La cour d'Assises de la Manche à Coutances se replonge jusqu'à vendredi prochain sur le meurtre du jeune Théo Perelle, tué d'un coup de fusil en mai 2019 dans le quartier de la Grande Delle à Hérouville Saint-Clair.
Ils étaient trois accusés en première instance dont l'auteur du coup de fusil selon le verdict. Sid Ahmed Hattabi (1), 23 ans a été désigné par certains comme le tireur. Il a toujours nié être l'auteur du coup de feu. Le 24 octobre 2022, après un procès à huis clos, la cour d'Assises du Calvados l'a condamné à 20 ans de réclusion criminelle sans que la préméditation n'ait été retenue. Deux autres jeunes hommes, présents lors du drame, avaient aussi été condamnés à trois ans de prison pour violences volontaires. Ce matin, l'audience s'est ouverte dans une atmosphère glaciale. Les trois accusés présents n'ont pas échangé un regard, se renvoyant mutuellement la faute.
Un mauvais regard qui a mal tourné
L’affaire aurait pris corps dans la nuit du vendredi 17 au samedi 18 mai.
J’ai croisé Théo Perrelle vers 23 h 30, place de l’Europe (à Hérouville). On s’est mal regardés. Je lui ai dit que j’allais revenir. J’étais un petit con à l’époque…
Sid Ahmed Hattabi, 23 ans, accusé du meurtre de Théo Perelle
Les deux passent leur chemin. Sid Ahmed Hattabi poursuit sa route vers le quartier du Grand-Parc. Il y retrouve des amis, dont deux de ses coaccusés âgés de 21 et 22 ans. Ils viennent d’arriver en voiture. Il leur parle de « l’embrouille » avec Théo et sa ferme intention d’en découdre, rapporte nos confrères de Ouest France.
« A ce moment, il (l’accusé de 22 ans) m’a proposé d’aller chercher une arme dans un garage, poursuit-il. Elle était dans un sac, je l’ai pris et placé dans le coffre. J’ai sorti l’arme du sac, je l’ai cachée sous mon manteau. Je suis monté en voiture. »
Le véhicule prend la direction de la Grande-Delle. En chemin, ils auraient récupéré le quatrième accusé, 20 ans, mineur au moment des faits. Ils garent la voiture près d’un centre commercial. Et rejoignent le lieu où Théo a retrouvé des amis, sous le porche d’un immeuble, Porte 14. « On est descendu de la voiture. Il (l’accusé de 22 ans) a chargé le fusil. On s’est scindé en deux groupes. »
À son arrivée devant Théo et ses amis, « j’ai tiré en l’air. Théo s’est avancé vers moi. J’ai fait de même. Je lui ai donné un coup avec le canon. » L’arme serait tombée au sol. Une bagarre éclate. Certains tentent de séparer les protagonistes. Théo tombe au sol. Un deuxième coup de feu retentit et atteint Théo au thorax. « Je l’ai vu tirer », assure Sid Ahmed Hattabi, en pointant du doigt celui qui aurait fourni l’arme.
Des versions divergentes
La version de ce dernier est bien différente.
Lorsque nous avons retrouvé Sid Ahmed au Grand-Parc, il s’est absenté quinze minutes. Il est revenu avec un sac. On était tous ensemble pour rejoindre le groupe de Théo. J’ai alors découvert la présence de l’arme. Sid Ahmed a tiré en l’air. Une bagarre a éclaté. J’ai moi-même donné un coup à Théo. Sid Ahmed a rechargé le fusil. Il a fait feu sur Théo alors qu’il tentait de se relever.
Deuxième accusé de 22 ans, condamné à trois ans de prison pour violences volontaires
Cette version n’est pas corroborée par l’accusé âgé de 21 ans.
Je n’ai pas vu qui a tiré la deuxième fois. Mais c’est bien lui (l’accusé de 22 ans) qui avait le fusil entre les mains à ce moment-là.
Le troisième accusé, condamné à trois ans de prison pour violences volontaires
L'arme n'a jamais été retrouvée. Théo était selon ses proches un garçon solaire et joyeux.
Ce matin, l'audience s'est ouverte dans une atmosphère glaciale. Les trois accusés présents n'ont pas échangé un regard, se renvoyant mutuellement la faute.
C'est lui qui échange ce fameux regard avec Théo, c'est lui qui se présente avec un fusil et qui tire en l'air. Maintenant, tirer en l'air et tuer, c'est pas la même chose.
Denis Giraud, avocat de la défense
Qui a tiré le coup de fusil à pompe qui a mortellement touché le jeune Théo ? C'est toute la question de ce procès. La famille redoute que ce procès n'apporte pas de réponse.
Au départ, on attendait des explications, le fait que les accusés puissent reconnaître et assumer leurs responsabilités, ça c'était en première instance. Je crois qu'on n'a plus grand espoir en appel que cela arrive, chacun défend sa position, on n'aura pas de grandes révélations dans ce dossier. On attend pour l'ensemble des accusés une déclaration de culpabilité.
Aline Lebret, avocate des parties civiles
Ces quatre jours de procès très denses permettront-ils de préciser le rôle de chacun dans ce drame ? Ce procès en appel donnera-t-il lieu à des aveux, permettra-t-il d'apporter davantage de réponses aux parties civiles ? Si la préméditation est retenue, les accusés encours la réclusion criminelle à perpétuité. Les plaidoiries de la défense et des parties civiles sont prévues jeudi. Le verdict est attendu ce vendredi.