Michel Barnier, Premier ministre : que pensent les politiques normands de cette nomination ?

Il faisait depuis quelques jours office de favori au poste de Premier ministre. Après 51 sans gouvernement, c'est finalement à lui qu'incombera la tâche d'en constituer un nouveau. À la mi-journée, Michel Barnier a été officiellement choisi par Emmanuel Macron pour prendre la direction de Matignon. Tour d'horizon des réactions politiques en Normandie.

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C'est la fin de près de deux mois de tractations, de suspense et de noms lancés à la volée pour tester leur popularité dans les médias et la population.

Avec la nomination, à la mi-journée, de Michel Barnier, le flambeau de Matignon va donc passer du plus jeune Premier ministre de la cinquième République - Gabriel Attal - au plus âgé (73 ans).

Un visage bien connu des Français depuis ses débuts en politique en 1973, et très associé aux institutions européennes pour lesquelles il a souvent œuvré. 

"Félicitations chaleureuses"

Emmanuel Macron a surtout tenté de trouver un nom qui ne fasse pas immédiatement l'objet d'une motion de censure de la part de l'Assemblée nationale. Sa conclusion a été de désigner une personnalité issue de la droite (Les Républicains) au détriment du Nouveau Front Populaire.

De quoi satisfaire les Normands appartenant à cette partie de l'échiquier politique. 

Édouard Philippe, fraîchement déclaré candidat à la présidentielle 2027, s'est empressé d'adresser, sur X, ses "félicitations chaleureuses" avant d'ajouter "nous serons nombreux à l'aider".

Voilà une bonne manière de recoller les morceaux avec sa droite originelle, après le divorce provoqué en 2017 par sa nomination à Matignon et son ralliement à la Macronie. On n'a jamais trop d'alliés lorsque l'on se présente à une élection présidentielle, même à près de trois ans de l'échéance.

Hervé Morin s'est, lui, fendu sur X d'un plus sobre "Michel Barnier à Matignon. Il a pris ses responsabilités, c'est bien". Avant de déclarer avec une forme de défi : "Je lui souhaite de réussir à gravir la montagne budgétaire pour nous éviter le chaos". 

Dans une interview accordée à France 3 Normandie, le président de la Région Normandie a même précisé le fond de sa pensée : 

Il va surtout devoir s’attaquer à la montagne de déficits, la montagne de dettes qu’Emmanuel Macron et Bruno Lemaire ont laissée et qui met la France en grand danger, dans des dangers assez comparables à ceux qu’a connus la Grèce il y a quelques années.

Hervé Morin, président (UDI) de la Région Normandie

Dans les rangs de la majorité, cette nomination d'une figure de droite semble aussi ravir tout le monde. Au moins en apparence, pour ne pas fragiliser encore un peu plus la position du Président de la République. 

Stéphanie Yon-Courtin, députée européenne Renaissance originaire de la Manche, vante ainsi les mérites d'un "élu de terrain, rompu aux négociations les plus complexes (#Brexit) [...] Son expérience à forger des compromis est un atout précieux dans un contexte politique de particulier de coalition."

Jérémie Patrier-Leitus, député Horizons de la 3e circonscription du Calvados, ajoute même que "son expérience et sa hauteur de vue devraient être des atouts pour rassembler les Français.

"Un déni de démocratie" 

À gauche, évidemment, c'est un tout autre refrain. Pour tous les partisans du Nouveau Front Populaire, c'est un désaveu du résultat de l'élection législative du début de l'été.

Les électeurs ont exprimé avec force une demande de changement, et Macron ressuscite le RPR avec un Premier ministre qui a passé suffisamment de temps en politique pour avoir voté contre la dépénalisation de l'homosexualité et contre le remboursement de l'IVG par la Sécurité sociale.

Emma Fourreau, députée LFI au Parlement européen, originaire de Caen

Pour l'élue européenne, la gauche doit se mobiliser "pour faire entendre sa voix par tous les moiyens constitutionnels et démocratique à sa disposition. Et notamment la proposition de destitution.

Nicolas-Mayer Rossignol, maire (PS) de Rouen, fustige lui aussi un "déni de démocratie". "Aux élections qui est arrivé en tête ?, embraye-t-il. C'est la gauche. La droite républicaine ou la droite macroniste ont été désavouées. Le parti de Monsieur Barnier a fait moins de 10%. Donc cette nomination est un vrai scandale démocratique".

Nicolas Mayer-Rossignol va même plus loin. Selon lui, le nom de Michel Barnier est le fruit d'un compromis réalisé entre Emmanuel Macron et le Rassemblement National. 

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Réaction de Nicolas Mayer Rossignol à la nomination de Michel Barnier ©Stéphane L'Hote


Une interprétation qu'il n'est pas le seul à faire dans sa famille politique. 

Avec la nomination annoncée de M. Barnier comme PM (Premier ministre), Emmanuel Macron commet une lourde erreur. Élu par le front républicain, il cède au chantage du RN et à la droite dure. La gauche devait tenter de former un gouvernement, le PR a préféré contourner la logique républicaine.

Arthur Delaporte, député PS de la 2e circonscription du Calvados (sur X)

Et qu'en disent les élus RN normands justement ? Contacté par téléphone, Guillaume Pennelle, conseiller régional de Normandie, et délégué départemental du parti en Seine-Maritime, se montre plutôt satisfait :  "Michel Barnier, on le connaît, ce n’est pas un lapin de six semaines et contrairement à Xavier Bertrand, il n'a jamais tenu de propos déplorables à l'égard du Rassemblement National".

Des positions très conservatrices sur l'immigration

Michel Barnier, RN-compatible ? C'est en tout cas ce que suggèrent quelques prises de paroles récentes de l'ancien vice-président de la Commission européenne. 

Lors de la primaire de droite pour la présidentielle 2022, Michel Barnier avait notamment repris à son compte une mesure venue de l'extrême droite pour un moratoire sur l'immigration. L'année suivante sur France Culture, il avait par ailleurs déclaré : "L'extrême droite n'a pas le monopole des débats sur l'immigration."

Pour Guillaume Pennelle, ce nom est en tout cas de nature à ce que "le RN ne demande pas immédiatement de motion de censure pour faire tomber le gouvernement dès sa nomination. Ce qui aurait été fait avec un Premier ministre du Nouveau Front Populaire, ou avec Xavier Bertrand". 

Bref, Emmanuel Macron vient peut-être de trouver l'un des seuls noms faisant consensus auprès de deux des trois blocs constituant l'Assemblée nationale. 

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