Malgré un nombre de dossiers en baisse dans la région par rapport à 2021, les Normands restent parmi les Français les plus surendettés en 2022. La Seine-Maritime est ainsi le quatrième département qui compte le plus de ménages en difficulté financière.

« C’est une démarche souvent très douloureuse. Il m’arrive de recevoir des gens en détresse qui finissent par pleurer devant moi. Des gens qui ont honte de dévoiler une partie de leur vie. Certains vivent depuis longtemps dans le déni mais quand vous vous enfoncez dans cette spirale infernale, vous n’avez plus le choix », confie Jean-François Burel, ancien chef d’entreprise et vice-président de CRÉSUS Normandie. Cette association, située à Coquainvilliers près de Lisieux, vient en aide depuis l’été 2018 aux personnes en situation de surendettement. Un lieu d’écoute et de sensibilisation où l’on reçoit deux fois par semaine, le lundi et jeudi après-midi, ceux qui ne parviennent plus à payer leurs charges courantes comme l’eau, le gaz, l’électricité, le loyer ou les mensualités de crédits.

La Seine-Maritime quatrième département français le plus dans le rouge

Même si Jean-François Burel a constaté une baisse de 20% du nombre de dossiers déposés par l’association en 2022, la situation du surendettement dans notre région reste préoccupante. Selon les chiffres communiqués par la Banque de France pour l’année 2022, la Normandie reste sur le podium des régions les plus touchées derrière les Hauts-de-France et la Bourgogne-Franche-Comté. 272 dossiers pour 100 000 habitants y sont déposés chaque année contre 208 en France.

Avec 317 dépôts de dossiers, la Seine-Maritime est le quatrième département français comptant le plus de personnes dans le rouge. L'Eure est juste derrière avec 304 dépôts de dossier. La situation est un peu moins critique dans l'Orne (251) et proche de la moyenne nationale dans le Calvados (217) et la Manche (213). 

Dans les dossiers de surendettement, les causes produisent souvent les mêmes effets.

On constate dans la majorité des cas qu’une rupture, qu’elle soit de nature professionnelle, familiale ou conjugale, entraîne les personnes les plus fragiles dans une spirale infernale. Le taux de chômage est un facteur explicatif pour les départements les plus touchés

Jean-François Burel, vice-président de l'association CRESUS Normandie

« Les femmes et les hommes divorcés avec enfants sont souvent en première ligne. L’exemple type, c’est le père fraîchement séparé qui doit prendre un logement pour accueillir ses deux enfants en garde alternée. Le coût du loyer devient alors une vraie source de difficultés. Pour autant, on ne peut pas parler de profil type. Par contre, on remarque de plus en plus de phénomènes addictifs qui peuvent expliquer aussi une bascule vers le surendettement comme le jeu, le tabac ou l’alcool », ajoute le vice-président de CRÉSUS Normandie. 

L’inflation n’a pas de d’effet... pour le moment

Bien que la Normandie se distingue défavorablement au niveau national, la tendance générale est à la baisse du nombre de surendettés. Entre 2021 et 2022, le nombre de dossiers déposés a chuté de 9,9% sur l’ensemble des 5 départements normands. Cela fait suite à une décrue déjà observée entre 2019 et 2021 – 2020 année du COVID n’étant pas prise en compte – sur l’ensemble de la région. Les clips de sensibilisation sur l’addiction liée au jeu mais aussi les points conseil budget (PCB) mis en place en 2020 par l’Etat pour « prévenir le surendettement et favoriser l’éducation budgétaire » ont été des atouts.

Le resserrement des conditions d’octroi du crédit immobilier par les banques et un taux de chômage en constante décrue ces dernières années ont permis également de faire baisser la pression. Mais la prudence est de mise. « Nous observons un frémissement des demandes auprès de notre association depuis le début de l’année 2023. L’inflation commence à se faire sentir. Les revenus n’augmentent pas alors que les prix et les charges sont en forte hausse», alerte le vice-président de CRÉSUS Normandie. La Banque de France ne dit pas mieux et s’attend en 2023 à voir des chiffres en augmentation.

A l’association CRÉSUS Normandie, ils sont deux bénévoles à recevoir et à accompagner sur le chemin de la reconstruction les personnes surendettées. Il y a Jean-François Burel et sa présidente Annie Daireaux, deux anciens chefs d’entreprise désormais à la retraite. « Une de nos missions premières, c’est d’aider les personnes dans la constitution de dossiers de surendettement. Après avoir reçu toutes les pièces, nous mettons deux heures à ficeler le dossier. Une réponse est donnée sous trois mois auprès de la commission départementale du surendettement à la Banque de France», explique Jean-François Burel.

Un dossier validé, c'est une bouffée d'oxygène

99,99 % des dossiers envoyés par l’association CRÉSUS sont validés. C’est alors une bouffée d’oxygène pour toutes celles et tous ceux qui vivent la tête sous l’eau depuis trop longtemps. L’étau se desserre quand surviennent la suspension du paiement des dettes ou encore le plafonnement des frais d’incidents bancaires. Dans certains cas, on peut même annuler la dette.

« La dette est effacée quand la commission estime que la situation est irrémédiablement compromise pour le foyer qui ne peut pas mettre en place un plan d’apurement de ses dettes. Ce cas de figure représente environ 50% des dossiers », souligne Guillaume Scotte, responsable du service des particuliers à la Banque de France à Rouen.

Sortir du surendettement après un dépôt de dossier laisse tout de même des traces. Comme une marque au fer rouge, il y a d’abord l’inscription sur un fichier national pendant sept ans. « Et puis, on renonce pour de longues années à faire un crédit à la consommation », prévient Jean-François Burel qui continue d’accompagner celles et ceux qui semblent tirer d’affaire. Car l’équilibre reste bien souvent fragile.

Si vous êtes en situation de surendettement, vous pouvez contacter l'association CRÉSUS Normandie par mail : anaeps14normandie@gmail.com ou par téléphone au 06 32 45 78 97.

Informations auprès de la Banque de France au 34 14.

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