Après les accusations d'agressions sexuelles, une association demande la fermeture du lieu de mémoire dédié à l'abbé Pierre

Esteville, en Seine-Maritime, est le village où vécut le fondateur d'Emmaüs et où il repose. Les représentants de l'association "Mouv'enfants" ont fait une action symbolique. Ils demandent que le centre culturel dédié à l'Abbé Pierre soit fermé.

A Esteville, le centre abbé Pierre Emmaüs avait été fermé dès la publication des informations du 17 juillet par le mouvement Emmaüs. 

Sur la porte de la jolie demeure normande, tout à la fois musée, centre culturel et lieu d'accueil pour des personnes en difficultés a été affiché ce texte : 

"En solidarité avec les victimes de violences sexistes et sexuelles et suite aux récentes révélations médiatiques, l’équipe du Centre abbé Pierre – Emmaüs a décidé de fermer symboliquement le lieu de mémoire jusqu’à nouvel ordre."

Ce dimanche 21 juillet, des représentants de l'association "Mouv'enfants" ont collé un message sur le mur d'enceinte. On peut y lire "pas de lieu de mémoire pour un agresseur". 

Arnaud Gallais, cofondateur de l'association explique "J'ai été victime d'un prêtre pédocriminel entre 8 ans et 11 ans". L'association demande la fermeture définitive du lieu de mémoire et que le mouvement Emmaüs mette en place "des mesures concrètes" de lutte contre les violences sexuelles.

Il faut une restauration collective. Emmaüs a commencé une partie de chemin mais maintenant il faut aller beaucoup plus loin

Arnaud Gallais, cofondateur de l'association Mouv'Enfants

 Reportage d'Arthur Deshayes et patrice Cornily  à Esteville (76)

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A Esteville, village de la maison où vécut l'abbé Pierre, devenue lieu de mémoire culturel, l'association Mouv'Enfants a fait une action symbolique suite aux accusations de violences sexuelles contre le fondateur d'Emmaüs. Interview de Arnaud Gallais, cofondateur de l'association Mouv'Enfants. ©A. Deshayes/ P. Cornily/ France Télévisions

La commission sur les abus dans l'Eglise avait recueilli 3 témoignages

Une semaine à peine après la publication des premières informations, la parole se libère. 

Le 20 juillet, France Inter a diffusé le témoignage d'une infirmière militaire. Elle travaillait en 2006 dans un hôpital des Armées en Ile-de-France où l'abbé Pierre était soigné ( il avait alors 94 ans, c'était un an avant sa mort).

"Je suis allée dans sa chambre, il s'est levé, il a marché. Il m'a agrippé les deux seins. Je l'ai giflé. Il m'a dit qu'il était vieux, qu'il avait besoin de se tenir."

 Cette infirmière explique qu'elle a été très perturbée par cet attouchement sexuel et conclut : 

Il a fait de grandes choses, mais ce n'est pas un Saint, ce serait injuste de l'encenser

Une infirmière qui témoigne d'un attouchement

Le 20 juillet, était aussi publiée dans le journal "le Monde" une tribune de 4 des chercheurs qui ont travaillé pour la commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Eglise ( CIASE).

Cette enquête avait été réalisée entre 2019 et 2021 à la demande de la Conférence des Evêques de France et de la Conférence des religieux et religieuses de France. 

On apprend à présent une information qui n'avait pas été révélée lors de la présentation du rapport de la CIASE, le nom de l'abbé Pierre y figurait  : 

Nous avons disposé d’informations établissant qu’Henri Grouès – l’abbé Pierre – avait commis des actes violant la civilité et la moralité communes, la législation pénale et les préceptes canoniques.

Tribune du journal "le Monde", 20 juillet 2024

Les chercheurs expliquent qu'ils avaient recueilli 3 témoignages de femmes.

Le premier remonte à des faits présumés en 1980, 1981.  Le 3e en 1989-1990. C'est celui d'une femme  qui "avait sollicité l'aide de l'abbé Pierre à l'abbaye de Saint-Wandrille". 

Pourquoi la commission n'a-t-elle pas rendu publiques ces accusations ? 

Dimanche 21 juillet, invitée de France Info, Anne Lancien, spécialiste du fait religieux,  qui fut membre de la commission sur les violences sexuelles dans l'église catholique (CIASE) a expliqué pourquoi les témoignages accusant l'abbé Pierre n'avaient pas été révélés. 

On a révélé des noms lorsqu'ils étaient connus, lorsqu'il y avait risque de récidive, lorsque ces prêtres ou ces moines étaient encore en activité et qui n'avaient pas fait l'objet de révélation

Anne Lancien, ancien membre de la commission sur les abus dans l'Eglise catholique

Pour  cette chercheuse, "Il risque vraisemblablement d'y avoir d'autres révélations dans les jours qui viennent" . 

Elle estime aussi qu'il est difficile de "parler face à une figure aussi charismatique que l'abbé Pierre". Le visage du fondateur d'Emmaüs était devenu une icône rassurante. L'abbé fut longtemps la personnalité préférée des Français. 

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