Une unité mobile dentaire sillonne le département de l'Orne pour les personnes âgées et handicapées

Le centre hospitalier d'Argentan a lancé au printemps dernier une unité mobile dentaire. La dentiste Sophie Akimoff et son assistante se déplacent chaque lundi avec leur matériel en Ehpad ou en institut pour personnes handicapées.

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Comme chaque lundi, depuis le mois de mai dernier, Sophie Akimoff et une assistante dentaire délaissent le centre hospitalier d'Argentan pour prendre la route. La destination du jour : l'Ehpad de l'Aigle, à soixante kilomètres. Dans une pièce qui sert habituellement à prodiguer des soins esthétiques aux résidents, les deux femmes installent leur matériel : un gros fauteuil où s'assiéront les futurs patients et tout le nécessaire, notamment la fraise tant redoutée, entreposé dans plusieurs malettes.

"Aujourd'hui, on a pas mal d'espace", se réjouit la dentiste, "L'autre jour, on est allé dans une maison de retraite où c'était beaucoup plus petit. Et qui plus est, c'était un espace entièrement vitré et de passage. Les gens passaient autour du patient qui était en plein soin. Ce n'est pas forcément les conditions idéales."

Renforcer la ceinture abdominale

En une demie-heure, le cabinet de dentiste est prêt à ouvrir ses portes. Madame André sera la première. Au programme : un petit détartrage et l'extraction d'une dent sur le point de tomber. L'octogénaire se laisse manipuler sans rechigner. Pour autant, Sophie Akimoff doit se livrer à quelques contorsions. "Ce sont des patients assez âgés, ils ne peuvent pas forcément basculer leur tête complètement en arrière, donc c'est à nous de compenser. Faut penser à renforcer la ceinture abdominale", indique la dentiste, sur le ton de la plaisanterie, "Plus d'une journée par semaine, ce se ne serait pas jouable sur le long terme."

Ce projet d'unité mobile dentaire imaginé par Sophie Akimoff a été validé par l'Agence Régionale de Santé en décembre 2019. Mais en raison de la crise sanitaire, celui-ci n'a pu véritablement démarré qu'en mai de cette année, soit deux ans plus tard. Depuis 2016, la dentiste prodiguait déjà, dans les locaux du centre hospitalier d'Argentan, des soins aux résidents d'une structure de la ville. Une première expérience positive en termes de santé pour ce public. "Ce sont des patients que je voyais au bloc opératoire tellement il y avait de soins à faire et sur quatre ans où nous avons travaillé très régulièrement avec les équipes encadrantes, nous avons réussi à obtenir une excellente hysgiène bucco-dentaire de l'ensemble des résidents.

Du matériel utilisé dans l'humanitaire

Une première expérience qui a poussé la dentiste à s'aventurer dans des territoires plus éloignés, dans un département confronté à une pénurie de praticiens. "C'est plus de confort pour les patient et surtout une prise en charge, là où la majorité baisse les bras parce que quand ils appellent et que c'est en urgence, malheureusement on leur dit qu'il n'y a pas de place, qu'il faut attendre six mois ou même qu'on ne prend pas de nouveaux patients." La jeune femme prend alors contact avec Mobidents, l'unité mobile dentaire lancée par la Croix Rouge dans le Calvados. Laquelle lui apporte son expertise et l'oriente notamment vers du matériel utilisé dans des opérations humanitaires.

Pour sa première année d'existence, le budget de fonctionnement de l'unité mobile dentaire d'Argentan est de 63 000 euros. Sur les trois premiers mois (mai, juin et juillet), elle a déjà réalisé pas moins de 140 consultations. "L'idée, c'est d'intervenir sur un minimum d'établissement de sorte à assurer des soins corrects", souligne Sophie Akimoff. Alors la dentiste et son équipe se consacre chque mois à un seul établissement durant quatre lundis. Le premier est consacré en quelque sorte à un état des lieux, un bilan des soins à effectuer et planifier lors des semaines suivantes.

Attention aux accès de violence

Pour ce faire, Sophie Akimoff s'appuie sur des référents dentaires, des relais au sein des établissements visités qui sont chargés d'identifier les besoins de soins et d'assurer un suivi après le passage de la dentiste. "On a fait en sorte de travailler avec le Réseau de service pour une vie autonome (RSVA) dans lequel on fait des formations, pour des aides-soignants, mais aussi des éducateurs, des infirmiers ou des médecins", explique la dentiste, "Faire un soin de bouche, ce n'est pas quelque chose qui est correctement appris au cours des formations initiales. Ce n'est pas évident de mettre la main dans la bouche de quelqu'un, surtout quand la personne est réticente. Et une personne handicapée peut l'être. Une personne âgée qui commence à avoir des démences l'est tout autant et peut avoir des accès de violence.

Réduire le plus possible le stress de ces populations fragiles, c'est aussi la philosophie de l'unité mobile dentaire. "Ils sont dans des lieux qu'ils connaissent, ils viennent tout au long de la journée se rassurer en vérifiant qui nous sommes, quel est le matériel que nous utilisons, dans une salle qu'il connaissent. C'est très confortable pour eux", raconte Sophie Akimoff. Avant d'ajouter : "Il y a quelque chose d'intime, on rentre un peu dans une famille. Ce n'est pas partout comme ça, mais il y a quelque chose qui amène une proximité, il y a un lien familial qui se crée". Et de demander, dans un grand sourire, à sa coéquipière du jour : "on en a fait combien des calins ?"

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