La trêve hivernale prend fin ce 1er juin, après une prolongation de deux mois par le Gouvernement. Selon l'association Droit au Logement (DAL), 30 000 locataires seraient désormais menacés d'expulsion. Du côté des propriétaires, la réouverture des procédures est un soulagement autant qu'un fardot.
La trêve hivernale se termine aujourd'hui. Habituellement placée entre le 1er novembre et le 31 mars, elle a été, cette année comme la précédente, prolongée de deux mois par le gouvernement en raison de la pandémie de Covid-19. Durant les sept mois qui viennent de s'écouler, aucune expulsion locative n'a pu avoir lieu, même si un locataire n'était plus en mesure de payer son loyer.
Aujourd'hui, l'association Droit Au Logement (DAL) lance un signal de détresse. 30 000 locataires pourraient être contraints de quitter leur domicile dans les prochaines semaines. Le début d'un calvaire pour les familles à la rues, la fin d'un autre pour certains propriétaires, acculés financièrement par le non-paiement des loyers. Mais ces expulsions ne vont pas se faire en un claquement de doigts.
Des expulsions étalées dans le temps
"Dans un premier temps, on s'attend surtout à pas mal d'assignations au tribunal. Les expulsions pourraient arriver ensuite, explique Jean-Paul Ribet, du DAL de Rouen. De toutes façons, elles seront étalées dans le temps car la police n'a pas les moyens humains de toutes les faire en peu de temps".
Le bénévole tient à insister sur la bonne foi des principaux concernés par les mesures d'éviction. "Ces gens ont fait tout leur possible, ils ont empruntés à droite, à gauche mais se retrouvent acculés. Ils sont plus nombreux cette fois-ci, à cause de la crise sanitaire qui a privé de salaire ou réduit les revenus de beaucoup de locataires".
On ne sait pas comment faire pour que les gens viennent nous voir... Il y a parfois des solutions à trouver. Il est par exemple très important de ne jamais couper totalement les paiements, de prouver sa bonne foi. Mais la plupart du temps, on nous contacte trop tard, une fois qu'il n'est plus possible d'agir pour éviter les évictions de logements.
Même son de cloche du côté des associations de propriétaires. "Il faut aller au devant des problèmes" selon Jean-Claude Grzemski, président de l'UNPI de la Manche. Il estime qu'il faut rapidement prendre le taureau par les cornes car "il est plus facile de faire partir quelqu'un qui a une dette de 1000 € plutôt que quelqu'un qui en a une de 15 000 €".
4 à 5 fois plus de dossiers de litiges dans la Manche
Lorsque l'on se retrouve dans une situation où le locataire ne peut plus payer l'intégralité du loyer, il faut lui dire "Ecoutez, il est peut-être possible de s'accorder sur une partie de la somme puis d'étaler les remboursements par la suite. Être humain, c'est le meilleur moyen de régler les litiges" pour celui qui est aussi représentant de la CCAPEX, la commission de coordination des expulsions dans le département.
Or, ces dernières années, il a vu les dossier s'amonceler sur son bureau. "Il y a trois ans, on traitait environ 250 affaires annuellement. Aujourd'hui, on a multiplié ce chiffre par 4 ou 5 pour arriver aux alentours de 1200 dossiers". Il y a une colère de plus en plus palpables chez les propriétaires note Jean-Luc Maublanc, de l'UNPI de l'Eure. "On veut que le locataire dégage" est souvent la première phrase qu'il entend lorsqu'un loueur le contacte. S'il dénonce ce genre d'attitude, il la comprend aussi.
Les lois successives des dernières années ont dégradé les relations locataires-propriétaires, et affaibli ces derniers. La taxe foncière a augmenté d'environ 16% ces dernières années. Bien souvent, elle représente une somme équivalente à 2 mois de loyer. En dix ans, les propriétaires ont vu leurs revenus chuter de 30% !
Plus de la moitié des propriétaires français sont issus de professions libérales, de l'agriculture ou de petits commerces. La plupart du temps, leurs logements locatifs sont une source de revenus de compensation de leur petites retraites. Alors, quand un locataire ne paie pas son dû pendant plusieurs mois, la situation financière peut devenir très compliquée. Pour autant, la voie judiciaire pour régler le litige est souvent la moins bonne solution, mais la plus empruntée.
Trêve hivernale, déclaration d'impôts, état d'urgence sanitaire… Ce qui change le 1er juinhttps://t.co/tF1E8eXyph pic.twitter.com/fkpkpAQCpj
— franceinfo (@franceinfo) June 1, 2021
Une multitude d'interlocuteurs pour s'en sortir
De nombreuses associations ou organisations existent justement pour ne pas en arriver là, il est important de les connaître, et de savoir les contacter dès que la situation devient compliquée entre un locataire et un bailleur, et vice-versa. D'Action Logement à l'UNPI, du DAL à la Confédération générale du logement (CGL) en passant par l'Anil et bien d'autres encore, vous trouverez forcément une écoute et peut-être une solution avant que tout ne doive en passer par les tribunaux.