Biodiversité, patrimoine, tourisme : l'avenir incertain des îles Saint-Marcouf

L'archipel des îles Saint-Marcouf, sur la côte est du Cotentin, est interdit au public. Une dizaine d'espèces d'oiseaux y niche. Sur l'une des îles, la restauration de monuments historiques est en cours. Entre sauvegarde de la biodiversité et du patrimoine, le projet fait débat.

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Cap sur la Manche orientale. L'archipel des îles Saint-Marcouf, situé sur la côte est du Cotentin, est composé de l'Ile de Terre et de l'Ile du Large. Ici, pas de présence humaine. Pas de dérangement possible. Les oiseaux y ont donc élu domicile.

"Saint-Marcouf, c'est l'une des rares îles de la Manche orientale sans hommes et sans prédateurs. C'est ce qui explique l'installation des oiseaux nicheurs marins", souligne Gérard Debout, président de l'association Groupe ornithologique normand (GONm), créée en 1972. 
 

L'Ile de Terre réservée aux oiseaux

Goélands, cormorans, aigrettes garzettes, tadornes de Belon... Depuis plus de 50 ans, l'Ile de Terre est une réserve ornithologique, dont le suivi et le recensement des oiseaux sont assurés par le GONm. Ses 3,4 hectares sont occupés par une dizaine d'espèces différentes.

Interdite au public, l'île est sanctuarisée. Depuis le 24 juillet, cette interdiction est renforcée par un arrêté. La préfecture matitime de la Manche et de la mer du Nord a pris un arrêté "interdisant la navigation, la circulation et le mouillage des navires sur une zone située autour de l'Ile de Terre des îles Saint-Marcouf".

 
 

Sur l'Ile du Large, des oiseaux mais pas seulement...

Sur l'Ile du Large, des oiseaux cohabitent parfois avec les bénévoles de l'association des Amis de l'Ile du Large Saint-Marcouf. Depuis 2003, ces "passionnés de patrimoine et d’Histoire", ont pour objectif de préserver les digues.

Le chantier de restauration, confié par la Conservation régionale des monuments historiques, consiste notamment à refaire les joints "violemment attaqués par la mer", explique le président de l'association des Amis de l'Ile du Large Saint-Marcouf, Christian Dromard. Il ajoute : "si on ne refaisait pas les joints, cette digue s'éffondrerait très vite".

​​​Mettre en sécurité et sauvegarder le patrimoine du 19ème siècle, le GONm y est "tout à fait favorable". A condition que les travaux ne soient pas réalisés n'importe quand, alerte Gérard Debout. Cet enseignant en biologie à la retraite ajoute : "les interventions en période de nidification sont extrêmement dommageables. Le manque de tranquillité fera déserter les oiseaux".
 

"Le fait que les hommes arrivent sur l'île plus fréquemment, y fassent des travaux, naturellement, ça dérange les oiseaux", Gérard Debout, président du GONm

 

Bien consciente, l'association des Amis de l'Ile du Large Saint-Marcouf prévoit d'être attentive. "Il faut imaginer des zonages", rétorque Christian Dromard. Selon lui, de petits travaux d'entretien peuvent être menés dans les espaces, où les oiseaux ne nichent pas, comme la digue. 


Bientôt des touristes ?

"Ouvrir aux touristes ? Je n'en pense que du mal !", lance Gérard Debout excédé. "Je ne comprends même pas qu'on puisse encore - à notre époque - imaginer ce genre de projet", poursuit-il.

L'association des Amis de l'Ile du Large Saint-Marcouf, souhaite à l'avenir rendre l'Ile du Large accessible à tous. "Si on veut vraiment pousser la restauration, il faudra les moyens. Et ces moyens, on ne les obtiendra pas si l'île n'est pas ouverte au public", expose Christian Dromard.

Le projet inquiète les défenseurs de la biodiversité du GONm. "Il y aurait une pression constante sur l'île, ce qui conduirait à la désertion des oiseaux", s'insurge le sexagénaire Gérard Debout, président de l'association depuis 1986.

 

"L'ouverture au public ne va pas transformer l'île en 'MontSaint-Michel bis' !", Christian Dromard, président de l'association des Amis de l'Ile du Large



L'association des Amis de l'Ile du Large Saint-Marcouf modère cette idée. "Les visiteurs se compteront en douzaine par après-midi dans le meilleur des cas et en période chaude ! Ce n'est pas du tout perturbant : les experts sont tous d'accord là-dessus", rassure Christian Dromard.

Protéger les oiseaux ou les monuments historiques ? La préfecture de la Manche ne souhaite pas faire d'interview concerant cette délicate question. Elle reste discrète et se contente de communiquer : "L'Etat, propriétaire des Îles Saint Marcouf, recherche, avec l'aide des collectivités concernées et de ses interlocuteurs, un compromis permettant la préservation des enjeux tant naturels, (...) que culturels et patrimoniaux (...), dans le respect de la sécurité des personnes et des biens".
 Reportage de Stéphanie Potay et Marie Saint Jours

 
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