L’inclusion des personnes handicapées : un défi de taille pour les professionnels du médico-social

Mardi 1er octobre 180 salariés de l’Adapei de l’Orne manifestaient devant le siège de l’association près d’Alençon. En cause : la réorganisation de leur temps de travail. Un bouleversement dû aux objectifs du quinquennat d’Emmanuel Macron.

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C’est une priorité du gouvernement. Un chantier, piloté directement depuis Matignon. Permettre aux personnes en situation de handicap d’étudier dans une école comme une autre, ou de travailler au sein d’une entreprise comme n’importe quel autre salarié. C’est ce qu’on appelle l’inclusion sociale.

Problème : il s’agit là d’une remise en cause totale de l’organisation des structures qui prennent en charge les personnes handicapées. Dans l’Orne, cette décision accentue le malaise des personnels du médico-social qui ont déjà le sentiment de travailler avec toujours moins de moyens.

Pour Sébastien Labbé, délégué CGT de l’Adapei de l’Orne,

« l’inclusion est impossible à mettre en place dans le département. Tous les enfants déficients mentaux ou autistes ne peuvent pas être intégrés dans une école ordinaire. Certains peuvent avoir un comportement violent par exemple. Et qui va les encadrer ? ».


Idem pour les adultes dans les entreprises. Selon le syndicaliste, «  les entreprises ne sont pas structurées pour accueillir ce public. Il va falloir créer des postes adaptés » Au 1er janvier 2020, les sociétés de plus de 20 salariés devront pourtant employer 6% de travailleurs handicapés. A l’échelle nationale, cela devrait représenter quelques 100 000 emplois supplémentaires.


Des objectifs très ambitieux


L’Adapei de l’Orne (Association départementale de parents et d'amis des personnes handicapées mentales) a pour mission d’accueillir, d’accompagner et de donner du travail à quelques 1200 personnes en situation de handicap. Elle emploie 800 salariés et génère 1600 feuilles de paie avec les contrats intermittents des personnes handicapées. C’est l'un des plus gros employeurs du département.

L’association gère des Esat (établissement et service d'aide par le travail), qui emploient des personnes handicapées, mais aussi des foyers d’hébergements, des IME (instituts médico-éducatifs)… Pour le président de l’Adapei, Thierry Mathieu, l’inclusion sociale est une bonne chose mais cela engendre un bouleversement de l’organisation du travail :

« Nous sommes un des principaux acteurs de l’accueil d’enfants en situation de handicap sur le département de l’Orne. Le virage inclusif est actuellement incompatible avec le statut de nos personnels tel qu’il existe. C’est une réalité »


L’inclusion scolaire par exemple demande un accompagnement plus important des enfants handicapés. Et les objectifs du gouvernement sont ambitieux. Aujourd’hui, selon l’Adapei, dans l’Orne 20% des enfants handicapés sont éduqués dans une école ordinaire. En 2020, cela concernera 50% des enfants, et 80% en 2022.
 

« Il y a des enfants et des familles dont les besoins d’accompagnement sont de 365 jours par an. Dans l’Orne, nous sommes très loin du compte. On est en moyenne sur 177 jours par an. Si les besoins augmentent il faut qu’on y réponde. Sinon, nous perdons de vue le sens de notre mission »


 

 

Travailler plus…


L’Adapei de l’Orne, qui a rencontré ces dernières années de grosses difficultés financières, est sorti de la zone rouge. Mais ces nouveaux objectifs vont lui demander encore plus d'efforts. C’est pourquoi, la direction remet en cause aujourd’hui un accord d’entreprise datant de 1999, au moment du passage aux 35 heures :
 

« Ces dernières années, nous avons masqués ce débat là sur l’organisation du temps de travail en regroupant les structures, en mutualisant. Cet accord a 20 ans. Nous ne sommes plus dans le même contexte de politiques publiques et de financements. Et ce n’est pas le prochain projet de financement de la sécurité sociale qui va nous rassurer. Il faut bouger. »


Le projet prévoit de supprimer les congés supplémentaires de certains salariés pour les harmoniser sur l’ensemble du personnel. Selon la CGT, cela reviendra à travailler 1607 heures par an contre 1582 aujourd’hui. Le nouvel accord prévoit une compensation financière sous forme de tickets restaurants ou d’aides à la mutuelle. Inacceptable pour Sébastien Labbé : « on veut nous faire travailler plus avec le même salaire ».

Pour Pauline Lampérière, secrétaire générale de la CFDT Santé sociaux de l’Orne, la situation est critique. Elle dénonce un management autoritaire et une « arnaque ». Depuis plusieurs mois, les congés maladies s’enchaînent du côté du personnel. La CFDT, syndicat majoritaire de l’Adapei, ne dispose même plus de délégué syndical, lui aussi en arrêt. Salariés et direction ont 13 mois pour s'entendre sur un nouvel accord d'entreprise.

Reportage de Nicolas Corbard et Guillaume Le Gouic:

 

 
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