choisi l’anglais mais " dans l'académie de Caen, c'était 99,8 % des élèves. La réforme, telle que nous avons choisi de l'appliquer, va permettre de proposer d'autres langues dès le primaire, l'allemand notamment". Haben Sie verstanden? Did you understand?
Reportage Suzana NEVENKIC et Hélène Jacques
Intervenants :
- Claire Lavillle, Professeure d'allemand au collège et membre de l'ADEAF
- Philippe-Pierre Cabourdin, Recteur de l'académie de Caen et de la région académique Normandie
©F3 BN