Des policiers agressés, une politique du chiffre toujours plus pesante et des moyens restreints. Le mal-être des agents grandit encore. Ils ont exprimé leur détresse, ce mardi 9 janvier, en manifestant à midi devant les commissariats français. A Caen, nous sommes allés recueillir leur parole.
Après les agressions de plusieurs policiers ces derniers jours, la colère des agents ne faiblit pas. Des rassemblements étaient prévus, ce mardi 9 janvier, devant tous les commissariats de France. A Caen, nous sommes allés recueillir la parole d’agents de police en leur demandant d’écrire un ou plusieurs mots pour exprimer leur mal-être…
Ils étaient une vingtaine réunis ce midi devant le commissariat de Caen. Des agents de la police judiciaire, de la sécurité de proximité ou encore de police secours. Des hommes et des femmes venus exprimer, un instant, leur colère, détresse mais aussi leur désespoir. Alors même que nous leur demandons de choisir un mot ou une phrase pour décrire leur situation, les langues se délient doucement.
La plupart d’entre eux sont agents depuis plusieurs dizaines d’années. Ils ont vus leurs conditions de travail se dégrader au fil des ans. Comme par exemple passer de trois agents sur le terrain à seulement deux. Ils ont vus, aussi, leur relation avec la population se détériorer. Même si le ministre de l’Intérieur reçoit demain les représentants syndicaux, ils n’y croient presque plus…
La détresse des policiers est présente
"On a de mauvais horaires, on est mal payé, on n’est pas reconnu si vous n’avez pas une épaule à la maison pour vous soutenir, qu’est-ce qui vous reste ? La plupart des policiers sont des gens de province parce qu'à l'époque, en plus de la vocation, le salaire était conséquent par rapport aux travailleurs des usines. Ça n’existe plus ! Qu’est-ce que vous voulez attendre de gens comme nous qui à 40, 45 ans se remettent complètement en cause et constate que la hiérarchie ne les soutient pas, les salaires régressent et la population que nous sommes censés aidé nous détestent ! Voilà le constat."
Manque de moyens humains et matériels
"Nous, par exemple en investigation dans notre groupe nous sommes quatorze, raconte un policier. Nous devons utiliser des tampons officiels Mariannes, pour authentifier notre travail et nos documents. Le problème c’est qu’il y en que trois dans notre service. On doit tourner dans les bureaux pour en trouver. Soit disant il n’y a pas de budget pour en racheter."
"Même chose il y a quinze jours, je suis intervenu sur un accident de la route et je n’avais même pas de règle graduée pour établir un plan à l’échelle. On a pris une sorte de tube pour faire des lignes droites… C’est le même constat pour nos véhicules, les téléphones, notre matériel de façon générale.", déplore un agent de police.
Une nouvelle justice?
"Une solution? La réforme pénale ce serait déjà pas mal, la mise en place des peines planchers par exemple. Que les voyous soient réellement punis à hauteur de ce qu’ils commettent. Ca les fera réfléchir et ils ne recommenceront plus. J’ai côtoyé beaucoup de personnes qui sortaient de prisons, à 20 ans ils font les kékés, mais à 30 ans quand ils ont passé les 8 dernières années en prison, ils ne veulent absolument pas y retourner, je peux vous le certifier."
Pour rappel, un policier et une policière ont été agressés par un groupe de plusieurs dizaines de personnes, à Champigny-sur-Marne le soir de la Saint-Sylvestre.
En 2017, le fléau des suicides dans les rangs de la police s’est retrouvé à l’un de ces plus hauts niveaux avec 62 policiers et gendarmes qui ont mis fin à leurs jours… En Normandie, le dernier drame ne date que de décembre dernier au commissariat d’Alençon.
Ce midi à Caen, les policiers ont rendu hommage à leur collègues agressés ces dernières semaines: