Alerte disparition : les ânes de Normandie en voie d'extinction

L'âne du Cotentin et l'âne normand sont aujourd'hui menacés de disparition. Les associations de race lancent un appel aux propriétaires pour qu'ils fassent reproduire leurs ânes. Le nombre de naissances est tombé à une cinquantaine par an. Moins que les pandas...

L'âne du Cotentin est reconnaissable à sa robe grise et à sa croix de Saint-André. Il mesure au moins 1,35m au garrot. C'est un animal réputé intelligent et docile, vaillant et robuste. Il serait apparu dans la Manche au XVIe, peut-être avant.

L'âne normand est un peu plus petit, mais il n'est pas moins robuste, pas moins courageux. Sa robe est de couleur chocolat. Il porte aussi une croix de Saint-André sur les épaules. Sa présence est attestée en Normandie depuis... la nuit des temps. 

"Ils étaient des milliers, dans toutes les fermes, explique Sylvie Cheyrezy qui préside l'association de l'âne normand. Ils portaient le lait. Les vaches étaient dans les champs. C'est la petite bonne dédiée aux ânes qui faisait des allers-retours pour aller les traire".

La modernisation de l'agriculture les a désœuvrés. Chômage technique. "Depuis qu'il ne travaille plus, l'âne disparaît, déplore Sylvie Cheyrezy. Il va falloir lui trouver des usages parce que la situation est préoccupante".

Réarmement démographique

Le nombre de naissances a atteint un seuil alarmant. Une trentaine de petits ânes normands ont vu le jour en 2023. L'âne du Cotentin se porte un peu moins mal avec 57 naissances. "On oscille entre 50 et 70 naissances par an", précise Christel Prével, la présidente de l'association de l'âne normand. L'INRAE classe aujourd'hui l'âne du Cotentin et l'âne normand parmi les races menacées.

Plus que 1.500 ânes du Cotentin en France

Combien d'ânes peuplent encore nos prairies ? Il resterait 1500 ânes du Cotentin en France, mais seulement 200 ânesses reproductives. La situation est plus alarmante encore pour l'âne normand. "Il en reste moins d'un millier, mais quand on regarde de près le fichier, certains sont beaucoup trop vieux pour être encore vivants, sourit Sophie Cheyzery. Les propriétaires ne déclarent pas toujours les décès"...

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Sylvie Cheyrezy, présidente de l'association de l'âne normand (09/02/2023) ©France 3 Normandie

Appel à tous les propriétaires

Pour tenter de casser cette spirale, un Centre de Valorisation a été créé au Haras du Pin. "Une pépinière d’ânes mâles a été mise en place pour préserver la diversité génétique". Les associations de race versent des aides à l'élevage et à l'acquisition, des primes à la naissance. "Mais on sent bien que les gens fatiguent et qu'ils ont d'autres priorités que d'acheter des ânes", déplore Sylvie Cheyrezy.

Alors, les associations et le centre de valorisation lancent aujourd'hui "un appel à tous les propriétaires d'ânesses de race normande, du Cotentin ou typées (c’est-à-dire avec les mêmes caractéristiques), pour qu'ils se joignent à cette cause, en faisant reproduire leur femelle avec des mâles approuvés. Ainsi, des ânons de race pourront voir le jour et faire perdurer ces races patrimoniales de Normandie".

"L'urgence, c'est de faire naître, mais pas n'importe comment. Il faut travailler la diversité génétique". Le nombre de baudets reproducteurs est si faible que le risque de consanguinité ne peut pas être écarté. Les propriétaires sont donc invités à se rapprocher des associations qui pourront les aider à se lancer dans l’élevage.

Il faudra aussi que ces animaux retrouvent une utilité sociale. "Les ânes peuvent aider à nettoyer les plages, à ramasser les déchets. On fait aussi du maraîchage, raconte Christel Prével. "En Normandie, on a un énorme potentiel de tourisme sur les chemins, ajoute Sophie Cheyzery. Ce serait formidable de les remettre sur les chemins et de proposer cela aux touristes".

Aujourd'hui, le destin de ces races ancestrales repose sur l'engagement de quelques éleveurs qui s'obstinent à préserver ce patrimoine vivant. "C'est un sacerdoce..."

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