Polémique à Evreux après les violences de la manif régionale des gilets jaunes

Après les dégradations commises par les casseurs, le maire d'Evreux accuse l'Etat. Le préfet de l'Eure répond et rappelle les propos de Guy Lefrand en novembre dernier et le rappel à la loi qui avait suivi
 

Des manifestants venant de toute la Normandie étaient attendus ce samedi (26 janvier 2019) à Evreux pour un rassemblement régional des gilets jaunes qui pour ce 11e  samedi de mobilisation, avaient fait le choix de la capitale de l'Eure.

C'est devant l'hôtel de ville qu'à 10h, les gilets jaunes se sont regroupés pour partir en cortège dans les rues du centre-ville d'Evreux lors d'une matinée calme, ponctuée par les différents slogans.

Résumé dans cet article ⇒ 

Affrontements, violences et dégradations

C'est en fin de matinée, vers midi, à la hauteur du bâtiment de la Banque de France, quand les manifestants ont voulu se rapprocher de la préfecture de l'Eure que les premiers incidents ont éclaté. Un affrontement avec les policiers a fait refluer les gilets jaunes vers la place de l'hôtel de ville où ont lieu des travaux. C'est là que d'autres heurts se sont produits et que du matériel de chantier a été dégradé et à été utilisé comme projectiles  lancés vers les forces de l'ordre.

Des casseurs sont passés à l'action sur cette place et dans les rues voisines. C'est pendant ces affrontements de l'après-midi que deux voitures garées près de l'hôtel de ville ont été incendiées et que des manifestants ont réussi à entrer dans les locaux de la municipale d'Evreux.
 
VIDEO : le reportage de Magali Nicolin et Stéphane L'Hôte
 

Le maire d'Evreux critique l'Etat

Hier, en fin d'après-midi, avant même la fin de ces dégradations et de ces scènes de violences, Guy Lefrand, le maire d'Evreux publiait un communiqué dans lequel il déplorait le manque de moyens supplémentaires mis en place par l'Etat pour contenir les débordements :

A l’heure ou des casseurs sévissent encore en centre-ville, l’incompréhension d’une mauvaise gestion de la situation par l’État dont l’une des missions premières et prioritaires est le maintien de l’ordre, laisse place à la colère du peuple.


Guy Lefrand, toujours dans ce communiqué, va plus loin en critiquant la façon dont les forces de l'ordre police nationale et gendarmerie) ont été déployées en centre-ville, allant même jusqu'à affirmer que "Evreux  a été victime d’une double peine "
 


Guy Lefrand critique

"Un État retranché dans son « bunker » derrière un cordon de forces de l’ordre, dispersant les manifestants. La colère d’une partie de ces manifestants s’est alors répandue dans le centre-ville, dégradations et incendies de véhicules à la clé, au pied même de l’hôtel de ville, qu’aucune force de l’ordre ne protégeait malgré les risques évidents représentés par la présence de casseurs alcoolisés, venus de départements limitrophes.

Aucune réponse n’a été apportée en termes de maintien de l’ordre quand il en était encore temps. La ville a été livrée à elle-même. Les commerçants, les riverains, les usagers du centre-ville n’ont pas eu le droit à la protection de l’État, en première partie de journée.

Pendant ce temps les agents municipaux dont les policiers municipaux d’Évreux ont été exemplaires depuis le début de la journée.
Les forces de l’ordre sont venues en renfort, mais les feux étaient déjà allumés."

J’ai vu ces casseurs. Ce ne sont pas les gilets jaunes avec qui je discute depuis le début du mouvement contre une fiscalité injuste, et la désertification des services publics de proximité en milieu rural.
Ce sont des individus alcoolisés, violents, voulant casser tout ce qui est différent d’eux. Et ceux-là, ni les initiateurs de la manifestation, ni l’Etat ne les ont stoppés dans leurs agissements.


 

La réponse cinglante du préfet de l'Eure

Mis en cause par le maire d'Evreux, le préfet de l'Eure n'a pas tardé à réagir en publiant en début de soirée  un communiqué (à lire au bas de cette page)  afin de répondre aux critiques concernant "la stratégie de maintien de l'ordre mise en œuvre pour contenir les manifestations de plus de 800 gilets jaunes ce  26 janvier 2019 à Évreux."


Pour le représentant de l'Etat dans le département de l'Eure il s'agit de

 Ramener de la sérénité et appelle chacun à la raison".  Répondant aux critiques  de Guy Lefrand  le préfet   s’étonne d’entendre que la préfecture aurait été privilégiée au détriment du centre-ville alors même que des bâtiments de l’État ont été attaqués. Un dispositif adapté et prenant en compte des effectifs mis à disposition avait bien été mis en place.


Toutefois, le préfet déplore "des dégradations commises à l’endroit de bâtiments de l’État (bâtiments préfectoraux, Banque de France, etc.), de bâtiments municipaux, voire de commerces et les condamne fermement."

Quant aux scènes de violences commises aux abords immédiats de l'hôtel de ville d'Evreux, le préfet  Thierry Coudert précise que "les effectifs de la police nationale ont été déployés au plus vite afin de faire évacuer les manifestants qui avaient envahi les locaux de la police municipale. Ils ont été renforcés, par des fonctionnaires de police supplémentaires et les gendarmes de  l’escadron de gendarmerie mobile afin de disperser les manifestants qui avaient dressé des barricades, y avaient mis le feu, feu qui s’est propagé à deux véhicules."
 
