La commune de Boischampré, près d'Argentan, a accueilli ce weekend une troisième rave-party en deux ans sur le même terrain. Même s'il dit comprendre le besoin des jeunes de faire la fête, le maire ne souhaite pas que cela devienne une habitude et compte porter plainte.
"Vendredi soir, à minuit, nous avons entendu beaucoup de bruit. Il y a eu un défilé de voitures. On s'est dit : il y a quelque chose qui se passe. Après, on a entendu le boum boum boum. Mais ça ne nous a pas empêchés de dormir." Pour Stéphanie, une habitante de la commune de Boischampré, c'est un weekend sans histoire qui s'achève. Deux jeunes passent devant son portail et la conversation s'engage. "A vue de nez, vendredi, il devait y avoir 2000 personnes. Dans la nuit de samedi à dimanche, on devait être pas loin de 5000", raconte l'un d'entre eux, avant de demander un peu d'eau. "Je vous apporte une bouteille", répond prestement la mère de famille.
Un peu plus loin, un couple de Dieppe est lui aussi sur le chemin du retour. Un retraité se penche à la portière de leur véhicule et demande : "Alors, vous vous êtes bien amusés ? Ça ne nous gêne pas. Vous pouvez revenir. Moi, j'en ai ramené à la gare. Les gars étaient à pied. Il y a au moins 10 kilomètres !". Son épouse, Marie-Louise, abonde : "Tout le monde était très gentil. On a parlé avec beaucoup de jeunes qui nous ont dit bonjour, qui ont été très cordiaux (....) Quand on est dehors, on entend le bruit bien évidemment. Mais c'était tout (...) On a une amie qui était un peu plus près. Ça ne l'a pas empêchée de dormir."
À plusieurs kilomètres à la ronde
Selon le maire de la commune, Michel Lerat, les riverains rencontrés ce dimanche par notre équipe ne sont pas forcément représentatifs de tous les habitants. "La nuit de samedi à dimanche a été extrêmement bruyante. A plusieurs kilomètres à la ronde, en fonction évidemment de la direction du vent, on entendait très très bien tout ce qui s'est passé", affirme l'élu local dont la seule étiquette, dit-il "c'est de rendre service à mes administrés". Des administrés qui, raconte Michel Lerat, l'ont appelé en nombre durant "toute la journée" de samedi. "Je leur ai dit qu'on ne pouvait plus faire grand chose, ce qu'ils ont eu un peu de mal à comprendre. Quand nous avons été prévenus, tout était en place. Ce qui a été décidé c'est de laisser faire, les gendarmes n'avaient pas les moyens de mettre fin à cette manifestation."
"Faites marcher vos contacts !"
Quand les militaires ont constaté vendredi soir la tenue d'une rave-party sur la commune, 200 véhicules étaient déjà présents sur place. Comme d'habitude sur ce type d'évènement, la communication a été extrêmement discrète, du moins aux yeux des non initiés. Seul un flyer a été diffusé sur les réseaux sociaux. Celui-ci ne comportait aucune indication quant au lieu de la manifestation et était accompagné du message suivant : "Aucune autre info ne sera divulguée sur internet ! Faites marcher vos contacts !"
Ce dimanche en fin de matinée, ils étaient encore nombreux à danser devant les sept murs d'enceintes crachant leurs décibels. L'écho des plaintes suscitées par l'événement est tout de même parvenu jusqu'aux oreilles de certains fêtards. "On est libre de faire la fête, c'est juste un droit et on défend ce droit", lance une jeune femme. "Les gens qui viennent faire chier parce que des jeunes font la fête un weekend, j'ai envie de leur dire: est-ce que vous avez oublié d'être jeune ? Et déjà, est-ce que vous avez été jeunes ?", s'emporte Tiffany, un bob vissé sur le crâne. Karim, lui, vient d'arriver ce dimanche de Saint-Pierre-sur-Dives. Le jeune comprend que la rave-party puisse hérisser quelques poils dans les hameaux alentours. "Mais je pense que c'est pas tous les jours qu'on fait la fête à cet emplacement-là. Si c'est une fois de temps en temps, je pense que les gens peuvent comprendre."
"Les riverains ont passé deux nuits sans sommeil"
Ce besoin de faire la fête, Michel Lerat, l'entend et dit le comprendre. "Actuellement, on ne vit pas une vie très sympa pour le jeunes", reconnait le maire de Boischampré. "Le seul problème, c'est qu'il faut toujours tenir compte de ce qui se passe autour. On doit pouvoir arriver à trouver des solutions pour ce genre de choses. A condition de le savoir avant. Les riverains ont passé deux nuits sans sommeil, des personnes âgées mais aussi des jeunes avec des enfants en bas âge. Si j'avais été prévenu, on n'aurait pas pu arrêter les choses mais on aurait pu informer les riverains et ils auraient pris leurs dispositions, comme aller dormir chez les grands-parents."
Porter plainte. Mais contre qui ?
Selon l'élu local, c'est la troisième fois en deux ans qu'un tel événement a lieu sur le même terrain. "On ne voudrait pas que ça devienne une habitude. Le propriétaire (du terrain), ce qu'il a à dire, c'est qu'il a été prévenu et qu'à chaque fois le terrain lui a toujours été rendu en bon état. Point. C'est compliqué. Je ne sais pas s'il a vraiment donné son accord ou s'il n'a pas dit non." Michel Lerat annonce qu'il se rendra à la gendarmerie ce lundi pour porter plainte. "Très honnêtement, j'ai un problème. Je ne sais pas s'il faut que je dépose plainte vis à vis du propriétaire ou vis à vis des organisateurs." Ces derniers, peu coopératifs avec notre équipe, ont annoncé la fin de la fête pour la soirée de ce dimanche.