Les liaisons maritimes s’apprêtent à reprendre à compter du 28 avril vers les îles de Jersey, Guernesey, Sercq ou encore Aurigny. Les bateaux qui appartiennent au département de la Manche restent les mêmes mais la différence de poids tient aux formalités. Brexit oblige, le passeport est indispensable pour fouler les terres des bailliages anglo-normands. Un obstacle de plus, avec la crise sanitaire, à la reprise du trafic.
« Avec un passeport à 86 euros, ça risque de bloquer les voyageurs, qu’ils soient normands ou touristes », assène Claude Bastian. Le président de l’association de jumelage entre Barneville-Carteret dans la Manche et Jersey s’inquiète. Il poursuit son raisonnement : « si la fréquentation des lignes maritimes est insuffisante, leur avenir pourrait être remis en cause, l’opérateur DNO - qui vient d’être choisi pour faire naviguer les bateaux - pourrait se désinvestir rapidement, d’ici 2 ans. »
Pas de passeport pour les groupes scolaires
Ce scénario d’une « faillite financière » comme il la qualifie, peut sembler quelque peu anticipé. Mais la question s’est déjà posée au conseil départemental de la Manche. Ce dernier a obtenu pour les scolaires une dérogation auprès des autorités anglo-normandes lors du sommet annuel avec les îles anglo-normandes le 24 septembre dernier. En cas d’un aller-retour entre les côtes de la Manche et les îles anglo-normandes dans la journée, les élèves peuvent se contenter d’une carte d’identité en cours de validité.
" Pour ce qui est des groupes scolaires, on a déjà pas mal de réservations et c'est encourageant; les consignes du gouvernement de ne pas partir à l'étranger en 2022 n'ont pas été suivies à la lettre, c'est mieux pour nous", note Olivier Normand, co-fondateur de DNO, la compagnie maritime qui a remporté l'appel d'offres lancé par le département de la Manche. DNO va œuvrer sous le nom de Manche Iles Express, qui perdure donc.
« Ce qu’il faudrait, c’est que le conseil départemental négocie la dérogation concernant le passeport pour les adultes », estime encore Claude Bastian.
C’est une chose qui peut se régler facilement entre gens raisonnables, et c’est tout simplement vital
Claude Bastian
Le conseil départemental évalue que « seulement 60% des passagers adultes disposeraient d’un passeport, et 40% pour les mineurs ». Alors élargir la dérogation aux adultes, c’est une demande qui a déjà été formulée auprès des autorités des îles anglo-normandes. Et pour le moment, c’est le statu quo.
Pour le conseil départemental de la Manche, « même si elle devrait repartir à la hausse d’ici quelques années, une chute de la fréquentation est à prévoir. » Avant la crise sanitaire et celle du Brexit, le trafic se situait entre 100 000 et 140 000 passagers par an au départ des ports de Diélette, Barneville-Carteret et Granville.
DNO a largement revu la voilure à la baisse en sacrifiant 50% de ses rotations. Les 3 ports normands conservent tous des départs et arrivées de bateau en fonction des marées et des coefficients. Le président de la compagnie maritime s'efforce de voir l'avenir sous des auspices prometteurs: "C'est une année de reprise après deux ans d'arrêt, alors des incertitudes il y en a plein. Si le soleil est de la partie, les clients seront bien là, j'espère tous dotés de leur passeport."