Après 15 mois de fermeture à cause de la pandémie de Covid-19, les discothèques sont enfin autorisées à rouvrir, le 9 juillet. Un ouf de soulagement pour le monde de la nuit. Pourtant, dans la Manche et ailleurs en France, la majorité des établissement resteront clos. Explications et témoignages.
Cet été, dans la Manche, au mois 11 discothèques sur 18 garderont portes closes. Malgré la possibilité d'ouvrir leurs établissement dès le 9 juillet, la plupart des gérants du département normand estiment qu'il ne leur est pas possible de travailler dans des conditions acceptables.
C'est ma passion, ça fait 10 ans que je fais ça. On me dit d'ouvrir et je n'ouvre pas, je me dis "mais t'es pas bien en fait". Et après, la raison me rappelle et je me dis "c'est pas possible, je vais mettre ma société en péril à rouvrir.
Il y a 15 jours, lorsque le gouvernement a annoncé que les discothèques pourraient enfin rouvrir, les professionnels du secteur étaient partagés entre le bonheur d'un retour au travail et la prudence quant aux conditions d'ouverture. Leurs réserves portaient sur les modalités d'accueil des clients, et notamment du pass sanitaire.
En effet, avant d'entrer dans une boite de nuit, il faudra prouver que l'on n'est pas positif au Covid-19. Pour ce faire, il y a deux possibilités. La première, c'est le pass sanitaire, la preuve que l'on a bien reçu ses deux doses de vaccin depuis au moins 15 jours. Or, à l'heure actuelle, on estime que moins de 10% des 15-25 ans sont vaccinés. Il est clair que la majorité de cette population cible des discothèques ne le sera pas le 9 juillet. Sans pass sanitaire, il reste l'option du test nasal, réalisé soit en amont, soit sur place.
"Ca, on ne sait pas faire, ce n'est pas notre métier, justifie Maxime Villot. Et puis je nous vois mal installer une tente devant l'établissement, et dire aux gens qui n'auraient pas de justificatifs de tests négatif "allez là-bas, sous le barnum, faites un test, patientez quinze minutes, peut-être que vous pourrez rentrer ensuite". Non, ce n'est pas l'esprit de notre métier. On est là pour divertir, pas pour imposer des contraintes.
La peur du bide économique
Face à ces complexités d'accès, les gérants de night clubs craignent que la clientèle rebrousse chemin, ou se désagrège au fur et à mesure de l'été. "Ils ne vont pas retrouver ce qui leur faisait aimer les discothèques. S'ils viennent et découvrent une salle à moitié vide, pas sûr qu'ils aient envie de revenir le weekend suivant", se désole Didier Paour, patron du Kaluma à Cherbourg.
Devant les conditions d'accueil et l'incertitude de fréquentation, les dirigeants du Hope Club, du Kaluma, du Freedom, de la Cave du Roi, du Why Not et du Kintana, les six discothèques du Nord-Cotentin, se sont mis d'accord pour ne pas rouvrir cet été. Impensable pour eux de risquer la faillite.
Financièrement, ce n'est pas jouable. Les charges qu'on a repoussées depuis des mois vont retomber dès qu'on va rouvrir. Mais on ne sait pas si les clients seront au rendez-vous, ni si on aura la rentabilité pour faire face à nos dépenses.
Si leurs établissement demeurent clos cet été, les gérants de discothèques peuvent continuer à bénéficier des dispositifs d'aides financières de l'Etat jusqu'en septembre. Pourtant, malgré cette option favorable et face aux interrogations et complications, certains vont tout de même rouvrir dès que possible.
Il y a une différence entre les établissements qui se situent en centre-ville, qui ont une clientèle plutôt étudiante et présente de septembre à juin, et les établissements de bord de mer qui ont une activité saisonnière, concentrée sur l'été. A partir du moment où vous êtes en activité saisonnière, ça induit directement que vous faites à peu près la moitié de votre chiffre d'affaire sur une saison, deux ou trois mois, d'où l'intérêt vital de pouvoir rouvrir dès que possible.
Une chose est sure, tous, sans exception, envisagent la réouverture des clubs pour la rentrée de septembre. En espérant que d'ici-là, le variant delta ne se soit pas propagé dans le pays, générant une quatrième vague de contamination qui génèrerait à nouveau beaucoup d'interrogations.