Les Restos du Cœur passent le cap des 40 ans. Coluche, qui aurait eu 80 ans cette année, en serait sûrement surpris et attristé. En Normandie, près de 4000 bénévoles accompagnent environ 70 000 personnes en difficulté. Cette année, la priorité est donnée aux bébés et familles monoparentales.
Aller chercher de la nourriture aux "Restos du cœur" est une épreuve. Les bénévoles le savent, ils ont les mots et le sourire qui détendent l'atmosphère. Le regard tendre et complice de Coluche (photo prise en 1985 par Gaston Bergeret) invite lui aussi les nouveaux venus à mettre de côté toute honte.
Sur la rive gauche de Rouen, les chariots à roulettes sont nombreux devant le centre pour cette première distribution de la campagne hivernale. L'antenne de la région rouennaise a reçu 22% de demandes d'aide en plus cette année.
On se rend compte que cela touche tous les publics. Nous n'avions pas l'habitude de voir, en particulier, autant de retraités ou des jeunes en grandes difficultés
Jean-Marie Marchand, président de l'antenne des "Restos du Coeur" de la région de Rouen
Reportage de François Pesquet et Bruno Belamri. Montage de Noémie Cuvelier.
"Tout s'enchaîne, une séparation puis j'ai perdu mon emploi"
Ce mardi 19 novembre, parmi les personnes accueillies, Raba. Cet homme qui a la cinquantaine est venu pour de la nourriture, des vêtements et aussi un drap. Il décrit sa situation : "Je viens depuis un an et demi, depuis que j'ai perdu mon emploi dans l'industrie, j'ai eu une séparation, tout s'enchaîne, heureusement il y a les "Restos du Cœur".
Une jeune fille est, elle aussi, dans le centre dès le jour d'ouverture. Elle est étudiante en architecture à Rouen. "Quand on change de ville", explique-t-elle, "notre dossier doit se remettre à jour. J'attends toujours mon aide CAF et comme je n'ai pas encore trouvé de job étudiant, je suis obligée de faire attention à mes économies".
Une femme enceinte a, elle aussi, besoin du soutien de l'œuvre de Coluche. Sans travail, elle vit seule avec ses deux enfants "Je viens pour nourrir mes enfants et moi tout simplement. J'ai le RSA, 900 € pour mes enfants et moi. Cela paie les factures".
Accompagner les plus petits, et faire de l'éducation alimentaire
Pour cette 40e campagne, l'association cherche à accompagner et aider les parents isolés et leurs enfants :
Nous allons renforcer fortement notre soutien à destination des tout-petits, mais aussi des familles monoparentales, en apportant des réponses au plus près des besoins alimentaires, matériels, mais aussi de lien social et d'insertion
Patrice Douret, président des "Restos du Coeur"Agence France Presse
"L'idée est d'aider les gens à bien nourrir leur bébé ou leurs enfants. C'est un enjeu important, la nourriture c'est aussi la santé. L'obésité et le diabète sont des enjeux importants dans nos sociétés. Il faut accompagner et soutenir les gens dans la façon dont ils vont donner à manger à leurs enfants", explique Jean-Marie Marchand, le président de l'Antenne des Restos du Cœur de la région de Rouen.
"Avant, l'idée était de donner à manger aux personnes, et c'était la priorité. Là on veut aller plus loin, c’est-à-dire casser un peu ce cercle de la précarité, à travers une éducation alimentaire".
22 espaces "petite enfance" ont ainsi été ouverts dans la région."L'intérêt du centre bébé, c'est aussi qu'il y a des personnes qui ont l'appétence de ce sujet-là, et qui sont capables de prendre un peu de temps avec les personnes qui le souhaitent, pour discuter de différents sujets".
114 accueils des Restos en Normandie
Centres de distribution, équipes de maraude, ateliers d'insertion, accompagnement social au Droit et à la Santé. Les Restos apportent un soutien qui dépasse l'aide alimentaire.
Les Restos du cœur de Normandie :
(campagne 2022-2023)
- 9 millions de repas
- 66 646 personnes accompagnées
- 94 000 contacts avec des personnes qui vivent dans la rue
- 3940 bénévoles
- 114 centres
- 22 espaces "petite enfance"
L'antenne de Rouen accompagne déjà 1 300 familles, et ne peut plus "pousser les murs". Le nombre de bénéficiaires continu d'augmenter : +22% par rapport à l'an passé.
En avril 2025, un autre accueil ouvrira à Petit-Quevilly près de Rouen.