 

Les gilets jaunes, le maire d'Evreux et la police municipale

Ce communiqué du préfet de l'Eure est l'occasion de revenir sur le début du mouvement des gilets jaunes, en novembre 2018, quand le maire d'Evreux était allé voir des manifestants à un rond-point. Guy Lefrand, lors de cette rencontre avait eu une étonnante conversation avec les gilets jaunes ébroïciens, évoquant un blocage de la préfecture et …même de la police municipale :
  

 Si bêtement, vous décidez de bloquer la police municipale, ou en tout cas les ASVP et que moi j’oublie d’intervenir, ça ne gênerait personne et ça peut être visible… Si vous êtes à cinq pour bloquer la police municipale, mes gars ne sortiront pas. Si vous le faîtes,  je ferai semblant de ne rien voir


Des propos qui, à l'époque, avaient fait réagir la procureure de la République. Le maire d'Evreux avait été alors auditionné par la police.
Des faits que le préfet de l'Eure n'a pas oublié en précisant, dans le communiqué publié après les incidents de ce samedi,  "qu'un rappel à la loi avait été prononcé par la Procureure de la République à la suite des  propos du maire d'Evreux", et qu'en dépit de ses déclarations, "la préfecture a tenu à mobiliser immédiatement les forces de l’ordre pour porter secours à la Police Municipale."
 

 
Communiqué du préfet de l'Eure
Evreux le 26 janvier 2019

Manifestation gilets jaunes à Evreux

Le maire d’Évreux et son adjoint en charge de la sécurité ont critiqué la stratégie de maintien de l’ordremise en oeuvre pour contenir les manifestations de plus de 800 gilets jaunes le 26 janvier 2019 à Évreux.

Le préfet souhaite ramener de la sérénité et appelle chacun à la raison. Il s’étonne d’entendre que lapréfecture aurait été privilégiée au détriment du centre-ville alors même que des bâtiments de l’État ont  été attaqués.

Un dispositif adapté et prenant en compte des effectifs mis à disposition avait bien été mis en place.
Toutefois, le préfet déplore des dégradations commises à l’endroit de bâtiments de l’État (bâtiments  préfectoraux, Banque de France, etc.), de bâtiments municipaux, voire de commerces et les condamne  fermement

En matinée, les manifestations se sont déroulées dans le calme jusqu’à l’arrivée du cortège à hauteur de  la Banque de France, puis de la préfecture où il y a eu des dégradations et affrontements entre gilets  jaunes et forces de l’ordre avant que le calme ne soit ramené. En début d’après-midi, entre 300 et 400  gilets jaunes se sont à nouveau rendus devant la Mairie, place sur laquelle ils s’étaient réunis à plusieurs
reprises. Certains d’entre eux ont alors, soudainement, pénétré dans les locaux de la police municipale d’Évreux.

Les effectifs de la police nationale ont été déployés au plus vite afin de faire évacuer les manifestants qui  avaient envahi les locaux de la police municipale.

Ils ont été renforcés, par des fonctionnaires de police supplémentaires et les gendarmes de l’escadron de  gendarmerie mobile afin de disperser les manifestants qui avaient dressé des barricades, y avaient mis le  feu, feu qui s’est propagé à deux véhicules.

Le maire d’Évreux lui-même, le 27 novembre 2018, lors de sa rencontre avec les gilets jaunes au rond- point Cocherel avait appelé à bloquer la préfecture et avait ajouté s’agissant de la police municipale « Si  bêtement, vous décidez de bloquer la police municipale, ou en tout cas les ASVP et que moi j’oublie  d’intervenir, ça ne gênerait personne et ça peut être visible… Si vous êtes à cinq pour bloquer la police
municipale, mes gars ne sortiront pas. Si vous le faîtes, je ferai semblant de ne rien voir ». Un rappel à la  loi avait été prononcé par la Procureure de la République à la suite de ses propos.

En dépit de ses déclarations, la préfecture a tenu à mobiliser immédiatement les forces de l’ordre pour  porter secours à la Police Municipale.

Par ailleurs, alors que la manifestation était annoncée depuis plusieurs jours, il avait été demandé à  l’adjoint au maire chargé de la sécurité et aux services municipaux de procéder à l’enlèvement de tout  objet pouvant être utilisé. Force est de constater que des barricades ont pu être dressées grâce au  matériel des différents chantiers situés autour de la mairie, matériaux qui ont également servi de  projectiles à l’encontre des forces de l’ordre.

S’agissant des commerces, ils ont été préservés par l’intervention des forces de police. Il n’est à déplorer  que deux incidents en centre-ville avec les protections mises en place par une agence bancaire qui ont  été arrachées et la vitrine d’un salon de coiffure qui a explosé sous l’effet de la chaleur d’un feu.
Le centre commercial CORA a, quant à lui, fait l’objet d’une tentative d’intrusion.

Les effectifs de police et les militaires de la gendarmerie nationale sont restés mobilisés jusqu’à la dispersion totale des manifestants qui ont continué leur déambulation dans les rues d’Évreux jusqu’à vingt  heures.

Le préfet salue le travail de tous les fonctionnaires de police et militaires de la gendarmerie qui ont oeuvré  toute la journée pour contenir des manifestants déterminés à en découdre.

Aucun blessé n’est à déplorer. 12 personnes ont pu être interpellées.

 
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité