Bras de fer entre la ville d'Alençon et le cirque Zavatta : la loi autorise toujours les animaux sauvages

Le cirque Claudio Zavatta doit donner six représentations à Alençon cette semaine. Mais la ville vient de s'opposer à l'installation de la troupe en raison de la présence d'animaux sauvages. Nombre de communes ont pris ce type de décisions ces dernières années, malgré un flou juridique.

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La troupe Claudio Zavatta et ses 17 semi-remorques devaient s'installer ce lundi 11 octobre sur le parc Anova à Alençon pour y planter son chapiteau. La première des six représentations programmées devait avoir lieu ce mercredi 13 octobre. Mais le lever de rideau sur la piste aux étoiles semble aujourd'hui incertain. Quelques jours seulement avant l'arrivée du cirque, la ville d'Alençon a décidé d'y apposer son véto. Motif invoqué : la présence d'animaux sauvages, une présence que la collectivité dit avoir découvert sur les affiches et prospectus publicitaires du sepctacle.

La décision de la commune ornaise est loin d'être une première en France. Selon l'association Code animal, 437 communes (dont 116 de plus de 10 000 habitants) auraient "pris position pour des cirques sans animaux". Certains élus, comme le maire de Beauvais, ont même appelé à signer la pétition lancée par l'association 30 millions d'amis "Pour des cirques sans animaux sauvages". Cette dernière a jusqu'à présent recueilli plus de 340 000 signatures.

Du côté du cirque, c'est la colère et la stupéfaction. La troupe dit avoir envoyé sa demande en novembre 2020, soit il y a près d'un an, et avoir obtenu l'autorisation le 27 septembre dernier. Au beau milieu d'une tournée dans tout le pays, la troupe ne voit pas comment bousculer son planning à la dernière minute. Et surtout, elle ne comprend pas que la présence d'animaux sauvages pose problème, un sujet sur lequel la municiplaité ne lui aurait jamais posé de question. Elle n'entend pas céder aux injonctions de la ville et compte se retourner vers la préfecture. Laquelle a donné son accord ce lundi après-midi à l'installation du cirque Claudio Zavatta.

Trouble à l'ordre public ?

Car aujourd'hui, aucune réglementation n'interdit à un cirque de de présenter des numéros auxquels participent des animaux sauvages. Leur détention et leur utilisation dans des spectacles itinérants est certes strictement encadrée, mais pas prohibée. Le sujet est pourtant devenu ces dernières années un des combats majeurs des associations de protection animale. Et cette cause rencontre de plus en plus un écho positif au sein de la population française, poussant certains maires à prendre des arrêtés pour interdire ce type de spectacle dans leur commune.

Pour ce faire, les élus locaux s'appuient sur l'article L.2212-2 du Code général des collectivités territoriales qui fixe les pouvoirs du maire en matière de police sur son territoire, notamment "le maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblements d'hommes, tels que les foires, marchés, réjouissances et cérémonies publiques, spectacles, jeux, cafés, églises et autres lieux publics." Mais cet article ne peut être invoqué n'importe comment : son utilisation doit être circonstanciée (adaptée à un contexte particulier) et proportionnée.

La justice administrative retoque les maires

Et à plusieurs reprises, la justice administrative a retoqué des arrêtés visant à interdire des spectacles d'animaux sauvages dans des communes et estimé que l'usage de l'article L.2212-2 était abusif. En juillet dernier, le tribunal administratif a ainsi donné gain de cause à l'association de défense des cirques de famille contre la ville de Clermont-Ferrand. L'arrêté, pris le 2 octobre 2020, imposait une "interdiction générale" de toute installation de cirques avec des animaux dans la capitale auvergnate. Le tribunal estimait que la commune n'était pas compétente pour prendre ce type d'interdiction constituant "une atteinte disproportionnée à la liberté du commerce". 

Quatre ans plus tôt, le tribunal administratif de Bordeaux avait déjà jugé qu'une "interdiction générale et absolue excède les nécessités de l'ordre public". En 2020, à Toulon, la justice administrative a également considéré que le bien-être animal (les conditions de détention par exemple) ne relevait pas de la garantie de l'ordre public dont le maire a la charge. A Lyon, la même année, le tribunal a estimé que "les conditions générales de captivité des animaux dans les cirques et les conséquences du dressage sur leur comportement, invoquées par le maire (ndlr : de la commune de Divonne-les-Bains, dans l'Ain), ne suffisaient pas à justifier d’un péril grave et imminent, l’autorisant à intervenir seul dans cette matière."

Une interdiction pas encore fixée dans la loi

Cette interdiction des animaux sauvages dans les cirques étaient l'une des mesures phares de la proposition de loi contre la maltraitance animale en débat au parlement depuis le début de l'année. Le texte a été adopté à une très large majorité au mois de février par l'Assemblée nationale. Avant de subir plusieurs modifications lors de son passage au Sénat il y a quelques jours.

Dans le texte adopté par la chambre haute, plus d'interdiction d'animaux sauvages dans les cirques (tout comme dans les delphinariums). A la place, la Sénat introduit la mise en place d'un conseil du bien-être des animaux itinérants, composé de "personnalités qualifiées en matière de recherches scientifiques (sur le sujet), d'un vétérinaire de la faune sauvage, de représentants du ministère "chargé de la protection de la nature" mais aussi du ministère de la Culture, des élus locaux, du monde circassien et des associations de protection animale. Ce conseil rendrait chaque année un rapport au ministre de l'environnement, lequel s'appuierait sur ce document pour établir, par arrêté, une liste des "espèces non domestiques" interdites dans les spectacles.

Le texte doit désormais être examiné en commission mixte paritaire. Faute d'accord entre députés et sénateurs sur un texte, le dernier mot reviendra à l'Assemblée nationale.

 

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