Premier bras de fer à l'usine Marelli avant la fermeture programmée à Argentan, début 2024

Les salariés du sous-traitant automobile ont appris mardi 4 octobre que l'usine d'Argentan fermera en début d'année prochaine. Un mouvement de grève a suivi cette annonce. Les premières négociations du Plan de Sauvegarde de l'Emploi (PSE) doivent débuter le 12 octobre.

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Voilà déjà plusieurs mois qu'ils redoutaient cette fermeture. En janvier dernier, les salariés de l'usine Marelli d'Argentan avaient été en grève durant 22 jours. Ils soupçonnaient un projet de délocalisation de l'activité en Slovaquie. Le travail avait repris après que la direction se soit engagée à maintenir la production sur le site d'Argentan jusqu'en janvier 2024.

Le 19 septembre dernier, l'annonce de la fermeture du site Marelli Crevalcore Italie, l'un des principaux fournisseurs de l'usine argentanaise, a alerté les syndicats, qui ont vu leurs craintes se confirmer ce mercredi 4 octobre. C'est en milieu de matinée que les représentants des salariés ont appris l'ouverture d'un Plan de Sauvegarde de l'Emploi.

Début 2024, le site ouvert à Argentan en 1970 fermera ses portes. 167 personnes sont concernées. "La décision de Marelli est politique et pas économique", dénonce Jean-Philippe Fresny, délégué syndical CGT, "Le protocole (conclu en début d'année avec la direction) nous a permis de faire faire des analyses par trois cabinets comptables différents. Ils ont tous dit : Argentan, c'est viable, c'est très compétitif, il n'y a aucune raison de faire les corps papillons (une pièce de moteur) d'Argentan en Slovaquie ou en Chine."

28 millions de pertes sur 4 ans, selon la direction

La direction, elle, invoque pourtant des motifs économiques. "Entre 2018 et 2022, le site a généré une perte cumulée de plus de 28 millions d'euros. Et le marché européen des voitures est en train de se comprimer. Aujourd'hui, sur huit voitures achetées, une seule est neuve et sept le sont d'occasion", a-t-elle déclaré à l'AFP. L'entreprise, rachetée en 2019 par un groupe japonais détenu par le fond d'investissement américain KKR, a également annoncé ce mardi 4 octobre la fermeture d'une usine à
Saint-Julien-du-Sault, dans l'Yonne, employant 125 personnes.

Très rapidement, un mouvement de grève s'est enclenché sur le site d'Argentan. La direction recensait au deuxième jour, ce jeudi 5 octobre, 165 grévistes sur les 167 salariés. "On banalise souvent les fermetures d'entreprise en disant : économiquement, c'est normal", déplore Jean-Philippe Fresny, "Mais on ne pense pas à ce qu'il y a derrière et tout ce qu'il y a derrière, c'est de 'l'individu. Il y a des gens qui vont peut-être perdre leur plan de vie, leur compagne, leur maison parce qu'ils ont perdu le droit d'avoir un salaire." Les représentants des salariés ont demandé une prime de reprise d'activité pour mettre fin à la grève.

La proposition de la direction a été acceptée ce vendredi matin par les salariés (à 95%) lors d'une assemblée générale. Les syndicats n'ont pas souhaité communiquer sur le montant de cette prime "d'assiduité". Selon nos informations, elle s'élèverait à 1000 euros bruts par mois durant trois mois. Les salariés s'engagent à reprendre le travail lundi prochain et poursuivre leur activité durant les négociations du PSE.  "Faut pas trop tirer sur la corde non plus. À un moment donné, on sait qu’on ne peut pas avoir plus et qu’on n’est pas les seuls", commentait à la sortie de l'usine une salariée, "C'est bien quand même. Enfin, façon de parler. Quand on dit bien....36 ans de boîte, c’est sûr que ça fait un coup dur."

Un nouveau coup dur pour Argentan ?

Un premier bras de fer, donc, avant l'ouverture des négociations du PSE programmée le 12 octobre prochain. La direction affirme chercher un repreneur pour le site d'Argentan, un engagement qui figurait déjà dans le protocole conclu en début d'année. Les représentants des salariés n'y croient plus. "On est assez en colère parce qu’il y avait des engagements de pouvoir travailler à la reprise avec un repreneur. On le voit bien aujourd’hui : il n’y a pas eu de réelle recherche", estime Frédéric Léveillé, le maire d'Argentan, "On sait que le moteur thermique est sur la pente descendante. Il y a une vraie réflexion stratégique à mener. Les salariés et le directeur du site ont essayé de faire des propositions mais il n’y a pas eu de réponse au-dessus. Le groupe Marelli et l’actionnaire, KKR, n’ont pas été dans une logique de s’investir pour permettre une évolution du site.

L'élu local comme les syndicats en appellent aux pouvoirs publics et au respect de la loi Florange. "Il y a nécessité de trouver un repreneur et de travailler à une vraie dynamique territoriale qui permette de retrouver de l’activité sur ce site, qui est un site qualitatif, avec des salariés compétitifs." L'annonce de la fermeture prochaine de l'usine Marelli constitue un nouveau coup dur pour la ville d'Argentan. Le début de l'année 2023 avait été marqué par la liquidation judiciaire de Place du Marché (ex Toupargel). La société de livraison de surgelés à domicile employait dans l'Orne 70 salariés et 20 chauffeurs.

Pour le maire ces deux exemples reflètent une certaine réalité économique, qui n'est pas spécifique à Argentan. "J’entends des remarques, y compris locales, sur : l’emploi se délite, il n’y a plus rien. Non. Ce sont des choix faits par des entreprises mondialisées qui décident de fermer. Que ce soit Argentan ou ailleurs, ça n’a aucune importance pour eux. Ce qui les intéresse c’est ce qu’ils sont capables de faire pour assurer une rentabilité à court terme qui soit la plus importante. C’est leur seul but." Et Frédéric Léveillé de balayer l'image d'une ville supposée sinistrée. "Si on regarde les chiffres, on a une meilleure qualité d’emploi et un chômage inférieur à la situation normande et nationale", se félicite le maire, "ça marche quand on est en contact direct avec les chefs d’entreprise, qu’on les connaît, qu’on les voit et qu’on travaille ensemble sur un modèle de développement territorial."

Le soutien du préfet

A la demande du préfet de l'Orne, une délégation de représentants des salariés de Marelli Argentan a été reçue ce vendredi après-midi en préfecture. "Il nous a dit qu'il était très déçu de la décision de Marelli", a déclaré Geneviève Pérard, déléguée CFE-CGC, après deux heures de réunion. Le représentant de l'Etat leur a annoncé les soutenir dans le Plan de Sauvegarde de l'Emploi, "de manière à ce que Marelli soit à la hauteur de ses engagements sur le plan social et surtout dans la recherche d'un repreneur, une recherche sérieuse pour la continuité du site d'Argentan." Un soutien qui ne garantit pas une issue positive mais laisse un peu d'espoir. "Le délai est court", reconnait Geneviève Pérard, "mais il ne faut pas fermer les portes, il faut rester confiant."

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