Mamoudou Barry avait été traité de " sale noir" et battu à mort le 19 juillet 2019 à Canteleu. Depuis les faits, son agresseur présumé est interné en psychiatrie. Il sera jugé par la cour criminelle en septembre prochain, car la juge d'instruction de Rouen a estimé qu'il devra répondre de ses actes.
"Sale noir". Une insulte, suivie de coups répétés. Ce 19 juillet 2019, la vie de Mamoudou Barry bascule.
L'enseignant-chercheur de 31 ans est mortellement agressé à Canteleu, près de Rouen, à un arrêt de bus sous les yeux de son épouse. Un meurtre d'une extrême violence. Mamoudou Barry est insulté, roué de coups, et décédera de ses blessures le lendemain.
Son agresseur présumé a été auditionné seulement neuf mois après les faits. Son discernement avait été jugé " altéré" au moment de l'agression. L'homme d'une trentaine d'années avait été placé en psychiatrie pour schizophrénie. Il est toujours interné, soigné sous le régime de la détention provisoire.
Mais selon Le Parisien, la juge d'instruction de Rouen a décidé le 2 mai dernier dans une ordonnance de renvoi que le suspect devrait répondre de ses actes pour "coups mortels".
La magistrate, qui s'est appuyée sur les expertises psychiatriques, a relevé que le discernement de l'auteur présumé des coups mortels était seulement "altéré" au moment des faits, mais pas "aboli". Une nuance importante puisque le suspect est jugé en capacité de comprendre le lien entre un acte interdit et une sanction.
Damien Aktas, l'agresseur présumé, sera donc jugé devant la cour criminelle de Seine-Maritime du 14 au 16 septembre 2022. Cette cour n'est pas composée d'un jury populaire, mais de cinq magistrats professionnels.
Une décision saluée par l'épouse de Mamoudou Barry.
Fatoumata Barry avait assisté, impuissante, à l'agression de son mari et n'a jamais cessé de dénoncer ce "crime raciste". Durablement traumatisée la jeune femme attend depuis trois ans que l'agresseur de son époux "soit traduit en justice et aille en prison."
"C'est une bonne nouvelle, précise t-elle, qu'il soit renvoyé devant la cour criminelle. La singularité de ce procès, c'est qu'il sera face à des magistrats professionnels. On ne sait pas trop à quoi s'attendre. Il sera tout de même public, et je serai présente, avec tous ceux qui m'ont soutenue depuis trois ans. Mon inquiétude, c'est de savoir s'il sera jugé à hauteur de ses actes."
Fatoumata Barry est une jeune maman. La petite-fille du couple avait seulement deux ans lorsque son père est mort. " On ne lâche rien, ajoute Fatoumata Barry. Demain, samedi 9 juillet, on organisera à nouveau, comme chaque année, une marche blanche en sa mémoire. "
Un Sitting et une marche blanche le samedi 9 juillet
Un sitting aura en effet lieu demain matin, à Canteleu, à l'endroit même où Mamadou Barry a été mortellement battu, sur la place qui porte désormais son nom, derrière l'arrêt de bus Provence.
Il se déroulera de 10 heures à 11 heures trente. " On invite le quartier, les voisins, la famille et les amis à nous rejoindre, tous ceux qui n'ont jamais cessé de nous soutenir depuis trois ans, nous allons aussi déposer une gerbe de fleurs à l'endroit où mon mari a été tué."
Ce sitting sera suivi d'une marche blanche qui partira à 14 heures de la faculté de droit, à Pasteur, à Rouen, où Mamadou Barry enseignait, jusqu'au palais de justice.