De grandes lettres noires collées sur les murs du Havre rappellent aux passants que les violences faites aux femmes continuent. Un collectif de femmes dénoncent ainsi les féminicides et le machisme toujours présents. Rencontre.
On ne verra pas leurs visages car la forme d'expression qu'elles ont choisi est illégal. La nuit, un groupe de jeunes femmes arpente les rues du Havre pour y coller de grandes lettres noires sur les murs . Des lettres qui forment des mots qui racontent des histoires tragiques de féminicides, ou les insultes et maltraitances quotidiennes que subissent encore de nombreuses femmes chaque jour.
Cinq jeunes femmes sont à l'origine de ces collages, aujourd'hui elles sont une quarantaine de personnes à participer à cette forme d'action.
"Ca a commencé en novembre 2019 suite au féminicide de Johanna qui s'est passé au Havre. C'est un meurtre qui a touché énormément de personnes. On s'est réunies à quelques unes et on s'est dit qu'on ne pouvait pas laisser passer ça. Comment faire pour réagir? "
"On a tout le matériel, des feuilles, des pinceaux, de la peinture, ça coûte pas cher, c'est facile à transporter et à mettre en place, et c'est visuellement hyper impactant. des lettres noires sur blanc ça touche tout le monde"
"Chacune va mettre un message qui la touche en fonction de sa propre expérience ou de celles des autres."
Certaines préfèrent écrire des messages positifs, comme une exhortation au courage : tu es belle, tu es forte. D'autres jeunes femmes préfèrent les mots plus tranchants pour piquer au vif.
"Tu es forte c'est une phrase simple mais c'est aussi un message super fort qui va permettre de se sentir plus forte et pas abandonnée dans n'importe quelle situation de la vie : que ce soit un regard déplacé qu'on a toutes déjà vécu, ou au moment de prendre les transports en commun."
Les colleuses choisissent les lieux de leurs actions, et n'y passent pas plus de deux minutes pour ne pas se faire repérer.
"On se réapproprie l'espace public, on peut aller dans des endroits où l'on s'est fait insulter ou harceler. Je pense que c'est une action juste alors je n'ai pas peur"
"J'ai vu des hommes qui nous ont dit "continuez vous êtes les anges de la nuit, vous parlez pour mes soeurs" qui prouvent que ça a un impact"
Les jeunes femmes qui participent à ces actions expérimentent disent-elles, la sororité. Soeurs de coeur, soeurs d'armes... Mais leurs actions nous interrogent tous, hommes ou femmes sur nos comportements, nos courages et nos peurs.