Une centaine de personnes ont de nouveau manifesté ce mercredi 29 janvier à Argentan contre la réforme des retraites. Parmi elles, Maud, cheminote, 25 jours de grève depuis le début du mouvement. Un combat qu'elle estime juste mais difficile à mener.
Plusieurs organisations syndicales appelaient ce mercredi 29 janvier à une nouvelle journée nationale interprofessionelle de mobilisation contre la réforme des retraites, la huitième depuis le début du mouvement le 5 décembre dernier. À Argentan, ils étaient une centaine ce matin à défiler dans les rues pour exprimer de nouveau leur opposition au projet du gouvernement. "C'est important de se montrer, de dire qu'on n'est pas d'accord, que ça ne va pas passer comme ça", explique Maud.
Depuis le 5 décembre dernier, la jeune trentenaire en est à 25 jours de grève. Voilà six ans qu'elle travaille comme agent de circulation, sur les postes d'aiguillage, à la SNCF. "Je n'ai pas choisi d'être cheminote pour être, comme je l'entends partout, "en retraite à 55 ans", je ne savais même pas que ça existait." C'est un peu par hasard que Maud s'est retrouvée dans les chemins de fer, en répondant à une annonce sur le bon coin. Elle est la première cheminote de sa famille.
"On n'a pas des salaires mirobolants"
Pas de réelle vocation donc ni la recherche d'un statut privilégié. Et ce d'autant plus que la jeune femme est "réserviste", en CDI mais sans affectation précise. "On a des horaires décalés, on travaille les jours de fête, les weekends. On se lève à 4 h 30 pour bosser à 5 h 30, on rentre à 21 h - 22 h. Et puis après, il y a le gel des salaires depuis un certain temps, on n'a pas des salaires mirobolants", raconte Maud.Alors, pour la jeune femme, "pas question que j'aille travailler jusqu'à 67 ou 69 ans". Si Maud dit comprendre "qu'il faut universaliser les régimes", le projet du gouvernement va, selon elle, dans le mauvais sens, quel que soit le statut ou le métier. "Il y a des gens qui rentrent tard sur le marché du travail, comme mon frère et ma soeur qui font des études. Monsieur Macron dit que les boulots étudiants vont rentrer dans le calcul des retraites mais mon frère et ma soeur n'ont pas les moyens de travailler à côté. Je le fais pour eux, pour mon fils qui ne sera peut-être pas cheminot demain, pour tout le monde."
"ma vie de maman à gérer à côté"
Et pourtant, cette grève a pour Maud et sa famille un coût. Financier tout d'abord. Son conjoint travaille lui aussi à la SNCF. A eux deux, ils cumulent 60 jours de grève. Deux mois de salaire en moins. "Il faut tenir, on s'arrange". Le couple a mis de l'argent de côté en prévision du mouvement. "On ne peut pas dire que c'était une surprise, ça faisait un moment qu'on en parlait de la retraite, de ce qui allait se passer, alors on a anticipé", raconte la jeune maman d'un petit garçon de deux ans et demi, "Après, on se serre la ceinture, on ne partira pas en vacances cet été mais il faut bien que quelqu'un le fasse."Tenir financièrement donc mais aussi psychologiquement et c'est sans doute le plus "compliqué", confesse Maud. "Au bout d'un mois, on est plus irritable. On entend des choses dans les médias, chez les gens...Je n'ai pas que ma vie de cheminote, j'ai ma vie de maman à gérer à côté. Des fois c'est éreintant. Et quand j'entends que je suis une fainéante et que ça m'arrange bien de faire grève, c'est un peu difficile à entendre. Perdre 1500 euros par mois, ce n'est pas agréable. Ça ne l'est pour personne."
Si Maud n'a pas embrassé la carrière de cheminote par vocation, elle y trouve pourtant, dans ces moments difficiles, des motifs de satisfaction. "À Argentan, les cheminots sont une famille. On se soutient et ça fait du bien."