Elles sont vertes, rouges ou brunes… Les algues font partie du décor de notre estran. Mais certaines sont plus présentes que d’autres. Notamment la Sargasse, une espèce invasive, baptisée également « La Japonaise ». Faut-il redouter la prolifération de ces algues ?
L’estran de Luc-sur-mer, sur le littoral du Calvados, est bien connu des biologistes. Car c’est là qu’est installé le CREC, le Centre de recherche en environnement côtier de l’Université de Caen Normandie. Un terrain idéal pour observer, au gré des marées, les algues.
« Ici, à Luc-sur-mer, nous comptons, 30 à 40 espèces d’algues observables à marée en fort coefficient de marée, mais cela peut aller jusqu’à 70 à 80 dans le Nord-Cotentin », explique Isabelle Mussio, enseignante chercheuse au CREC.
« Les algues les plus communes en Normandie, ce sont les brunes, complète Anne-Marie Rusig également enseignante-chercheuse au CREC. Ensuite, en période estivale, nous avons les algues vertes qui se développent de manière importante sur les rochers. Enfin, les algues rouges comme cette algue aux propriétés gélifiantes, la chondus crispus. »
La Sargasse
Il existe une espèce invasive, la Sargasse (sargassom muticom), baptisée également « la Japonaise », une très grande algue brune de la famille des fucus, dont l'accumulation forme de véritables îles flottantes, comme au large de la côte de la Floride.
La Sargasse est désormais présente dans la mer de Manche. « C’est une espèce introduite de manière involontaire via l’importation d’huîtres du Japon, explique Isabelle Mussio. Elle a été observée pour la première fois dans notre région à Saint-Vaast-La Hougue au milieu des années 70 et a trouvé sur notre littoral, sur les plateaux rocheux, les conditions favorables pour se développer. »
Si elle prolifère, est-elle dangereuse pour autant ? « Non, rassure Isabelle Mussio. Pour qu’une algue soit dangereuse, il faut qu’elle s’échoue en très grande quantité, qu’elle sèche sur l’estran. On a alors une sorte de fermentation en condition anoxique, c’est-à-dire sans oxygène, ce qui peut produire de l’hydrogène sulfuré."
La Normandie n'est pas la Bretagne
Quant au risque de prolifération d'algues vertes, les deux biologistes se disent rassurantes.
Tout d'abord, dans notre région, les espèces d'algues vertes ont un cycle de vie beaucoup plus court qu'en Bretagne. Ceci s'explique par le fait qu'elles se décrochent des rochers au gré des marées et meurent. "Alors qu’en Bretagne, il s’agit d’espèces pélagiques", explique Isabelle Mussion, autrement dit des espèces qui vivent en pleine eau, sans s’accrocher à un quelconque substrat (comme les Sargasses d’ailleurs).
Par ailleurs, notre littoral présente moins de petites criques propices au développement de ces végétaux marins. En Bretagne en revanche, de nombreuses criques sont alimentées par de l’eau douce qui apporte des nutriments aux algues.