Visés par une enquête préliminaire, les producteurs des carottes de Créances ont contesté, par le biais de leurs avocats, la gestion de la procédure par un référé. L'audience a eu lieu au tribunal administratif de Caen ce mardi 8 décembre 2020.
Les débats ont été houleux ce mardi matin 8 décembre 2020 au tribunal administratif de Caen. Les avocats des 14 maraîchers auditionnés pour avoir participé à l'importation et à l'usage d'un produit phytosanitaire interdit, le dichloropropène, ont contesté par un référé la gestion de la procédure.
Ils estiment notamment qu'elle "n’a pas laissé place au contradictoire", informe l'un des avocats d'un cabinet parisien, Yvon Martinet.
Plusieurs parcelles appartenant aux 14 maraîchers ont été placées sous scellés. Ils souhaitent y avoir de nouveau accès et demandent également la suspension de l’ordre de destruction des récoltes, "une décision irrémédiable, en attendant que l’affaire soit jugée sur le fond", précisent-ils.
De plus, ils réclament une indemnisation estimant que "l’État s’est placé en situation de « carence fautive » vis à vis des producteurs". Selon Me Yvon Martinet, "en modifiant les conditions de production de la carotte des sables alors qu’il n’existe pas encore d’alternative viable, l’état a mis les producteurs dans une impasse."
Dès la mise en vigueur de la réglementation française, la production de carottes des sables a connu une chute drastique, évaluée à plus de 38% entre les volumes obtenus pendant la période dérogatoire et ceux de la saison 2019-2020.
Problèmes de santé et effets à long terme
Début novembre 2020, le procureur de la République de Coutances annonçait que 14 maraîchers, 3 transporteurs et 3 importateurs-revendeurs-applicateurs ont été interrogés en garde à vue ou en audition libre et la plupart ont avoué avoir participé à l'importation et à l'usage du dichloropropène sur leurs terres.Le dichloropropène, interdit en France depuis 2018, est encore utilisé dans certains pays de l'Union européenne comme Chypre ou l'Espagne. C'est dans ce dernier pays que les maraîchers se le seraient procuré.
Ce produit phytosanitaire est utilisé pour détruire les nématodes, des petits vers qui se développent davantage dans le sable que dans la terre, et qui détériore la carotte de l'intérieur. La spécificité de la carotte de Créances étant qu'elle pousse dans des sols sableux dans le bassin de Créances, dans la Manche.
De son côté, l'État a rappelé que le dichloropropène est un produit phytosanitaire susceptible de provoquer des problèmes de santé chez l'être humain ainsi que des effets à long terme. Par ailleurs, l'administration a précisé que les maraîchers ont la possibilité d'accèder à leurs terres s'ils en motivent la demande au juge, réfutant ainsi l'argument de la partie adversaire.
Ce volet judiciaire au tribunal administratif devrait prendre fin rapidement puisque le tribunal devrait rendre sa décision lundi 14 décembre 2020 pour savoir si oui, ou non, la suspension de destruction doit être appliquée.