Qu'est-ce que la Poétothèque, le livre sonore qui met en valeur les poètes oubliés ?

Marie Gautier, médiatrice dans un centre culturel de l'Eure, a écumé pendant trois ans les bibliothèques et archives de Normandie à la recherche des auteurs oubliés de la poésie régionale. Le fruit de sa recherche est disponible dans la Poétothèque, une grande anthologie sonore publiée en ligne.

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"Aux cendres du foyer, le pot-au-feu normand sommeillait comme un juste et ronflait en dormant". Ces quelques mots, décrivant les impressions d'un aubergiste normand du siècle dernier, sont scandés dans un enregistrement à écouter sur le site internet de la Poétothèque sonore. Sorte de grand recueil de poèmes en ligne, le site est édité depuis mars dernier par La Factorie, un centre culturel dédié à la poésie établi à Val-de-Reuil (Eure).

Les mots entendus sont de Paul Harel, aubergiste originaire de l'Orne et aussi poète, actif entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle. Longtemps oublié, son œuvre a été exhumée par Marie Gautier, médiatrice culturelle à La Factorie. Depuis trois ans, elle construit pas à pas une grande anthologie sonore des poètes normands oubliés, rendue publique cette année à travers la Poétothèque sonore.

"Je me suis demandé qui étaient les poètes normands. Et je me suis rendu compte que je n'étais pas capable d'en citer beaucoup", se rappelle Marie Gautier. En 2021, elle décide donc de partir en quête de ce patrimoine immatériel normand avec pour but de le mettre en valeur à La Factorie.

Des auteurs peu connus

En fouillant les bibliothèques, les anthologies de poésie et les collections patrimoniales, la chercheuse identifie des auteurs, dont 28 sont désormais présentés dans l'anthologie en ligne. 135 de leurs textes, datant du XIIe au XXIe siècle, peuvent être écoutés sur le site, lus par des comédiens comme Arno Feffer ou Patrick Verschueren, ainsi que des professeurs de littérature et leurs étudiants de l'Université de Rouen, partenaire du projet.

Exit François de Malherbe, né à Caen (Calvados), Raymond Queneau, originaire du Havre (Seine-Maritime) ou encore Léopold Sédar Senghor, qui a passé sa fin de vie à Verson (Calvados). Ceux-là sont déjà bien assez connus pour ne pas mériter d'un coup de projecteur supplémentaire, estime Marie Gautier : "Nous avons la volonté de mettre en lumière des noms qui ne figurent pas sur les autres anthologies".

Ainsi, l'exploration de cette bibliothèque sonore amène plutôt à la rencontre de noms inconnus, comme celui de Lucie Delarue Mardrus, poète voyageuse du début du XXe siècle, originaire d'Honfleur (Calvados). "Honfleur tout en ardoise, où pourtant je suis née (...), je l'aime simplement ainsi qu'on aime son père et sa mère", écrit-elle de sa ville côtière, dans un poème lu par l'actrice Adeline Maisonneuve. On découvre aussi Henriette Charasson, femme de lettres havraise, "qui écrit joliment sur le deuil de son frère, disparu pendant la Première Guerre mondiale", détaille Marie Gautier.

Redécouverte des argots normands

"Certains textes sont très intéressants d'un point de vue patrimonial, pour le jargon qu'ils utilisent, devenu très rare", présente la créatrice du projet. C'est le cas de poèmes de Charles Boulen, cultivateur du Pays de Caux, né en 1868. À ses heures perdues, il écrivait des rimes sur son quotidien dans la ruralité. "C'est un témoignage sur la terre et la ruralité, dans un langage très fleuri. Il écrit beaucoup en argot", décrit Marie Gautier.

Il a donc fallu trouver des voix capables de réciter dans les langues d'origines des poèmes : les parlers normands, comme le cauchois ou le cotentinais, mais aussi l'ancien français. Pour cela, La Factorie s'est appuyée sur des spécialistes universitaires, qui ont permis de restituer les patois régionaux et le langage d'époque.

Ainsi d'une poésie de Richard Cœur de Lion, lue en ancien français. Chose méconnue, le roi d'Angleterre et duc de Normandie était aussi poète. Il se voit en effet attribuer la Complainte du prisonnier, une chanson qu'il aurait écrite pendant ses deux années de captivité en Allemagne, de retour de croisade.

À l'avenir, la Poétothèque devrait continuer à grandir. Si 28 écrivains figurent déjà sur le site, sa créatrice en a identifié plus d'une centaine qui pourraient s'y ajouter. Le ministère de la Culture, via la direction des affaires culturelles de Normandie, vient d'ailleurs d'accorder une subvention à La Factorie pour continuer cet ouvrage.

La Poétothèque sonore peut être consultée librement sur son site internet.

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