L'ultra-marathonien normand Stéphane Ruel, âgé de 54 ans s'était élancé le 9 juillet du Mont-Saint-Michel pour tenter un record inédit : courir 595 kilomètres en moins de 5 jours. Il a réussi ce dimanche soir son pari avec dix heures d'avance.
C'est un nouveau record que Stéphane Ruel peut accrocher à son palmarès personnel. L'ultra-marathonien normand de 54 ans est arrivé ce dimanche soir, peu avant minuit, au Mont-Saint-Michel avec dix heures d'avance sur ses prédictions. Trois jours plus tôt, le jeudi 9 juillet, il s'était élancé du même endroit pour tenter un pari : faire le tour de la Manche (son deuxième), par les terres, en moins cinq jours. Un pari plus que réussi puisque le sportif a avalé les 595 kilomètres du pracrours en 89 heures et 57 minutes.
?Arrivée?de Stéphane à 23h57’ ce dimanche soir 12 juillet 2020. Le tour du département de la Manche par la route , 595km et 6018D+ couru en 89h57’ (3j17h57’)?♂️?
Publiée par Pierre-Antoine Ruel sur Lundi 13 juillet 2020
Il s'ennuyait. Frustré comme un enfant enfermé en plein confinement... Pour cause d'épidémie de Covid-19, le championnat d'Europe de course à pied 24 heures prévu en septembre prochain a été annulé.
Alors Stéphane Ruel a décidé de se fabriquer sa propre épreuve : un tour de la Manche, 595 km de distance, 6.018 mètres de dénivelé positif cumulé.
Tout ça en perdant le moins de temps possible pour manger, boire et dormir... L'objectif symbolique est d'arriver pour le 14 juillet, jour de la fête nationale.
Le Manchois n'en est pas à son coup d'essai. Détenteur de plusieurs records (voir encadré ci-dessous), il s'était déjà fait remarqué en février en longeant les côtes de la Manche, d'Isigny-sur-Mer jusqu'au Mont-Saint-Michel, 435 kilomètres en 76 heures et 23 minutes, pour huit heures seulement de repos !
Les conditions hivernales étaient pourtant "dantesques", même pour un sportif très aguerri comme lui : des sentiers gorgés d'eau et des énormes rafales de vent.
Fatigué ? A peine, puisque 24 heures plus tard, il enfourchait son vélo pour s'offrir un tour de la Manche, "comme une reconnaissance du futur défi". Après le littoral, le tour complet. A ce rythme, on pourrait croire que ce n'est plus un homme de 54 ans, mais plutôt une machine, qui "repart naturellement après 5 heures de sommeil"...
Je me lève tous les jours à 3 h du matin. A 3 h 15, je suis prêt pour aller faire du vélo ou courir pendant deux heures, prendre une douche, et faire ma journée de travail.
Stéphane Ruel aime "manger du bitume" comme il dit. La route beaucoup plus que les petits sentiers de douaniers, avec les risques qui vont avec. "On a essayé, avec mon fils qui est mon entraîneur, de sélectionner les routes moins fréquentées par les voitures ; de plus, je cours toujours à contre-sens de la circulation."
Les petits détails qui font la différence
D'abord il y a l'alimentation, régulière et variée pendant l'effort.Il boit 70 cl par heure, d'une boisson pleine de "glucose et de proteines", et mange "un p'tit truc".
Toutes les 5 heures, quelque chose de plus consistant pour ne pas être écoeuré par les barres diététiques : "du riz avec du thon, un morceau de quiche ou de pizza, un riz au lait ou une banane en dessert. Mais pas trop non plus pour ne pas me sentir lourd en repartant courir".
Et puis il y a la foulée, SA foulée spécifique, rasante. "Je frole le bitume, à deux centimètres à peine." Sa vitesse varie selon la distance évidemment ; 12 km/h sur des courses de 24 heures, 14 km/h sur des marathons, entre 8 et 10 km/h sur des distances d'ultra comme là.
Dès que j'ai une pensée , je l'enlève pour ne pas être pollué. C'est comme une méditation, le corps sait où il doit aller
Enfin, faire le vide dans sa tête, ne penser à rien. "J'ai l'habitude de dire que je mets la tête sur mes épaules", en sourit-il. "J'ai le tracé GPS sur ma montre, je le suis et ne ne me pose pas de question. Mon équipe s'occupe de gérer mes ravitaillements à intervalles réguliers. Dès que j'ai une pensée, je l'enlève pour ne pas être pollué. c'est comme une méditation, le corps sait où il doit aller." Juste il avoue saucissonner mentalement son parcours par étapes.
Echange-t-il avec son fils et son frère, lors des pauses tous les 10-20 km ? "Ils me connaîssent par coeur, ils savent si j'ai envie de parler et debrieffer ou juste de me reposer."
Il faut aussi savoir ne pas se disperser, s'économiser un maximum et optimiser les moments de repos.
Si des amateurs qui le croisent veulent courir un peu pendant ce défi à ses côtés, "pas de problème, c'est sympa sur 1 ou 2 kilomètres, mais pas plus, car c'est en record en autonomie !" Et puis il ne sera pas là pour faire la discussion...
Des conditions météos favorables mais de grosses côtes
Le vent ? "20-30 km/h annoncé, ca va, c'était beaucoup plus en février."Les températures ? "21-22° c'est pas mal en journée, 12-14° la nuit c'est parfait pour récupérer au frais."
Le ciel ? "Un peu de pluie est prévue, bof je ne suis pas trop inquiet, c'est la Manche, je connais."
Ce parcours il l'a évidemment reperé, et sait où sera la difficulté. "Le départ dans le Sud-Manche il y a du relief sur les 200 premiers kilomètres près de Mortain et Saint-James. Ensuite c'est plus plat vers Carentan. Le plus dur sera vers le phare de Barneville car j'aurai déjà fait une plus de 400 kilomètres et les pentes vont faire mal."
Le risque de fatigue est évident, celui de blessure d'usure est tout à fait possible. "J'ai mal et je passe au travers. C'est la force de caractère qui me permet de tenir. Il faut serrer les dents dans ce cas, se dire que ça va partir dans 10 ou 20 kilomètres..."En cas de blessure, il faut serrer les dents, se dire que ça va partir dans 10 ou 20 kilomètres...
Une véritable machine on vous dit ! Vice-champion d'Europe des 24 heures toutes catégories, double médaillé d'or européen par équipes avec la France. Chez les 50-55 ans, ce directeur financier d'une fondation est tout simplement champion de France, d'Europe et du monde...
Ce tour de la Manche sera donc une nouvelle ligne à un palmarès très étoffé.
A suivre donc à partir de jeudi 6 h du matin, sur le facebook de son fils => Pierre-Antoine Ruel
Ses records :
- 10 km................: 37'46''
- Semi-marathon : 1h23'40''
- Marathon...........: 2h48'44'' au marathon de Paris en 2019
- 50 km................: 3h26'52" -Meilleure Performance Française M50-
- 100 km..............: 7h33'01'' - Record de Normandie Master 2 -
- 6heures.............: 83.688 km -RECORD DE FRANCE M50-
- 12heures...........: 147.481 km -RECORD DU MONDE M50-
- 24heures...........: 263.540 km -RECORD DE FRANCE M50-
- 48heures...........: 287.000 km