Un manuscrit du Mont-Saint-Michel devait être adjugé aux enchères à Alençon dans l’Orne le 5 mai prochain, mais l’Etat a demandé l’annulation de la vente de cette pièce exceptionnelle qu’il considère comme son bien.
« C’est un peu la sensation de celui qui découvre un trésor ». Maître Patrice Biget ne se remet par de cette bonne surprise. Il y a quelques mois le propriétaire de ce manuscrit, résidant dans le grand ouest et souhaitant rester anonyme, amenait au commissaire-priseur d’Alençon, spécialisé dans la vente d’objets religieux, ce manuscrit du XIIe siècle.Il s’agit d’un ensemble de textes rédigés à plusieurs mains entre le début du XIIe siècle et le XIIIe siècle au sein du scriptorium du Mont-Saint-Michel.
On y trouve la prose en latin de Saint-Aubert, l’Evêque d’Avranches et fondateur de l’abbaye du Mont-Saint-Michel, un poème, un traité de géographie, ainsi qu’un traité de musique. Le tout dans un état de conservation exceptionnel.
L’adjudication devait avoir lieu le 5 mai prochain à l’étude d’Alençon. Une vente exceptionnelle, aucun manuscrit du Mont n’ayant été cédé depuis 150 ans. Le prix d’appel était de 50 000 euros, mais aurait-dû atteindre quelques centaines de milliers d’euros en raison de sa rareté.
L'Etat conteste la vente
Seulement voilà…l’Etat a montré les dents. Maître Biget a reçu un courrier recommandé émanant du ministère des affaires culturelles qui interdit la vente. Pour le ministère, ce manuscrit appartient à l’Etat comme les autres manuscrits du scriptorium.
Mais selon les experts en histoire de l’art, et maître Biget, ce n’est pas si simple. Car, après recherches, ce manuscrit n’a pas été tamponné comme les autres au moment de la Révolution française. De plus, il n’apparaît pas dans les inventaires ultérieurs de 1801 et 1820. Il aurait donc été substitué avant, et légalement ne ferait pas partie du domaine public.
Pour Didier Rykner, rédacteur en chef à http://www.latribunedelart.com/ , la méthode du ministère est scandaleuse : faute de moyens « l’Etat est tellement incapable d’acheter des œuvres importantes qu’il a trouvé cette méthode assez peu élégante de revendiquer des œuvres qui ne lui appartient pas ».
Les représentants de l’Etat n’ont pas donné suite à nos sollicitations. Maître Patrice Biget devrait faire appel de cette décision devant le tribunal administratif de Paris.
VIDEO: Reportage France 3 Normandie de Damien Migniau et Nicolas Corbard. Intervenants: Maître Patrice Biget, commissaire-priseur à Alençon / Didier Rykner: rédacteur en chef de "La Tribune de l'Art.com"