Mort de Lisa, trois ans : deux directeurs d'école mis en examen pour non-dénonciation de mauvais traitement

"Ni la gendarmerie, ni la justice, ni les services de l'aide sociale à l'enfance n'avaient été informés des violences difficilement soutenables subies par la petite fille", souligne le procureur. Le 24 septembre 2023, Lisa, 3 ans, est morte à l'hôpital.

"Nous avons estimé, avec le juge d'instruction, qu'il y avait suffisamment d'éléments pour mettre en examen" les deux directeurs d'école concernés, souligne ce lundi 15 janvier le procureur d'Evreux, Rémi Coutin.

Deux directeurs d'école sont mis en examen pour non-dénonciation de mauvais traitements dans le cadre de l'enquête sur la mort d'une fillette de trois ans à Conches-en-Ouche (Eure). Il s'agit de "la directrice de l'école maternelle où était scolarisée la petite fille ainsi que le directeur de l'école primaire où était scolarisé son grand frère (âgé de six ans), lui aussi victime de maltraitance", précise le procureur de la République d'Evreux, Rémi Coutin.

Ni la gendarmerie, ni la justice, ni les services de l'aide sociale à l'enfance n'avaient été informés" des "violences difficilement soutenables" subies par la petite fille.

Rémi Coutin, Procureur de la République d'Evreux

Les faits remontent à la fin du mois de septembre. Dans la nuit du 24 septembre 2023, Lisa, 3 ans, décède après son arrivée à l'hôpital. Elle portait de multiples hématomes d'âges différents sur "le visage, les quatre membres, le thorax, le dos, le pubis", avait indiqué, à cette époque, le procureur de la République d'Evreux. Le décès de l'enfant avait provoqué une vive émotion et quelques jours plus tard une marche blanche était organisée.  

Les éléments recueillis par les enquêteurs ont conduit à la poursuite des deux responsables d'établissements : "La directrice d'école a semblé reconnaître au moins une part de responsabilité en expliquant qu'elle s'était dit à un moment qu'il fallait sans doute qu'elle rédige un signalement. Mais qu'elle ne l'avait pas fait, parce que, avait-elle dit, elle n'en avait pas eu le temps. Le directeur, lui, conteste sa responsabilité", a rajouté le procureur. 

Sollicité par l'AFP, le rectorat de Normandie confirme "que les deux fonctionnaires sont suspendus. Une enquête administrative sera diligentée par le rectorat lorsque l'enquête judiciaire sera suffisamment avancée".

Les syndicats enseignants "sidérés" par la mise en examen des enseignants

On fait porter une responsabilité, et cela a un impact sur la vie de nos collègues qui sont inquiétés.

Mathilde Marnière, Co-secrétaire départementale SNUIPP

Pour les syndicats, depuis l'annonce de cette mise en examen, c'est "la sidération" : "C'est un engagement, une fonction, un métier qui est complexe, qui est fait de dilemme… C'est difficile d'un cadre extérieur de juger une décision prise à un moment T d'une personne". Mathilde Marnière pointe le métier difficile de l'enseignement et le manque de moyens.

On fait des choix, qui, peut-être ne sont pas les bons, au bon moment, mais qui sont pris dans une réalité et dans un contexte, qui n'est pas anodin.

Mathilde Marnière, Co-secrétaire départementale SNUIPP

Suite à l'annonce de ces mises en examen, d'autres réactions syndicales n'ont pas tardé à suivre.

Nous sommes outrés et je ne cache pas mes mots, par cette mise en examen. On a le sentiment que ces deux directeurs d'école sont responsables de tout. 

Thierry Pajot, Secrétaire général du syndicat des directrices et des directeurs d'école

En France, 40.000 directeurs d'école sont sur le terrain, tous les jours, avec parfois des parents très véhéments, "on aimerait bien un soutien de la hiérarchie", quand ce type de procédure est activée, "mais on ne l'a pas" regrette-t-il. Thierry Pajot pointe le fait que régulièrement des "I.P" (Information préoccupante) sont réalisées et que "nous n'avons aucun retour, de la part de la hiérarchie ou des services du procureur, ou de la part surtout des services sociaux ".

Leur situation, c'est "notre situation du quotidien". Celui-ci rappelle qu'il ne nie pas la responsabilité, mais pour lui, les directeurs ne sont pas les "seuls à savoir". Les deux responsables d'établissement encourent, chacun, une peine de cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende.

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