Des punaises, parfois par kilos, des morceaux de barbelés disséminés sur le sol : depuis sa mise en service en octobre 2020, la voie verte reliant La Lacelle dans l'orne à Pré-en-Pail en Mayenne est le théâtre de divers actes de malveillance.
En cette fin de mois de septembre, le soleil n'a pas encore déserté le ciel normand et l’été joue un peu les prolongations. Sur la voie verte bordée d'arbres, Monique promène son petit chien et savoure ce moment. "C'est superbe, on peut se promener et on n'est pas tributaire des voitures, c'est du bonheur", raconte cette habitante de la commune La Lacelle qui emprunte régulièrement la voie verte menant à Pré-en-Pail, en Mayenne.
Mais ce mardi matin, la retraitée a remarqué la présence d'un étrange panneau signalant des punaises. "Quand on voit ce panneau, on se dit : tiens, c'est de nouveau punaises ou pas ? Ou clous ? Ou barbelés ?" Des punaises, Monique en a déjà ramassées tout au long du chemin quelques semaines auparavant. "Quand j'ai vu qu'il y avait une poignée à gauche, une poignée à droite : je me suis dit : c'est fait volontairement (...) C'est ridicule ! Je ne vois pas pourquoi. Si on n'est pas content, on va le dire carrément !"
Les problèmes ont commencé dès la mise en service de cette portion de voie verte d'environs cinq kilomètres entre La Lacelle et Pré-en-Pail. "En octobre 2020, on m'a signalé qu'il y avait des punaises sur la voie verte", raconte Viviane Fouquet, la maire de La Lacelle, "Je me suis rendu sur place avec mon mari et on en ramassées environs 160. C'étaient certainement des punaises de charpentier. Certaines faisaient plus de deux centimètres de longueur."
Plus d'un kilo de punaises au mois de juin
Un incident qui en appelera d'autres les mois suivants. "Au mois de juin, il a été ramassé plus d'un kilo de punaises sur la voie verte et il y avait des chaussures dont les semelles en étaient remplies. Le weekend dernier, des morceaux de fil barbelé, volontairement découpés, ont été déposés sur le sol". Et madame le maire de s'emporter :"Des enfants qui tombent les mains sur les punaises peuvent se blesser. Pour les gens qui se promènent avec des nu-pieds ou des chaussures un peu ouvertes, c'est très dangereux. Et c'est surtout très embêtant pour les cyclistes : il y a eu des centaines de vélos qui ont eu les pneus crevés." Sans oublier les animaux qui accompagnent leurs maîtres en ballade.
A cinq reprises, la voie verte a été le théâtre d'actes de ce type. "Pour moi, c'est de la délinquance. C'est pas normal de voir des choses pareilles", estime Viviane Fouquet, partagée entre colère et incompréhension. "Comment se fait-il qu'il y ait des gens qui sont contre la voie verte ?", s'étonne la maire de La Lacelle, "Aujourd'hui, 99% de la population est satisfaite. Les gens sont très heureux de pouvoir se promener à pied, à cheval, en vélo sur cette voie verte." Et d'inviter toute personne victime d'un préjudice, crevaison de vélo ou punaise dans les chaussures, à porter plainte à la gendarmerie. "Plus il y aura de plaintes plus il y aura de chances que ça avance et que ça empêche les personnes malveillantes de continuer ces actes."
Des "abrutis" pas contents
Au Conseil Départemental de l'Orne, le gestionnaire de la voie verte, l'affaire embarrasse quelque peu. "Ce sont des actes isolés, on en parle beaucoup mais c'est très peu de choses sur l'ensemble du territoire", déclare la vice-présidente Sophie Douvry, "Ce sont des abrutis - faut dire ce qui est - qui se permettent de faire ça probablement parce qu'ils ne sont pas contents, parce qu'ils ne voulaient pas de la voie verte. Mais il ne faut pas retenir que ça."
La collectivité locale, qui a investi plus de 4 millions d'euros dans l'aménagement de cette voie verte, préfère mettre en avant les retours positifs autour de ce projet. "Les entreprises locales sont très contentes des retombées au niveau du tourisme : restaurants, boulangeries, campings, hotels. C'est une vraie valeur ajoutée pour le territoire", plaide l'élue ornaise. "Ces agissements sont néfastes, malsains, mais en même temps, ils ne doivent pas effrayer les gens : il faut continuer à y aller et ne pas se laisser embêter par cette minorité."
Des caméras sur la voie verte ?
Et porter plainte, martèle le Département, qui assure, de son côté, ne pas rester les bras croisés. "Il y a plusieurs solutions qui sont en cours de réflexion", affirme Sophie Douvry, "On est en train de se poser la question des caméras, ce genre de choses, pour qu'on puisse prendre ces personnes en flagrant délit. Il y a d'autres options sur lesquelles on travaille mais si on dévoile tout, on risque de de ne pas les attraper. Ce serait dommage." La gendarmerie d'Alençon, pour sa part, indique qu'elle n'a reçu jusqu'à présent aucune plainte mais qu'une enquête a tout de même été ouverte.