L'hôpital d'Alençon (Orne) est à son tour contraint de baisser le rideau des urgences pédiatriques le soir après 18h. Les médecins ne sont plus assez nombreux pour assurer les gardes. Les patients doivent désormais appeler le 15, ou attendre la réouverture des urgences le lendemain matin à 9h...
La décision a été prise la mort dans l'âme. À compter de ce 1er mai, le service de pédiatrie du centre hospitalier d'Alençon ne peut plus prendre en charge les urgences durant la nuit. "Nous étions six médecins en équivalent temps plein. Nous ne sommes plus que trois, explique le docteur Zakaria qui dirige le service. Si on veut respecter le temps de travail et les récupérations obligatoires post-gardes, c'est absolument impossible d'assurer les urgences".
"Pour un hôpital public, ce n'est pas acceptable"
La nouvelle a déjà fait le tour couloirs de l'hôpital. "C'est quand même inquiétant, dit une maman derrière une poussette. Les enfants ne savent pas toujours s'exprimer et il faut parfois réagir très vite. Mais même quand on vient le jour, ce n'est pas simple. On sent bien que c'est surchargé".
En fermant les urgences le soir, les médecins du service de pédiatrie peuvent se concentrer sur leur travail en journée. "La nuit, nous sommes désormais d'astreinte, explique le docteur Zakaria. Nous ne sommes pas sur place, mais nous pouvons être appelés en cas d'urgence. En étant d'astreinte chez nous, cela nous permet de venir travailler le lendemain."
Désormais, à partir de 18h, il faut appeler le 15 où un médecin régulateur apprécie la situation au téléphone. "Si cela peut attendre, il conseillera de venir le lendemain matin à partir de 9h".
Cette fermeture nocturne passe mal parmi le personnel. "Pour un hôpital public, ce n'est pas acceptable. On doit assurer la permanence des soins et nous ne répondons plus à cette mission, déplore Pascal Lamarche, le délégué CGT de l'établissement. Nous rencontrons de grosses difficultés pour recruter. Les médecins manquent. Or on ne rouvrira que si on arrive à faire venir quelqu'un".
"Nous nous sentons très seuls"
Derrière son bureau, le docteur Zakaria a les traits tirés. "C'est difficile à vivre. Il y a dix ans, nous nous sommes battus pour avoir des urgences en pédiatrie. C'est une difficulté morale et psychologique de se dire qu'on va maintenant fermer à parti de 18h".
C'est la première fois qu'on n'a pas d'interne ce semestre. Nous ne sommes pas aidés par nos dirigeants et par la Faculté pour faire venir des médecins. Nous nous sentons très seuls.
Docteur ZakariaChef du service de pédiatrie à l'hôpital d'Alençon
Le médecin est amer et inquiet. "Voilà treize ans que je suis là, c'est la première fois qu'on ferme et malheureusement, on n'est pas les seuls. Vous vous rendez compte ? Entre Le Mans et Caen, il n'y a plus de services d'urgences pédiatriques ouverts la nuit. Tout est fermé. C'est dommage d'en arriver là..."